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Procès des attentats de Paris : "Je veux faire face"! Les rescapés des attaques vont témoigner durant cinq semaines

Hommage aux victimes du 13 novembre 2015

© AFP

Par Patrick Michalle

Dès ce mardi et durant cinq semaines les trois cents victimes rescapées des attaques du 13 novembre vont prendre la parole pour mettre des mots sur ce qu’ils ont vécu cette fameuse nuit d’horreur durant laquelle cent trente personnes ont perdu la vie et trois cent cinquante autres ont été blessées.

Déjà depuis l’ouverture du procès il y a trois semaines, les équipes d’enquêteurs sont venues décrire les différentes scènes de crime dans lesquelles ils ont dû intervenir, évoquant un temps "de sidération" face à ce qu’ils ont qualifié de véritables scènes de guerre. Certains malgré leur professionnalisme n’ont pu dissimuler encore aujourd’hui leur émotion durant le récit de ce qu’il faut bien qualifier de massacre de civils sans défense.

Témoigner pour établir la vérité des faits et pour la mémoire de ceux qui ne sont plus là.

Durant plusieurs semaines à raison d’une quinzaine de témoignages par jour, les parties au procès vont prendre connaissance de ce qu’ont ressenti les survivants des trois attaques menées dans la capitale française.

S’exprimeront d’abord dès ce mardi, ceux qui se trouvaient autour du Stade de France lors des explosions, ensuite dans les jours qui suivent viendront les victimes de l’attaque des terrasses, puis durant quatre semaines les rescapés de la salle de spectacle du Bataclan dans laquelle nonante personnes ont perdu la vie.

"Je veux faire face. Ça fait partie de mon travail de reconstruction", explique Marko, 31 ans. "Je veux affronter ces personnes, qu’ils voient qui sont les victimes". Cet homme était attablé avec une bande d’amis le soir du 13 novembre, l’un d’eux a été tué au cours de l’attaque des terrasses.

Deux hommes qui tiraient le fusil mitrailleur à la hanche

Pour Christophe, la soirée au Bataclan avec des amis s’est transformée en cauchemar lorsqu’il a entendu vers 21h40 ce qu’il pensait être des pétards : "Je venais de prendre une photo, je me suis retourné et j’ai vu deux hommes avec des fusils d’assaut à la hanche et qui tiraient avec un air "très" robotique, on va dire". Il est alors parvenu avec quelques autres à s’échapper dans une pièce hors de vue des assaillants jusqu’à la fin de l’attaque : "Après deux heures et quelques, le RAID est intervenu pour nous sortir de là". Même si Christophe n’a pas été blessé physiquement, aujourd’hui dans certaines situations, il souffre de claustrophobie.

Ce procès doit servir à comprendre grâce à l’enquête

Pour lui ce procès doit servir à comprendre ce qui s’est passé grâce à l’enquête, la relation entre exécutants et commanditaires et puis il reste des zones obscures dans sa mémoire à propos de ce qui s’est passé ce soir-là : "qu’il a envie de combler". Pour lui ce serait bien que ce procès au-delà des réponses toutes faites permette "dans sa complexité, sa diversité par les parties présentes aux gens à en tirer quelque chose de positif, de pédagogique".

Dépasser ses craintes, ne pas avoir peur d’exprimer son émotion

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Comment trouver la force de se présenter à la barre sans perdre pied ? Cet exercice difficile a été préparé avec leurs avocats. Une étape nécessaire dans leur processus de reconstruction mais aussi pour rendre un dernier hommage à ceux qui ne sont plus là pour témoigner. Chacun sera seul à la barre face aux juges de la cour d’assises et pourra, le cas échéant, se tourner vers la gauche où se situe le box des accusés.

Des peurs et des freins qu’il faut pouvoir affronter

Pour l’avocat Gérard Chemla qui défend 130 parties civiles lors de ce procès, et dont une quinzaine a souhaité témoigner à la barre, il a fallu se préparer car "la culpabilité du survivant", la crainte de n’avoir rien de particulier à dire ou tout simplement la peur de craquer sont des freins bien réels qu’il faut pouvoir affronter. "Avoir des émotions, qui prennent parfois le dessus, pleurer publiquement, ce n’est pas une déchéance", leur a-t-il dit.

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