Attentats de Bruxelles

Procès des attentats de Bruxelles : cinq accusés quittent la salle d’audience, "les victimes ont été maltraitées durant six ans", rétorque Life4brussels

L’accusé Ali El Haddad Asufi, entouré de policiers, photographié au procès des attentats de Bruxelles et de Zaventem, ce 6 décembre 2022.

© Didier Lebrun – BELGA

Cinq accusés au procès des attentats à l’aéroport de Bruxelles National à Zaventem et au métro Maelbeek, le 22 mars 2016, ont décidé de quitter la salle d’audience au troisième jour du procès d’assises. Ils protestent contre leurs conditions de transfert depuis la prison vers le bâtiment Justitia à Haren.

Les cinq personnes qui ont quitté la pièce sont Mohamed Abrini, Osama Krayem, Salah Abdeslam, Sofien Ayari et Ali El Haddad Asufi. Au début de l’audience, El Haddad Asufi a demandé la parole et a déclaré se sentir "humilié".

Il y a une caméra au-dessus des toilettes

El Haddad Asufi a expliqué qu’il attendait le procès depuis six ans et demi. Il a regretté ne pas pouvoir s’exprimer sereinement. "Tout est fait pour qu’on se taise et pour nous briser psychologiquement", a-t-il déclaré ce mercredi matin, ajoutant "Ce n’est pas pour narguer la Cour ou qui que ce soit… Je voulais me défendre, mais ce n’est pas possible. On nous humilie tout le temps. Il y a une caméra au-dessus des toilettes".

Me Jonathan De Taye, avocat de l'accusé Ali El Haddad Asufi, 07-12-22

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El Haddad Asufi ajoute : "J’ai besoin de parler, mais tout est fait pour nous briser. Si on veut gaspiller cet argent pour qu’il n’y ait personne dans le box, ça ne sert à rien. Ne peut-on pas avoir une justice digne de notre pays ? Je suis un justiciable comme un autre. Des juges ont décidé que je pouvais avoir un bracelet électronique, je ne suis pas dangereux, je ne devrais pas me déshabiller devant trois mecs chaque matin."

Je ne devrais pas me déshabiller devant trois mecs chaque matin

L’accusé a terminé en précisant : "Tout ce qu’on veut, c’est parler et se défendre, il y a des choses qui doivent être dites, mais là, on nous en empêche. Vous avez dit qu’on n’était pas un groupe, qu’on devait être jugé individuellement, que la justice n’était pas une vengeance, mais ce n’est pas le cas."

Des "compétences administratives"

La présidente a ensuite interpellé le parquet qui rétorque à nouveau : "Ce sont des compétences administratives que nous n’avons pas. La seule chose que nous pouvions faire, c’est relayer aux instances compétentes et nous l’avons fait. Nous avons posé des questions concernant les caméras qui se trouveraient dans les toilettes. On nous a dit qu’elles ne sont pas dirigées vers cet endroit et que si c’était le cas, il y a des bandeaux pour masquer ces scènes".

On se moque de nous

Après la prise de parole de son client, l’avocat Jonathan De Taye a renchéri : "Je pense qu’on se moque de nous. M. El Haddad a toujours collaboré. Nous allons devoir travailler ensemble parce que M. El Haddad a envie de s’expliquer. Il y a des choses qui ne vont pas. J’espère que ça va se régler sans que nous ne devions aller en référé".

L’avocate de Salah Abdeslam, Delphine Paci a pris la parole à son tour : "Nous avons fait parvenir une mise en demeure au ministre de la Justice. Nous avons reçu une réponse hier après-midi nous disant qu’il allait y avoir des études. Les choses ne se font pas à la minute, mais les détenus sont à bout", a-t-elle déclaré en s’adressant à la Présidente de la Cour. Après cet échange, la présidente Laurence Massart a annoncé : "Je vais écrire sur le temps de midi pour dire qu’on souhaite que ce procès se passe bien. Mais je ne peux rien exiger car mes compétences sont limitées".

Des victimes maltraitées pendant six ans

Dans un communiqué express, le Conseil d’administration de l’aisbl Life4Brussels qui rassemble plusieurs victimes des attentats de Bruxelles et leurs avocats réagit : "Une victime présente à l’audience de ce jour, nous dit à juste titre que bon nombre de victimes ont vécu des situations extrêmement dégradantes, ne pouvant plus uriner ou déféquer seules durant de long mois. Elles ont été mises à nu dans tous les sens du terme, ne sachant plus se prendre en charge seules, dépendant parfois d’étrangers pour continuer à vivre."

Me Maryse Alié, membre du collectif d'avocats de l'association Life4Brussels 07-12-22

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Néanmoins, la nuance reste de mise. "Cette victime dit que cela n’est toutefois pas une raison pour traiter les accusés de manière inhumaine et dégradante !"

Elle interpelle sur deux choses : l’empathie des accusés et la responsabilité du SPF Justice : "On demande souvent aux victimes de se mettre à la place des accusés, mais est-ce que les accusés se sont mis un seul instant à la place des victimes ?"

Il n’est pas envisageable pour nous que les accusés ne prennent pas part à ce procès

Et d’ajouter : "Le SPF Justice doit absolument remédier à la situation. Les victimes ont été maltraitées durant plus de six ans. Le SPF justice en est clairement responsable. Il n’est pas question qu’à nouveau, le SPF Justice fasse capoter les choses. Après la saga des box, aujourd’hui, une nouvelle saga risque de mettre à mal ce procès. Il n’est pas envisageable pour nous que les accusés ne prennent pas part à ce procès."

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