Plus de 229 personnes se sont montrées intéressées à participer à la consultation citoyenne : 31 entretiens individuels ont été menés, et quatre tables rondes organisées, avec un taux de participation très élevé, organisées par l’équipe du professeur Jacques Teller.
Pour les habitants, la crue et la décrue ont toutes deux été très rapides, avec deux pics de montée des eaux rapportés. Les riverains soulignent également la violence de cette crue, son caractère torrentiel.
Beaucoup des riverains considéraient qu’ils n’étaient pas dans une zone de risque d’inondation. "Il y a deux manières d’estimer les risques : soit via la carte d’aléas d’inondation, soit par expérience directe. On a vu beaucoup de citoyens parler de leurs expériences de crues précédentes. Beaucoup d’entre eux se basaient sur cette expérience directe." Dans sa conclusion, le professeur Jacques Teller identifie deux types de citoyen : "des citoyens experts, qui vont s’informer activement, via le site Infocrue, les données météorologiques, et suivre la situation en continu ; et des citoyens profanes."
Certains citoyens, surtout les non-experts, sont les moins actifs et sont surtout informés par les médias. Ils ont vécu une tension, une dissonance importante parce que "d’une part, il y avait des prévisions météorologiques alarmantes, et un retard dans les niveaux de précipitation, surtout en aval du bassin."
"Très rapidement, les habitants vont dire que l’information des pouvoirs locaux a été insuffisante, pour différentes raisons. Ils constatent que les pouvoirs publics ont perdu le monopole de la diffusion de l’information. La conséquence, c’est que ces personnes continuent à se connecter sur les réseaux sociaux qui sont des amplificateurs de rumeurs. Dans beaucoup de communes, il n’y a plus d’informations des pouvoirs locaux officiels."
Point de bascule
Le moment important pour les riverains touchés a été celui où ils ont compris que ce ne serait pas une crue comme les autres. "Ils se rendent compte que ce qu’ils avaient mis en place sera insuffisant". Ce point de bascule intervient avant qu’il n’y ait des messages des autorités communales.
Dans l’expérience de la crue, il s’agit d’une crise de l’information. "Les services d’urgence sont complètement saturés, les riverains n’arrivent pas à les contacter. Et quand ils y arrivent, l’opérateur en ligne a moins d’informations qu’eux. Ça crée une tension extrêmement forte. L’absence d’information officielle va encourager la prise de risque par les citoyens, surtout dans cette situation où il y a eu deux pics de crue."
Ce qui a été fortement mis en avant par les citoyens, ce sont deux chocs : le choc négatif de la crue et de la constatation des dégâts, mais aussi un choc positif, avec la grande solidarité, et le rôle des réseaux sociaux pour structurer ces soutiens.
Burn-out administratif et sentiment d’abandon
Après l’épisode de crue, la période de crise continue, avec le stress lié à la reconstruction. "Beaucoup d’habitants parlent de la difficulté de trouver des informations au niveau des soutiens financiers et de la couverture des assurances." Le rapport évoque un "burn-out administratif".
En conclusion de cette consultation citoyenne, "la commune reste l’interlocuteur de premier niveau, mais les citoyens rapportent les limites de l’action publique. Il y a eu un sentiment d’abandon partagé par beaucoup."