Belgique

Quatrième vague : ne suffirait-il pas d’ajouter des lits en soins intensifs ?

Par Arnaud Ruyssen

C’est une question qui revient en boucle dans les débats, les conversations et sur les réseaux sociaux : "si le problème est l’engorgement des services de soins intensifs, ne pourrait-on pas simplement augmenter le nombre de lits disponible ?" Déclic s’est penché sur cette option, qui n’en est pas vraiment une.

C’est pratiquement impossible

Le premier problème auquel se heurte cette idée, c’est qu’elle est pratiquement impossible à mettre en œuvre à court terme. L’enjeu ce n’est pas la literie, ni même les chambres, mais le personnel dont on a besoin pour s’occuper des patients qui occupent ces lits.

A l’hôpital CHU Saint-Pierre, à Bruxelles, le directeur, Philippe Leroy, explique que " dans une unité de soins intensifs il faut compter deux équivalents temps plein d’infirmier par lit". Or les hôpitaux, en temps normal, ont déjà beaucoup de mal à trouver les infirmières et les infirmiers nécessaires pour remplir leur cadre. Ils doivent parfois aller recruter à l’étranger du personnel qu’il faut ensuite former. "A court terme et qui plus est dans un contexte de crise, c’est impossible d’augmenter nos effectifs pour augmenter substantiellement le nombre de lits", explique Philippe Leroy.

Sans compter que le personnel hospitalier est sous pression depuis le début de cette crise, avec une grosse fatigue psychique et émotionnelle liée aux vagues précédentes. "Il faut aussi ajouter l’absentéisme lié au personnel actuellement malade du COVID, autour de 10% de nos effectifs en ce moment", ajoute encore le directeur du CHU Saint-Pierre.

Tout cela fait que même le chiffre de 2000 lits de soins intensifs, habituellement retenu comme point de repère à l’échelle du pays est aujourd’hui surévalué. Le SPF santé précise que 136 lits sont actuellement indisponibles pour cause de manque de personnel.

Augmenter les lits, c’est juste gagner un peu de temps

Par ailleurs les épidémiologistes nous rappellent que dans une phase d’augmentation telle que nous la connaissons actuellement, augmenter le nombre de lits disponibles nous permettrait seulement de gagner du temps.

Le SPF-Santé a fait ses calculs : en ce moment, le nombre de lits occupés augmente de 3,5% par jour. On est à 555 patients aujourd’hui, en USI. Si l’on devait continuer à ce rythme… on pourrait se retrouver à 1000 lits occupés autour du 3 décembre.

C’est la raison pour laquelle les différents gouvernements du pays s’apprêtent à reprendre des mesures pour casser la dynamique de cette quatrième vague. Malheureusement, avec ce variant Delta et malgré nos très hauts taux de vaccination, on ne peut pas se permettre de laisser complètement circuler le virus. Il y a suffisamment de patients non immunisés ou à risque pour remplir les hôpitaux.

Un enjeu éthique

Et puis, il ne faut jamais oublier que, dans ces lits, il y a des personnes dont la vie est en danger. Selon les chiffres de Sciensano, lors de la 3e vague, 13% des personnes hospitalisées finissaient par décéder à l’hôpital, 30% parmi ceux et celles qui étaient admis aux soins intensifs.

Dès lors, dire "qu’il suffit d’augmenter le nombre de lits" comporte aussi une fameuse dose de cynisme. C’est accepter l’idée qu’on laisse davantage de personnes contracter la maladie et, pour certaines, en mourir.

Explications plus détaillées et complète dans la vidéo ci-dessus. Extrait de Déclic, votre nouveau Talk-Info, chaque soir à 17H sur La Première et à 19H sur La Trois, en télé.

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