Promenade au bois de Lauzelle : l'UCLouvain obtient le label PEFC pour la gestion durable de sa forêt

Le bois de Lauzelle à Louvain-la-Neuve a reçu la certification PEFC

© Africa Gordillo – RTBF

Le bois de Lauzelle a rejoint le petit cercle de forêts wallonnes privées gérées de manière durable et disposant du label PEFC. Cette forêt périurbaine au nord-ouest de Louvain-la-Neuve appartient à l’UCLouvain qui y développe un projet multiple, alliant le respect de la biodiversité, l’ouverture au public, un développement économique limité et l’ouverture à la recherche et à l’enseignement.

Une forêt multifonctionnelle

Mathieu Jonard, professeur à la Faculté de bioingénieurs à l'UCLouvain

Ce dimanche matin, Mathieu Jonard, membre du comité de gestion du bois de Lauzelle et professeur à la faculté des bioingénieurs de l’UCLouvain, nous donne rendez-vous sur le parking aménagé à la lisière de la forêt. La brume s’est quasiment levée partout et le soleil commence, bien que doucement, à nous réchauffer. Un groupe de marcheurs s’est donné rendez-vous au même endroit, prêt à s’engouffrer dans le bois.

Nous les devançons et la discussion s’engage autour de la gestion durable du bois et sa reconnaissance, toute récente, par le PEFC, le Programme de reconnaissance des certifications forestières. Ce label, symbolisé par un pictogramme reprenant deux arbres dans un cercle, pourra désormais être utilisé par l’UCLouvain, par exemple sur le bois issu des 200 hectares du bois de Lauzelle. La grande majorité des forêts publiques wallonnes a reçu le label PEFC mais seulement 13% des forêts privées. 

Le bois de Lauzelle à Louvain-la-Neuve

"Il n’y a pas que la production de bois qui est géré durablement", nous explique d’entrée de jeu Mathieu Jonard. "Toutes les fonctions de la forêt le sont parce que nous privilégions une forêt multifonctionnelle : sociale, écologique, économique -même si cette fonction n’est pas prioritaire-, et didactique."

La forêt ne se veut pas isolée et repliée sur elle-même mais ouverte. Le défi est de préserver l’écrin de verdure, sa riche biodiversité et, dans le même temps, de l’ouvrir au public, et lui conférer une dimension didactique spécifique en la considérant par ailleurs comme un laboratoire à ciel ouvert pour la recherche et l’enseignement.

Enseignants et étudiants de la faculté de bioingénieurs connaissent bien ces espaces boisés. "Nous voulons que ce soit un modèle de gestion durable, et toujours perfectible, pour nos étudiants", poursuit le professeur de l’UCLouvain.

© Tous droits réservés

Oser la lumière

De jeunes pousses de chênes grandissent dans un espace où un puits de lumière a été créé, pour permettre à la forêt de se régénérer

Les feuilles mortes craquent sous nos pas et ce bruit, mêlé à ceux des oiseaux et à une faible circulation automobile encore proche, nous conduit à une futaie de hêtres. Tantôt ces arbres se dressent très haut jusqu’à la lumière comme dans une cathédrale, tantôt de jeunes pousses de hêtres de plusieurs dizaines de centimètres à peine forment un tapis au pied des arbres plus âgés.

"Le travail du forestier, c’est d’oser la lumière", souffle Mathieu Jonard. Oser et doser la lumière pour permettre aux essences comme les hêtres et les chênes de se régénérer. La lumière est en effet indispensable à la régénération de la forêt mais cette dernière est parfois tellement épaisse qu’il faut lui donner un coup de main. Des arbres sont coupés, de-ci, de-là, pour que la lumière puisse pénétrer dans le bois et permettre aux jeunes arbres de pousser. Les coupes ne sont pas réalisées n'importe comment mais suivent un plan bien établi. 


