Justice

Procès des attentats de Bruxelles : le fils de Sabrina décédée à Maelbeek se demande comment aller au ciel pour voir sa maman

Sarah Esmael Fazal, la sœur de Sabrina, décédée dans le métro le 22 mars

© Melanie Joris

Ce lundi marque la troisième semaine de témoignages de victimes et de leurs proches au procès des attentats de Bruxelles. La famille de Sabrina Esmael Fazal a pris la parole pour lui rendre hommage et évoquer Heyden, ce petit garçon de huit ans qui grandit désormais sans sa maman.

Le 22 mars 2016, Sabrina a pris un bus et puis le métro pour se rendre dans le centre de Bruxelles où elle suivait des cours pour devenir infirmière. Quand la mère de Sabrina, Rita Gérard, se lève, elle ressent quelque chose d’inhabituel. Elle allume la télé et apprend qu’il y a eu des attentats. Mais elle garde espoir. Sabrina est moins assidue à ses cours depuis la naissance de son fils, elle rate souvent la première heure.

Rita Gérard tente quand même de joindre sa fille : "Je tente de l’appeler, mais je n’ai pas de réponse. Je réessaie, pas de réponse". Elle constate de sa voix lente et douce : "Il ne lui restait qu’un arrêt avant d’arriver à destination…".

Sans nouvelle négative, l’espoir était là

Vers 16 heures, Rita Gérard se rend à la police pour déclarer qu’elle n’a aucune nouvelle de sa fille qui était dans le métro. Dans la soirée, elle commence à faire le tour des hôpitaux. L’attente se prolonge tout en espérant : "L’attente était insupportable, mais n’ayant aucune nouvelle négative, l’espoir que Sabrina allait finir par rentrer était là".

La sœur de Sabrina, Sarah Esmael Fazal, se souvient aussi de ces terribles journées : "Notre maison était remplie d’amis, je n’avais jamais été aussi entourée et aussi seule en même temps". Et au fond d’elle, ce sentiment qui commence à s’enraciner : "Je savais que quelque chose s’était passé et que je ne la reverrais plus jamais".

Le matin du jeudi 24 mars, la maman de Sabrina est à l’hôpital royal militaire, dans l’attente d’informations. Une amie de la famille y travaille. Rita Gérard lui demande si elle a des nouvelles de sa fille. Elle lui répond qu’aucune personne blessée ne correspond à son signalement et lui glisse : "Si tu n’as pas encore de nouvelle, c’est qu’il n’y a plus d’espoir".

Ce n’est que le 27 mars que la famille apprend le décès de Sabrina. Sarah Esmael Fazal ouvre la porte à deux policiers : "Une policière a posé une main sur l’épaule de mon père et lui a dit : 'Nous sommes désolés, votre fille est décédée'. J’ai vu noir et je suis tombée".

C’est extrêmement difficile de sortir d’un cauchemar comme celui-là

Le décès de Sabrina a eu un impact énorme sur tous les membres de cette famille. Rita Gérard, la maman de Sabrina : "Je suis tombée en dépression, j’ai perdu mes cheveux, j’ai perdu du poids. Je ne faisais plus que 45 kg, je ne mangeais plus, je ne dormais plus. Je n’avais plus goût à la vie".

Cette mère de famille constate aussi les conséquences sur son mari. C’est lui qui est allé identifier le corps de Sabrina. "Mon mari me dit souvent : "vous n’avez pas vu ce que j’ai vu". Il ne s’en remet pas. Il a sombré dans la dépression".

Le frère de Sabrina, Jérémie, a aussi beaucoup de difficulté à surmonter cette épreuve. Rita Gérard dévoile qu’elle a découvert une habitude de son fils : "Jérémie se rend parfois sur la tombe de Sabrina pour s’y coucher et être en contact avec elle. Pour avoir un câlin de sa sœur".

Quant à la sœur de Sabrina, Sarah Esmael Fazal, celle-ci a expliqué que chaque jour était un combat. Qu’elle a récemment retrouvé la foi, ce qui l’aide à avancer et à devenir la femme qu’elle a toujours souhaité être.

Heyden nous dit que sa maman lui manque

Au-delà de la foi, ce qui aide cette famille à tenir debout et à avancer, c’est Heyden. Le fils de Sabrina. Le 22 mars 2016, il n’avait qu’un an et demi. Aujourd’hui, ce petit garçon de 8 ans pose souvent des questions à sa grand-mère et à sa tante.

Rita Gérard énumère certaines de ces questions. "Il me dit : "Mamina, comment on fait pour aller au ciel ?". Je lui ai demandé : "Pourquoi ?". Il me répond : "C’est pour aller voir ma maman". Une autre fois, il m’a demandé : "Est-ce que Dieu est gentil ?". Je lui ai dit que oui. Et il a répondu : "Mais alors pourquoi est-ce qu’il a pris ma maman ?".

À la veille de son huitième anniversaire, sa tante lui demande ce qui lui ferait plaisir comme cadeau. Il répond : "Je voudrais maman".

Les accusés ont-ils des remords ?

Rita Gérard et Sarah Esmael Fazal se sont toutes les deux adressées aux accusés. La mère de Sabrina s’est interrogée : "Comment peut-on au nom d’une religion ôter la vie de personnes innocentes ? Je me demande quel regard ils ont sur les horreurs qu’ils ont commises. Ont-ils des remords ?".

Pour s’adresser aux accusés, la sœur de Sabrina s’est, elle, référée à sa foi. "Je vous pardonne car je n’ai plus aucune haine envers vous. J’avance sans haine ni chagrin. J’avais perdu ma foi, mais je l’ai retrouvée. Je prie pour que vous puissiez trouver une paix intérieure".

Sur le même sujet : Extrait JT (22/03/2023)

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