Attentats de Bruxelles

Procès des attentats de Bruxelles : après une matinée perturbée, le douloureux exposé de l’enquête a débuté

Procès des attentats à Bruxelles : des avocats sans mandat, la séance à nouveau suspendue

© Belga

L’audience de ce jeudi au procès des attentats de Bruxelles du 22 mars 2016 a de nouveau été perturbée dès le début par des questions de procédure.

Un seul des accusés détenus était présent. Les avocats de deux des accusés ont annoncé à la Cour qu’ils n’avaient plus de mandat pour défendre leurs clients. L’audience a dû être suspendue le temps de régler la question. Finalement, ces deux avocats ont été commis d’office.

Autre souci, l’audience a dû consacrer un certain temps à la lecture et à la traduction simultanée de documents transmis à la Cour en néerlandais. Il s’agit des documents fournis par la police pour justifier les fouilles des accusés détenus, à nu et avec génuflexions.

Ce n’est qu’en milieu d’après-midi que la cour d’assises a pu entamer les travaux qu’elle avait prévus mardi : l’exposé de l’enquête autour de l’attentat de la station de métro Maelbeek.

Depuis mardi, le procès des attentats de Bruxelles est bloqué ou perturbé par des questions de procédure. L’exposé de l’enquête prévu lors de l’audience de mardi n’a toujours pas pu avoir lieu.

Depuis la reprise, mardi, c’est toujours la question des fouilles avant le transfert vers le tribunal qui occupe la cour d’assises. Ces fouilles, à nu avec génuflexions, sont-elles, comme le prévoit une ordonnance en référé obtenue par les accusés, nécessaires et motivées individuellement ?

Mercredi, le Commissaire général de la Police fédérale a été convié à s’expliquer devant la Cour. Il a assuré que les documents justifiant ces fouilles existaient et qu’ils seraient fournis aux avocats des accusés.

Ces documents ont été transmis dans la nuit de mercredi à jeudi. Ils n’ont pas pour autant permis que le procès recommence, dès ce jeudi matin, sur de bonnes bases.

Ainsi, ce jeudi matin, seul un accusé, Bilal El Makhoukhi, était présent dans le box des accusés à la reprise de l’audience. La Présidente a interrogé cet accusé pour savoir s’il avait été fouillé avant son transfert. "Oui, on m’a fouillé. Avec un T-shirt pour le bas. Donc, cela ne change rien, torse nu ou avec un T-shirt ou un bonnet, ça ne change rien. On voit l’anus, c’est ça qui gêne", a répondu Bilal El Makhoukhi.

Le début d’audience devait ainsi être consacré à la lecture des documents envoyés par la police pour justifier ces fouilles. Ces documents ont été fournis pour six des sept accusés. On a cependant constaté d’emblée un problème technique : ces documents sont rédigés en néerlandais, alors que la procédure se fait en français dans cette cour d’assises. 

La Présidente a donc demandé à un interprète de traduire ces documents oralement au fur et à mesure de la lecture. C’était ça ou suspendre l’audience plusieurs jours en attendant que les documents puissent être traduits et transmis par écrit. Cette lecture avec traduction prend du temps. Pour le premier accusé concerné, Mohamed Abrini, cela a pris trente minutes.

Deux accusés n’avaient plus d’avocats : une solution a été trouvée

La lecture des documents motivants les fouilles des accusés a cependant été interrompue. Me Jonathan De Taye, l’avocat d’un des accusés, Ali El Haddad Asufi, a annoncé à la Président qu’il n’avait plus de mandat pour défendre son client. Me Laura Pinilla, l’avocate de Mohamed Abrini a, elle aussi, annoncé la même chose.

"Je vais devoir suspendre la traduction car, s’il n’y a pas d’accusé et plus d’avocat, cela pose un problème de régularité de procédure", a alors estimé la Présidente de la cour d’assises. Du côté des parties civiles, certains y ont vu une forme de sabotage du procès. Ce problème a nécessité une suspension d’audience, le temps que la Présidente puisse régler le problème avec le bâtonnier. 

Finalement, les deux avocats qui annonçaient ne plus avoir de mandat ont été commis d’office. Me De Taye, l’un des avocats concernés, a réagi. "Je vais respecter votre ordonnance, mais ce n’est que parce que j’ai pu me concerter avec mon bâtonnier que je reste", a-t-il répondu à la Présidente, précisant qu’il pourrait "quitter la salle" et qu'"un nouvel avocat devrait être désigné. Il lui serait impossible de bien faire son travail, prendre connaissance de 350 cartons et libérer son agenda pour six mois". A propos des fouilles, Me De Taye s’est dit "convaincu qu’on aura gain de cause sur les velléités d’une poignée de policiers qui font une fixette". "Je suis persuadé que les génuflexions vont cesser", a-t-il ajouté.

A 11h05, l’audience a pu reprendre avec la poursuite de la lecture des documents qui justifient les fouilles à nu des accusés détenus.

Peu avant 13 heures l’audience a été suspendue et a repris à 14 heures. Il restait deux accusés dont les fiches d’analyse de risque devaient encore être lues et traduites. Au final, on notera que plusieurs avocats de la défense ont relevé des erreurs factuelles dans les fiches qui concernaient leurs clients.

Témoignage d’horreur pour commencer l’exposé sur l’enquête autour de l’attentat dans le métro Maelbeek

Peu après 15 heures, ce travail de lecture des fiches était terminé. L’exposé des enquêteurs sur le volet "attentat dans la station métro Maelbeek" allait pouvoir commencer par le témoignage d’un responsable de la police des chemins de fer.

On prend tout de suite conscience de la gravité des faits

L’homme, qui explique avoir presque dix ans d’expérience à la police des chemins de fer, raconte ce qu’il a vu le 22 mars en arrivant dans la station de métro. Il explique qu’il y avait des débris de verre partout, des affaires abandonnées, des blessés sur des brancards. "On prend tout de suite conscience de la gravité des faits", déclare-t-il. Et de se souvenir de l’odeur sur place : "une combinaison de sang, de mort, d’électricité, de brûlures".

Il explique aussi que malgré son expérience, bien qu’il ait déjà eu à traiter des cas de suicides sur les voies, qu’il ait connu la catastrophe ferroviaire de Buizingen, "on ne sait jamais s’habituer à ce qu’on voit là".

"La première image que je vois, c’est une femme sur un brancard avec les intestins dans ses mains et un homme dont le corps était encore assez correct, mais qui n’avait plus de tête", ajoute-t-il en soulignant son "sentiment d’impuissance".

Dans la salle d’audience, du côté des victimes, ce témoignage est difficile à entendre. Le personnel d’aide aux victimes est présent pour apporter un réconfort.

Les photos prises par le labo qui est descendu sur place pour l’enquête sont diffusées dans la salle d’audience de la cour d’assises. On y voit la rame de métro, des sacs des bagages abandonnés dans la fuite, des dégâts aux alentours. A l’approche de la voiture n°2, ce sont des vues de victimes à terre, de corps ensanglantés sous les débris.

Le responsable de la police des chemins de fer explique que ce que les policiers arrivés sur place craignaient, c’était un surattentat si un terroriste était encore présent sur les lieux. C’est pour cette raison qu’on a procédé à une fouille des véhicules garés à proximité de la station de métro.

L’audience est terminée. Le procès reprendra ce vendredi 6 janvier à 9 heures avec l’audition du chef des pompiers et d’un médecin, les premiers à être intervenus sur place.

Sur le même sujet : Extrait JT (05/01/2022)

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