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Réforme des retraites en France : les syndicats dans la rue, le dialogue dans l’impasse

Les opposants à la réforme des retraites vont à nouveau manifester partout en France mardi, pour une dixième journée d’action à haut risque avec "nettement plus" de jeunes remontés contre un gouvernement inflexible, et un dispositif de sécurité "inédit".

L’épreuve de force se prolonge. Cinq jours après un regain de mobilisation, terni par de nombreux débordements, le mouvement social repart pour un tour.

Manifestation de lycéens contre la réforme des retraites, le 11 mars 2023 à Montpellier.
Manifestation contre la réforme des retraites à Rennes, le 22 mars 2023
Le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger (G) et celui de la CGT Philippe Martinez (C) lors d’une manifestation contre la réforme des retraites, le 23 mars 2023 à Paris

Grèves et blocages

La circulation des trains, perturbée depuis trois semaines, reste limitée avec trois TGV sur cinq et un TER sur deux en moyenne selon la SNCF. Difficultés également dans les transports parisiens, où la RATP a réduit le trafic sur la plupart des lignes de métro et de RER. Se déplacer en voiture n’est pas forcément plus simple, avec 15% des stations-service à court d’au moins un carburant, surtout dans l’Ouest et le Sud – conséquence de l’arrêt de cinq des sept raffineries du pays. Même à pied, il faut parfois se faufiler entre les déchets, notamment à Paris où 7300 tonnes d’ordures non ramassées jonchent encore les trottoirs. Dans l’enseignement primaire, 30% des professeurs seront en grève selon la FSU, principal syndicat.

Des désagréments assumés par les syndicats, à commencer par la CGT, dont le leader sortant, Philippe Martinez, a répété lundi que "l’objectif, c’est le retrait" de la réforme et qu'"il n’y a aucune raison de ne pas y croire". A la CFDT, Laurent Berger a dit attendre "un bougé très fort du gouvernement" sur la mesure phare du report de l’âge légal : "Il faut qu’il dise + les 64 ans ne s’appliqueront pas + ". Mais le porte-parole de l’exécutif, Olivier Véran, a aussitôt refermé la porte en affirmant que "la loi sur les retraites est derrière nous".

Un dialogue de sourds

À l’Élysée, où Emmanuel Macron a reçu lundi les cadres de la majorité et du gouvernement, le chef de l’État a pourtant dit vouloir "continuer à tendre la main aux forces syndicales", mais sur d’autres sujets, selon un participant. Le dialogue de sourds pourrait se poursuivre ainsi jusqu’à la décision du Conseil constitutionnel, attendue d’ici trois semaines. Au risque d’ajouter de la tension, quand la Première ministre, Élisabeth Borne, entend "mettre de l’apaisement".

Beaucoup s’inquiètent du "chaos" ambiant depuis l’usage du 49.3 pour faire adopter le projet de loi. Les heurts lors des dernières manifestations, puis les affrontements autour de la bassine de Sainte-Soline durant le week-end, attestent d’un climat délétère.

150 rassemblements prévus

Dans ce contexte, au moins 150 rassemblements sont prévus dans l’Hexagone pour la dixième journée de contestation. Surprises par l’ampleur de la mobilisation jeudi – 1,09 million de participants selon l’Intérieur, plus de 3 millions d’après les syndicats – les autorités tablent cette fois-ci sur un total de 650.000 à 900.000 manifestants, dont 70.000 à 100.000 à Paris.

Des foules encadrées par 13.000 policiers et gendarmes, dont 5500 dans la capitale, un "dispositif de sécurité inédit", a souligné lors d’une conférence de presse le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui a appelé "solennellement chacun et chacune au calme" et évoqué la présence possible à Paris de "plus de 1000 éléments radicaux".

Dans la capitale, le cortège reliera dans l’après-midi la place de la République à celle de la Nation. Accusées de violences par les manifestants, les forces de l’ordre s’apprêtent à faire face à "une présence des jeunes nettement plus importante", selon une source policière qui pronostique "un doublement, voire un triplement" de leur nombre par rapport aux précédentes mobilisations.

"Le 49.3 a rendu plein de gens 'déter' ", explique Gwenn Birrier, 20 ans, étudiant à SciencesPo Bordeaux qui participait lundi à une assemblée générale sur un campus occupé depuis plusieurs jours.

"Depuis l’adoption du 49.3, ça a fait boom dans les facs", confirme Marion Beauvalet, 26 ans, qui a bloqué son établissement de Paris-Dauphine lundi matin avec d’autres membres du syndicat l’Alternative. Des actions du même type devraient se multiplier mardi dans les universités et les lycées.

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