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Qu’est-ce que l’effet papillon ?

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Par RTBF La Première/Pasquale Nardone

L’effet papillon est souvent utilisé comme métaphore de la vie quotidienne ou de l’Histoire. Mais savez-vous d’où vient cette expression 'l’effet papillon' ? Il s’agit en réalité d’une véritable théorie scientifique.

Edward Lorenz, un mathématicien qui travaille au Département de Météorologie du MIT – Massachusetts Institute of Technology, étudie des problèmes de prédictibilité, pour des prévisions météorologiques, grâce à des systèmes informatiques.

Le 1er mars 1963, il fait des modélisations du comportement de l’atmosphère. Il met au point un système de 3 petites équations très simples, non linéaires, c’est-à-dire sans relation simple entre cause et effet. Il cherche à déterminer le temps qu’il fera, il étudie la convection de l’air chaud vers l’atmosphère et la température à divers endroits.

A un certain moment, il rentre dans l’ordinateur un paramètre qui vaut 0,506. Il s’aperçoit tout à coup que le résultat est totalement différent de ce qu’il avait obtenu avant, lorsqu’il avait utilisé 0,5061.
Une simple petite décimale de différence donne un résultat radicalement différent.

Il publie alors un article à ce sujet dans le Journal des Sciences atmosphériques. Lors d’une conférence en 1972, l’un de ses collègues réagit en disant : "Si votre modèle est correct, cela signifie que le battement d’une aile de mouette modifie complètement l’atmosphère".

Edward Lorenz trouve l’idée judicieuse mais remplace la mouette par un papillon, plus poétique.


Le chaos déterministe

Edward Lorenz a effectivement montré que la solution est extrêmement sensible aux conditions initiales. Si vous rajoutez une petite décimale à la dixième décimale, le résultat produit par l’ordinateur sera tout à fait différent. On appelle cela le chaos déterministe. L’équation est bien déterministe, elle va bien prédire le futur, mais il y a une sensibilité aux conditions initiales : dès que vous ne connaissez pas, un tant soit peu, l’un des paramètres, le comportement explose et part complètement ailleurs.

Les physiciens ont découvert que cette caractéristique apparaît absolument partout. Dès qu’il y a une équation non linéaire, il y a très souvent automatiquement une solution chaotique. Certes, on peut calculer le futur, mais la prédiction est tellement sensible dans les conditions initiales qu’elle est en fait irréalisable. La mesure est trop approximative et la solution finale est totalement indéterminée.

C’est devenu un tel modèle que la notion de théorie du chaos est désormais enseignée dans toutes les universités. On est aussi revenu sur toutes les théories anciennes.

Le modèle le plus simple, par exemple, est dû au Belge Pierre-François Verhulst, qui a publié en 1838 une équation pour modéliser l’évolution de la population, aux tout débuts de la sociologie. Il étudie les naissances qui font augmenter la population et les décès qui la font diminuer. L’équation qu’il publie est extrêmement simple ; on s’aperçoit pourtant qu’elle est, elle aussi, chaotique.

Et on constate qu’il y a, en sciences, toute une flopée d’équations qui ont des comportements chaotiques. C’est devenu un domaine scientifique à part entière.


Déterminisme philosophique

Quand on utilise cette expression pour parler des actions humaines, c’est souvent dans le sens d’un certain déterminisme : si vous faites cela, les conséquences peuvent être immenses.

Philosophiquement, cette découverte a été aussi un choc, parce que cela veut dire qu’on est dans l’impossibilité, même si l’équation est déterministe, de déterminer l’avenir : on ne peut pas le calculer parce qu’il y a trop de sensibilité dans ses conditions.

"Il y a donc eu tout un débat sur l’irréversibilité, sur le pourquoi de la vie et de la mort, alors que toutes les lois de la physique sont réversibles au niveau temporel, c’est-à-dire que si vous changez le temps, vous revenez en quelque sorte dans votre passé. Or il est clair que personne ne sait faire ça", souligne Pasquale Nardone.

Comment la théorie du chaos peut-elle expliquer l’irréversibilité ? Comment peut-on, malgré cette théorie du chaos, voir quand même apparaître des structures, telles que les ruches d’abeilles, les termitières, le comportement animal ? C’est là un débat très intéressant entre des modèles déterministes et pourtant chaotiques et l’apparition de structures dans l’espace et dans le temps !

 

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