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Protestations en Chine : "La politique zéro Covid décidée par les autorités était intenable depuis le début"

Des agents de santé gardent l’entrée d’une zone résidentielle sous confinement en raison des restrictions liées au Covid-19, à Pékin, le 24 novembre 2022.

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Manifestations à Shenzhen, émeutes à Zhengzhou, affrontements avec les forces de l’ordre à Canton, protestations à Shangaï et à Pékin… En Chine, la coupe semble pleine pour les habitants soumis depuis le début de la pandémie à la stratégie zéro Covid du gouvernement.

Mais rien n’y fait, le gouvernement chinois persiste et signe en "s’en tenant indéfectiblement" à sa stratégie basée sur des confinements stricts, des tests de masse et à des restrictions de voyage.

Dernièrement, ce sont les habitants de la ville de Pékin qui en ont fait les frais. La capitale chinoise connaît ces derniers jours une flambée épidémique jamais vue depuis le début de l’épidémie. Des dizaines d’immeubles résidentiels ont été confinés et les entreprises généralisent le télétravail, alors que les écoles, restaurants et commerces ferment à nouveau par peur d’être placés en quarantaine.

Du personnel de sécurité portant des équipements de protection individuelle près d’une zone résidentielle sous confinement en raison des restrictions liées au Covid-19, à Pékin, le 22 novembre 2022.
Du personnel de sécurité portant des équipements de protection individuelle près d’une zone résidentielle sous confinement en raison des restrictions liées au Covid-19, à Pékin, le 22 novembre 2022. © Tous droits réservés

La Chine, qui compte 1,4 milliard d’habitants, est la seule grande économie au monde qui tente encore d’enrayer la propagation du virus dans le pays, en fermant des villes entières et en plaçant les contacts des patients infectés en stricte quarantaine. Des mesures dont la durée n’est jamais annoncée à l’avance.

Néanmoins, les contaminations continuent d’augmenter. Un échec de stratégie pour Pékin ?

Une situation intenable

"Tout le monde estimait que la politique zéro Covid décidée par la Chine était intenable depuis le début", se souvient Yves Van Laethem, infectiologue et porte-parole interfédéral dans la lutte contre le Covid-19. "C’est comme vouloir arrêter des molécules d’oxygène en fermant une porte, certaines finiront toujours par passer."

Les autorités chinoises, elles par contre, y croyaient. Du moins au début, en multipliant les confinements et les tests de masse. Pour Yves Van Laethem, poursuivre cette stratégie aujourd’hui est plus une question d’honneur que d’intérêt sanitaire. Étant donné que la grande majorité des personnes touchées sont asymptomatiques, elles ne représentent pas un danger important pour le système de santé du pays.

Mais la crédibilité de la gestion de la crise sanitaire par la Chine – plusieurs fois citée en modèle par le passé – est en jeu. "Ce sont les habitants qui payent le prix inutilement élevé de cette stratégie", estime l’expert.

Des chiffres records…

Malgré toutes ces mesures restrictives, les derniers chiffres sur la situation sanitaire dans le pays ne vont pas dans le bon sens. Le nombre quotidien de cas Covid a atteint un nouveau record ce mercredi, avec 31.444 nouveaux cas, dont 27.517 sont asymptomatiques, a indiqué le ministère de la Santé.

Ces nouveaux chiffres sont supérieurs aux 29.317 infections locales enregistrées à la mi-avril, lorsque Shanghai – la troisième ville la plus peuplée du monde – était sous confinement et que ses habitants avaient du mal à acheter de la nourriture et à accéder aux soins médicaux.

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La Chine a également annoncé en début de semaine son premier mort du Covid-19 depuis mai, portant le total de décès dans le pays à 5232 depuis le début de l’épidémie en janvier 2020.

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Difficile néanmoins de vérifier la véracité des chiffres annoncés et le réel impact de ces contaminations sur le système de santé du pays, tant la communication des autorités à ce sujet est cadenassée.

Difficile également d’appréhender le taux effectif de vaccination dans le pays. La porte-parole de la Commission nationale de la santé annonçait le 24 octobre dernier, que la Chine avait entièrement vacciné 75,6% de sa population, soit 1,068 milliard de Chinois, sur une population de 1,412 milliard de personnes.

Le pays aurait administré au total 2,245 milliards de doses de vaccin, selon les données officielles.

… mais bien en dessous des critères internationaux

Si les contaminations dans le pays atteignent aujourd’hui des records, ces derniers doivent toutefois être nuancés au vu de la situation dans les autres pays. Leur nombre reste en effet très faible par rapport aux critères internationaux.

Chez nous, alors que l’épidémie est actuellement considérée comme "évoluant positivement", en moyenne 757 contaminations ont été enregistrées sur les sept derniers jours, contre 26.115 en Chine. Si l’on transpose ces chiffres sur la population totale de ces pays, cela représente 0.0065% de la population belge, contre 0.0018% de la population chinoise.

À titre de comparaison, ce pourcentage s’élève actuellement à 0,013% aux États-Unis et 0,053% en France.

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Malgré ces différentes "vaguelettes", Yves Van Laethem ne se dit pas inquiet concernant l’évolution de l’épidémie dans les prochains mois, "sauf nouvelle surprise" telle qu’un variant inattendu.

"À présent, il faut vivre avec un animal que nous avons un peu amadoué, en partie grâce à la vaccination. Je ne comprends pas cette volonté de la Chine de vouloir absolument le chasser hors de ses frontières. La Grande Muraille ne leur sera d’aucune utilité dans ce cas-là", conclut le spécialiste.

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