A partir de 2020, le régime des allocations familiales sera établi en fonction de la Région dans laquelle vous vivez. Mais avant cette date charnière, des adaptations interviennent déjà en Wallonie dès ce 1er janvier 2019.
Caroline Tirmarche, responsable du service études de la Ligue des familles, était invitée sur La Première ce jeudi. "Chaque Région a décidé de son propre modèle, avec des modèles assez différents entre la Wallonie et Bruxelles, mais un point commun très important : c’est qu’au lieu d’avoir un montant qui est plus bas pour le premier enfant, un peu plus élevé pour le deuxième et puis encore un peu plus élevé à partir du troisième, actuellement on aura désormais un montant unique par enfant qui sera de 155 euros en Wallonie et de 140 euros dans un premier temps, puis 150 euros, à Bruxelles".
C'est un modèle qui soutient mieux les familles d’un et deux enfants
"C’est donc un modèle qui soutient mieux les familles d’un et deux enfants, qui sont les familles les plus fréquentes actuellement. Mais au-delà de ça, il y a des très grosses différences au niveau de la période de transition en Wallonie et à Bruxelles, c’est-à-dire qu’en Wallonie ce modèle s’appliquera aux enfants qui naîtront à partir de 2020, tandis qu’à Bruxelles toutes les familles, y compris les enfants déjà nés avant 2020, bénéficieront des nouveaux montants".
Est-ce qu’on peut dire que, in fine, les Régions vont quand même faire fonctionner des modèles à des vitesses différentes?
"Dans les modèles à terme, les logiques sont quand même très similaires. Il y a des petites différences de montants, des différences en fonction des situations, selon l’âge des enfants, la situation de familles monoparentales ou pas, mais la logique suivie est assez proche. La grosse différence, c’est vraiment pendant la période de transition, qui va durer longtemps, qui va durer 25 ans.
À Bruxelles, toutes les familles basculent dans le nouveau modèle, donc toutes les familles auront les nouveaux montants. Personne ne perdra, certaines familles, les familles d’un ou deux enfants, vont gagner de l’argent. En Wallonie, personne ne perd non plus, mais beaucoup de familles vont rester encore dans l’ancien modèle, qui a ses avantages et ses inconvénients, tandis que les nouvelles familles basculeront toutes dans le nouveau".
Pour les futurs parents, il faut désormais choisir une caisse d’allocations. Est-ce que vous pouvez un peu nous expliquer ce principe et ce qui distingue ces fameuses cinq caisses d’allocations ?
"Aujourd’hui, les parents ne choisissaient pas la caisse d’allocations familiales, elle dépendait généralement de la profession du père. La caisse était attribuée automatiquement aux parents. Pour les parents qui auront leur premier enfant en Wallonie à partir de 2019, ils pourront choisir leur caisse d’allocations familiales : la caisse publique FAMIWAL et quatre caisses privées, qui sont les caisses qui octroient les allocations familiales depuis des décennies avec succès.
Je pense donc qu’il n’y a vraiment pas à s’inquiéter à ce niveau-là, le système devrait fonctionner très bien. Puis, pour les parents qui ont des enfants déjà nés, eux doivent rester dans leur caisse d’allocations familiales actuelle et ils pourront en changer à partir de 2021".
Tous les faibles revenus auront droit à un supplément social en Wallonie à partir de maintenant
Quels sont les autres changements qui sont entrés en vigueur le 1er janvier en Wallonie ?
"Effectivement, le gros des réformes entre en vigueur en 2020, mais il y a déjà plusieurs changements importants dès ce mois-ci en Wallonie. Le premier concerne les suppléments sociaux, qui aujourd’hui étaient octroyés uniquement en fonction du statut professionnel des parents, donc pour les parents chômeurs, invalides, prépensionnés, ce qui excluait les parents qui travaillent et qui ont de faibles revenus. À partir de maintenant, tous les faibles revenus, c’est-à-dire les revenus en dessous de 30 984 euros bruts imposables par an très exactement pour le ménage, auront droit à un supplément social".
Il y a aussi beaucoup de changements en matière de majoration?
"Oui. Là, il y avait déjà de nombreuses majorations en fonction de la situation des familles et il y aura encore des changements avec les réformes tant en 2019 qu’en 2020. Un autre changement très important, c’est ce qui concerne les jeunes de 18 à 21 ans. Une simplification administrative, puisqu’aujourd’hui ils devaient faire des démarches pour prouver qu’ils étaient étudiants ou qu’ils étaient stagiaires pour continuer à toucher leurs allocations familiales, désormais ils les toucheront automatiquement. Voilà une mesure encore très positive pour les familles".
Il y a des situations un peu plus compliquées, par exemple les familles qui sont à cheval entre les deux modèles
Cette réforme des allocations a été vivement critiquée. Qu’en est-il aujourd’hui?
"Effectivement, on voit que la moitié des parents -46%, près de la moitié des parents- ont des craintes par rapport à cette réforme et ont peur de perdre de l’argent. C’est vraiment la première crainte mentionnée. À ce niveau-là, on peut tout à fait les rassurer. Pas une famille ne perdra un seul euro par rapport à ce qu’elle touche actuellement, donc il n’y a pas de souci à ce niveau-là.
Maintenant, c’est vrai qu’il y a des situations un peu plus compliquées, par exemple les familles qui sont à cheval entre les deux modèles, c’est-à-dire les familles qui auront des enfants avant la réforme et d’autres après la réforme. Je parle ici de la Wallonie. Ces familles-là n’auront pas les avantages du nouveau modèle, c’est-à-dire un montant plus élevé à partir du premier enfant, ni les avantages de l’ancien modèle, c’est-à-dire un montant plus élevé pour le deuxième, puis le troisième, le quatrième enfant, etc. Donc, on espère qu’il pourra y avoir encore un changement, on attend encore des mesures politiques en la matière.
Il reste un an avant la réforme, donc on espère que ça peut encore changer. On est très fortement interpellé à la Ligue des familles par rapport à ces situations-là. Ça coûtera évidemment de l’argent de solutionner cette question, mais on pense que c’est nécessaire pour que le modèle soit compris et accepté par l’ensemble des familles."
Ce changement de système était-il nécessaire?
"Oui, c’était nécessaire parce qu’on était dans un modèle nataliste, avec des allocations familiales plus élevées par enfant -plus on avait d’enfants, plus les allocations familiales étaient élevées par enfant- alors qu’aujourd’hui, la majorité des parents ont un ou deux enfants. On soutient donc beaucoup mieux ces familles-là, tout en donnant des suppléments aussi pour les familles nombreuses à bas revenus".