Le comité fait encore preuve d’innovation avec cette nomination. En effet, si Carrie Lam était la première femme à exercer une telle fonction, John Lee est le premier homme à ne pas être issu du monde des affaires ou de l’administration, mais bien du monde policier. Un message fort si l’on en croit le spécialiste de la Chine contemporaine, chercheur et chargé de cours à l’Uliège, Eric Florence. "Contrairement à Carrie Lam, il n’a pas l’expérience des grands administrateurs traditionnellement formés à Hong Kong", confie-t-il. "Il a essentiellement des contacts avec le milieu policier et a toujours été très inflexible sur les manifestations de 2019 et ensuite sur les mesures prises dans le cadre de la loi de la sécurité nationale de l’été 2020 ou encore dans le cadre de mesures ayant réduit considérablement les libertés publiques."
En soutenant John Lee et en adoptant la loi sur la sécurité nationale – à laquelle ni Lee, ni Lam ne se sont opposés, le gouvernement central de Pékin souhaite "renforcer la mainmise sur Hong Kong" et remet ainsi en cause plusieurs articles de la loi fondamentale selon laquelle aucune administration chinoise du continent ne pourra administrer Hong Kong, affirme Eric Florence. Hong Kong ne peut être géré que par des autorités hongkongaises. Or, de plus en plus de personnel de la sécurité administrative est directement recruté en Chine.
"Les tribunaux demeurent dans une certaine mesure encore un des derniers remparts, toutes les autres barrières ont été levées par la loi de sécurité nationale. L’arrivée de John Lee confirme donc le glissement de paradigme dans la façon de gérer Hong Kong. La sécurité prime sur le reste, une digue a sauté."
Des propos que confirme Chien-yu Shih, spécialiste des questions de sécurité chinoise à l’institut pour la Défense nationale de Taïwan. "Pékin a cherché à savoir quelle personnalité politique était prête à suivre son discours." Selon lui, les dirigeants chinois continuent de se méfier des fonctionnaires de Hong Kong.