Belgique

Que va-t-il se passer chez Delhaize ? Syndicats et direction sont dans l’impasse, un conciliateur social va intervenir

Que va-t-il se passer chez Delhaize ? Syndicats et direction sont dans l’impasse, un conciliateur social va intervenir.
Que va-t-il se passer chez Delhaize ? Syndicats et direction sont dans l’impasse, un conciliateur social va intervenir. © RTBF – C. Biourge

Le 7 mars dernier, la direction a annoncé sa volonté de franchiser les 128 magasins qu’elle gère directement et de transférer le personnel de ces magasins aux futurs franchisés. Depuis, elle a organisé les trois conseils d’entreprise prévus dans le cadre de la procédure légale d’information et de consultation. Le dernier de ces conseils d’entreprise s’est tenu ce mardi 28 mars et s’est soldé par un échec.

Le groupe Delhaize n’en démord pas. Il veut confier les 128 magasins qu’il détient à des franchisés, des indépendants.

En face, les syndicats continuent de dénoncer cette décision. Pour eux, Delhaize devrait conserver les 128 magasins en gestion propre. Le passage à une gestion sous franchise les refroidit car ils ont des craintes pour le maintien des acquis salariaux et sociaux des travailleurs. Les magasins gérés directement par Delhaize et les magasins franchisés relèvent en effet de deux commissions paritaires différentes.

Pour le moment, syndicats et direction ne prévoient plus de se voir avant le 24 avril prochain. Un conciliateur social va entrer dans la danse, mais parviendra-t-il à changer la trajectoire de ce dossier ?

Le point de vue des syndicats : explorer d’autres pistes que franchiser les 128 magasins Delhaize

À la sortie du dernier conseil d’entreprise de ce mardi 28 mars, les syndicats étaient autant en colère qu’à leur entrée. "En pratique, rien ne ressort de la réunion. C’est comme le lapin Duracell, on répète la même chose jusqu’à l’épuisement", résumait Myriam Delmée, Présidente du Setca. "On s’est fait donner une leçon par une direction qui ne veut rien entendre et qui reste juste sur son projet de franchise", poursuivait-elle.

C’est que les syndicats n’en démordent pas. Ils veulent discuter avec la direction d’autres pistes que celle qui consiste à franchiser les 128 magasins, sans succès jusqu’à présent. "Elle [la direction, ndlr] nous demande de faire des suggestions, elle nous demande de bien vouloir ouvrir des portes, mais quand on fait des suggestions en disant qu’il y a autre chose que la franchise, toutes les portes se referment instantanément", ajoutait Myriam Delmée.

Toujours à propos de la direction, "Eux considèrent avoir fait leur boulot en répondant soi-disant à nos questions, mais il n’y a plus aucune concertation, aucune négociation, aucune ouverture", expliquait de son côté Myriam Djegham, déléguée permanente à la CNE.

Pour rappel, les syndicats ont des craintes pour l’avenir des salariés de Delhaize une fois que les magasins dans lesquels ceux-ci travaillent auront été transférés à des indépendants franchisés. Les magasins intégrés et les magasins franchisés ne dépendant pas de la même convention collective, qu’en sera-t-il des acquis salariaux et sociaux ?

Le point de vue de la direction : pas d’autre solution que de franchiser les 128 magasins Delhaize

Le point de vue de la direction de Delhaize est assez simple à résumer : ce sera la mise sous franchise des 128 magasins que le groupe détient encore et rien d’autre.

Au terme des trois conseils d’entreprise qui se sont tenus depuis le 7 mars, la direction estime avoir fait le job en respectant la procédure légale d’information et de consultation. Pour elle, comme elle l’écrit dans le communiqué envoyé à l’issue de la réunion, cette consultation visait "à clarifier l’annonce du plan d’avenir en répondant aux questions et en fournissant toutes les informations nécessaires aux partenaires sociaux", ce que la direction estime avoir fait.