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"Si l’on ne fait rien, la forêt risque de vieillir d’un coup et de s’effondrer. Or, il est bon de faire coexister des arbres de tous les âges pour développer la résilience de la forêt c’est-à-dire sa capacité à retrouver un équilibre après un événement exceptionnel", poursuit le professeur de la Faculté de bioingénieurs de l’UCLouvain. Des événements exceptionnels, toutes les forêts en vivent. Celle-ci n’échappe pas à la règle. Des épicéas ont ainsi été abattus parce qu’ils étaient infestés de scolytes, ces petits insectes qui se développent sous l'écorce des arbres.

Castor, pic mar et martin-pêcheur

Dans une gestion durable telle celle du bois de Lauzelle, certains arbres morts ne sont pas évacués. Les hauts troncs morts servent de refuge aux oiseaux. "La sittelle, par exemple, va descendre le long du tronc la tête la première à la recherche de nourriture", raconte notre guide.

D’autres oiseaux, rares, ont fait de Lauzelle leur territoire comme le martin-pêcheur, le pic noir ou le pic mar. Les souches mortes sont laissées aussi sur le sol. Les orvets, les grenouilles et les salamandres viennent s’y réfugier et les champignons y prolifèrent.

Parmi les autres habitants de cette forêt, le castor n’est pas le plus discret. Certes, il n’est pas visible en journée mais ses œuvres le sont. Il y a deux familles de castors et elles ne cessent de construire des barrages sur le Blanc-Ry qui coule dans la forêt pour se protéger des prédateurs. Ces barrages sont visibles des caillebotis construits sur la rivière.

Un barrage construit par les castors sur le Blanc-Ry
Un barrage construit par les castors sur le Blanc-Ry © Africa Gordillo – RTBF

Dans la vallée du Blanc-Ry, une zone plus alluviale, un étang se dévoile. "De l’autre côté de l’étang, il y a cinq hectares de réserve intégrale c’est-à-dire une forêt où nous n’intervenons pas et où le public n’a pas le droit d’aller", explique notre guide. "On veut une forêt où l’humain est en harmonie avec son milieu et, bien sûr, cette harmonie est toujours perfectible", conclut Mathieu Jonard.

Le bois de Lauzelle comporte d’ailleurs plusieurs écosystèmes. Cette forêt de feuillus est dominée par les hêtres et les chênes mais y poussent aussi des bouleaux, des aulnes et bien d’autres essences, sans compter des landes sèches également présentes.


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Il est possible de s’y promener, d’y courir, d’y rouler à vélo à condition de respecter certaines règles. Une partie de la forêt, quelque 10 hectares, constitue une zone "récréative" où les mouvements de jeunesse, par exemple, peuvent se rendre, ici encore moyennant le respect de la faune et de la flore.

Des caillebotis permettent de franchir le Blanc-Ry par endroits
Des caillebotis permettent de franchir le Blanc-Ry par endroits © Africa Gordillo – RTBF

Trouver l'équilibre

La gestion durable des 200 hectares du bois de Lauzelle nécessite une présence quotidienne. Le garde forestier Thibaut Thyrion y travaille à temps plein et peut compter sur deux mi-temps supplémentaires pour l’aider. Plus globalement, le bois est géré par le GPEX, le service de gestion du patrimoine – espaces extérieurs de l’UCLouvain, en collaboration avec la Faculté des bioingénieurs et le Earth & Life Institute.

Sur les deux heures passées dans cette forêt, il n’est pas rare de croiser des promeneurs, des joggeurs ou des cyclistes. Comme tant d’autres, Mathieu Jonard nous explique que le bois de Lauzelle a servi de refuge pendant la période de confinement. Nombreux sont les habitants des environs à être venus s’y ressourcer.

Continuer à privilégier cet équilibre entre la forêt et son environnement est l’un des objectifs de l’UCLouvain. Une forêt que l’on laisse à ses futaies, ses castors et ses puits de lumière pour rejoindre le bitume dans lequel elle est enclavée.

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