"Marc Tarabella a été exclu de sa qualité de membre" du PS. L’eurodéputé belge est cité dans le Qatargate, l’affaire de corruption au Parlement européen. Ce type d’exclusion est rarissime. Au PS on craint que le Qatargate ne gangrène l’image du parti.
Valises de fric
Le PS est en mode sauve qui peut. C’est peu dire que le Qatargate fait paniquer au boulevard de l’Empereur. Car l’affaire a un potentiel destructeur évident. Des sacs de billets, des grands hôtels, le Qatar, un repenti, une corruption crasse à l’ancienne qui ne cesse de rebondir dans les médias et l’opinion. Une affaire hors norme, une affaire qui va probablement durer des mois, s’étaler au rythme des révélations de Pier Antonio Panzeri. Bref de quoi pourrir la vie du PS, un risque de gangrène qui valait donc bien de se couper un membre, d'un membre, surtout un petit.
Fait rarissime, le collège des présidents et vice-président du PS (dont Paul Magnette, Philippe Close et Willy Demeyer) a tranché en concertation, dit le parti, avec le groupe socio-démocrate du Parlement européen.
Une exclusion singulière, car Marc Tarabella n’est pas (encore ?) inculpé. Or, jusqu’ici le PS s’est montré plutôt prudent voire très patient avec ses membres pris dans les rets des juges et/ou des journalistes.
Pas de jurisprudence
Il n’y a pas de jurisprudence, de coutume établie en matière d’exclusion lors d’affaire judiciaire. Jean-Charles Luperto inculpé puis condamné a épuisé toutes les voies de recours est toujours membre du PS. Lors des dernières affaires, la plupart des inculpés ou condamnés sont partis d’eux-mêmes. Ils ont démissionné avant que le PS intervienne. Ce fut le cas d’Alain Mathot, inculpé en 2011, jugé coupable en 2022, il ne sera jamais exclu durant toute la procédure. Il démissionne du PS après sa condamnation. Yvan Mayeur et Stéphane Moreau ont eux aussi démissionné avant que le PS n’intervienne, sentant le vent tourner sans doute, et pour éviter l’humiliation d’une exclusion.
En fait, les dernières exclusions n’étaient pas liées à des affaires judiciaires, mais plutôt à des divergences politiques. Emir Kir, le député-bourgmestre de Saint-Josse a été exclu en 2020 par la commission de vigilance du PS bruxellois, pour ne pas avoir suivi la ligne du parti quant au cordon sanitaire. Muriel Targnion, bourgmestre de Verviers a été exclue aussi en 2020, elle pour avoir déposé une motion de méfiance collective dans sa commune contre l’avis de son parti.
Au cas par cas
Cette prudence du PS est partagée par les autres partis qui ont eu ces dernières années dans leurs rangs des affaires : le MR, les engagés, Défi.
Ce qui est certain c’est que la jurisprudence, un temps évoquée au moment des affaires de Charleroi, inculpation égal exclusion n’a jamais été appliquée. Pour une raison simple : un grand nombre d’inculpations n’ont pas débouché sur des condamnations. C’est même sans doute une majorité des cas. Les présidents de parti pouvaient difficilement se laisser enfermer dans l’agenda judiciaire. Encore moins dans l’agenda médiatique.
Jean-Charles Luperto, condamné par la justice, reste membre du PS parce que les faits d’outrage public aux mœurs ne sont pas considérés comme un problème politique suffisamment important pour justifier l’exclusion d’un élu faiseur de voix à Sambreville. Le calcul est inverse pour Marc Tarabella. Même pas encore inculpé, la suspicion de corruption est jugée suffisamment destructrice pour le parti pour exclure le député-bourgmestre d’Anthisne.
On peut donc être condamné et élu et n’être même pas inculpé et exclu. En la matière seul compte l’intérêt du parti.