Et donc, du point de vue de la direction, les raisons de l’échec de ces conseils d’entreprise seraient à aller chercher du côté syndical. "Cependant, les partenaires sociaux ont à chaque fois quitté ces moments de dialogue social après une courte durée, malgré un ordre du jour qui prévoyait à chaque fois la possibilité de poser des questions supplémentaires et de faire des suggestions concernant le plan actuel. Toutes les questions soulevées jusqu’à présent ont reçu une réponse", écrit la direction dans son communiqué.

Toujours dans ce communiqué, la direction explique comprendre "l’émotion et les interrogations de ses collaborateurs", elle veut "rendre le dialogue social possible". Elle en appelle à un "médiateur social" [conciliateur social, ndlr] ce qui devrait permettre, selon elle, "de fournir toutes les informations complémentaires sur le plan d’avenir, de répondre à toutes les questions de nos partenaires sociaux et de nos collaborateurs et d’entamer la discussion sur les mesures d’accompagnement de ce plan". Elle parle donc bien du plan annoncé le 7 mars, de la mise sous franchise des magasins, et de rien d’autre, a priori.

Au sujet de ce plan, la direction de Delhaize se veut rassurante dans le communiqué envoyé ce mardi. " Le seul objectif de ce changement est de stimuler la croissance et donc la rentabilité de ces 128 supermarchés. Dans les supermarchés concernés, il n’y aura pas d’impact sur l’emploi, puisque tout le personnel sera transféré vers les nouveaux gérants indépendants, tout en maintenant les salaires et les conditions de travail", écrit la direction.

"Les employés de nos supermarchés indépendants seront protégés par un cadre juridique clair, à la fois pendant la transition et à l’avenir, de la même manière qu’ils le sont actuellement. Tous les employés concernés conserveront leur emploi et pourront poursuivre leur carrière dans les futurs magasins autonomes, en conservant leur salaire et leurs conditions de travail actuels sans limitation dans le temps", ajoute-t-elle.

Un conciliateur social va prendre le relais: pour quelle issue?

Delhaize : désignation d'un conciliateur social (C. Defoy, LP 28/03/28)

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Ayant constaté l’impasse dans laquelle elle se trouve après le dernier conseil d’entreprise de ce 28 mars, la direction a officiellement demandé au ministre de l’emploi de désigner un "médiateur social".

La réponse de Pierre-Yves Dermagne (PS), le ministre de l’Emploi n’a pas tardé. Dans un communiqué peu de temps après que la fin de la réunion entre syndicats et patrons de Delhaize, il constate que les parties "n’ont pas réussi (une fois de plus) à engager un véritable dialogue sur l’annonce faite par la direction le 7 mars" et qu’aucune autre concertation n’est prévue dans les prochaines semaines. "J’ai donc demandé au conciliateur social de prendre en charge le dossier et de réunir les parties pour une concertation", a communiqué le ministre.

La conciliation sociale est donc l’étape suivante. Lorsque les moyens de négociation entre une direction d’entreprise et les représentants syndicaux sont épuisés, il est fréquent qu’un conciliateur social entre en piste. C’est une sorte de démineur, de médiateur qui va tenter de rapprocher les points de vue des deux partiesIls sont quelques-uns à exercer cette fonction en Belgique au sein des différentes commissions paritaires et dépendent du SPF Emploi. Ils entrent en piste à la demande des parties ou, par exemple, sur proposition du ministre de l’Emploi.

L’issue d’une concertation sociale n’est pas garantie. Il faut évidemment que les points de vue soient conciliables, ce qui semble loin d’être le cas chez Delhaize pour le moment.

Les représentants des travailleurs s’interrogent en tout cas sur l’attitude de la direction de Delhaize après la désignation d’un conciliateur social, annoncée mardi par le ministre du Travail Pierre-Yves Dermagne. "La direction devra commencer à négocier alors qu’elle refuse de discuter depuis le début. On espère que l’arrivée d’un médiateur montrera à Delhaize que sa position est insoutenable", estime la Présidente du Setca, Myriam Delmée après cette annonce.

En attendant, les syndicats comptent continuer à mettre la pression sur Delhaize. Le mouvement de grève dans les magasins intégrés se poursuit.

Delhaize : échec des négociations entre patrons et syndicats (C. Biourge, LP 28/03/23)

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