Biodiversité

Quand les animaux sauvages prennent d’assaut les villes : loutres, cacatoès, renards…

Quand les animaux sauvages prennent d’assaut les villes : loutres, cacatoès, renards…

© Susan Walker

Plus personne ne s’étonne de la présence en ville d’animaux tels que les rats et les pigeons. Mais celle de renards, ratons laveurs, loutres et cacatoès est beaucoup plus surprenante. Toutefois, ces espèces s’invitent de plus en plus dans l’espace urbain.

La loutre a conquis Singapour

La loutre a conquis Singapour.
La loutre a conquis Singapour. © pixonaut

Les loutres ont tout pour plaire avec leur belle frimousse et leur douce fourrure brune. Mais ces mammifères sont loin de faire l’unanimité à Singapour, où leur population a plus que doublé depuis 2019, selon le Guardian. La Cité-Etat abriterait pas moins de 17 familles différentes de cette espèce de mustélidés. Le phénomène est tel qu'"il n’y a plus un seul endroit à Singapour où l’on ne trouve pas de loutres", comme l’a déclaré N Sivasothi, chercheur en biologie à l’université nationale de Singapour, au quotidien britannique.

Cette omniprésence des loutres est une conséquence directe de la politique hydrique qu’a déployée le gouvernement de Lee Kuan Yew dès les années 80 afin d’améliorer la qualité de l’eau des rivières de l’archipel.

Les cours d’eau sont devenus beaucoup moins pollués, et donc riches en poissons.

De quoi faire le bonheur des loutres, qui en mangent l’équivalent d’un kilo par jour. 

Mais pas celui des Singapouriens. Ils sont nombreux à se plaindre que les loutres de l’archipel bloquent la circulation, pillent les bassins privés et, plus rarement, s’en prennent à eux. Un ressortissant britannique a déclaré en 2021 qu’il "a cru qu’il allait mourir" lorsqu’une meute d’une vingtaine de loutres l’a poursuivi, plaqué au sol et mordu une trentaine de fois en quelques secondes. 

A Sydney, les cacatoès font les poubelles !

A Sydney, les cacatoès font les poubelles !
A Sydney, les cacatoès font les poubelles ! © Simon McGill

Singapour n’est pas le seul territoire à travers le monde qui éprouve des difficultés à cohabiter avec des animaux sauvages. Les habitants des banlieues de Sydney déploient des efforts d’inventivité pour tenir les cacatoès à huppe jaune, une espèce particulièrement répandue dans la région, éloignés de leurs déchets ménagers. Certains posent une brique sur le couvercle de leur poubelle tandis que d’autres préfèrent y attacher des objets lourds comme des bouteilles en plastique remplies d’eau. Problème : les oiseaux s’enseignent mutuellement comment déjouer les pièges des citadins, selon une étude parue en septembre dans la revue Current Biology.

Londres compte 10 renards au kilomètre carré

Londres compte 10 renards au kilomètre carré.
Londres compte 10 renards au kilomètre carré. © Ian Wade Photography

Les habitants de Londres doivent, eux, composer avec la présence de renards dans la capitale anglaise. Tout comme Larry, le chat locataire du 10 Downing Street. Il a récemment été filmé en train de chasser manu militari un renard chétif hors de sa rue. Cette séquence surprenante a été visionnée près de 6 millions de fois sur le compte Twitter du félin et a attiré l’attention des Britanniques sur un phénomène vieux de plusieurs décennies.

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Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les villes anglaises abritent des renards depuis au moins 80 ans. Leur nombre s’est stabilisé dans les années 80, à tel point que le London Wildlife Trust estime qu’il y en a désormais 10.000 à Londres, soit une une dizaine au km². Ils sont toutefois de plus en plus visibles parce qu’ils n’ont plus d’endroit où se cacher en ville.

La ville, un espace inter-espèces

La ville, un espace inter-espèces.
La ville, un espace inter-espèces. © Jamie Hall

C’est là tout le problème : l’espace urbain tel que nous le connaissons a été imaginé contre les bêtes sauvages, et plus généralement la nature. Cette dernière n’est tolérée que lorsqu’elle est maîtrisée. En d’autres termes, la ville est pensée pour l’homme et non pour les quelque 8,7 millions d'espèces vivantes qui peuplent la Terre.

Pourtant, les animaux aiment la ville : ils y trouvent de l’eau et de la nourriture et peu de prédateurs.

C’est pour eux un véritable "espace de liberté'', comme l’explique la philosophe Joëlle Zask dans son livre "Zoocities" (Premier Parallèle, 2020).

Rien d’étonnant donc à ce qu’ils y prennent leurs aises. C’était d’autant plus flagrant durant le premier confinement lié à l’épidémie de Covid-19, lorsque des animaux ont profité du couvre-feu pour explorer les rues vides du monde entier. Des daims ont ainsi été aperçus à Boissy-Saint-Léger, dans le Val-de-Marne, des chèvres sauvages à Llandudno, une petite ville côtière du pays de Galles et un puma à Ñuñoa, un quartier résidentiel de la capitale chilienne de Santiago. 

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Ces scènes insolites en ont amusé plus d’un mais elles ont également soulevé un point important. Et si nous devions côtoyer les animaux sauvages au quotidien et non pas juste quand les villes sont vides ? Tout laisse à penser que cela se produira dans un avenir proche, conséquence de la crise climatique et de la détérioration de leurs espaces naturels. Certains chercheurs s’y préparent et repensent la ville pour qu’humains et animaux puissent y cohabiter paisiblement. En bons voisins. 

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