Sur base de ces constats, nos 3 économistes mettent une série de pistes de réformes sur la table, dont voici les principales :
Revoir la progressivité
"On paye trop vite de trop", dit Philippe Defeyt, et ses deux collègues acquiescent. Ils estiment que la pente de la progressivité de l’impôt est beaucoup trop raide au début. Pour Sabrina Scarna, "Ce n’est pas normal, qu’au-delà des 13.000 premiers euros gagnés, vous soyez déjà à un barème d’imposition de 40%. Il faudrait des tranches beaucoup plus grandes et beaucoup plus graduelles… et laisser les taux les plus élevés, aux plus hauts revenus".
Réformer la fiscalité des bas revenus
"On va donner un exemple très clair, dit Philippe Defeyt : une maman seule avec deux enfants, si elle a un petit salaire, n’a pas l’occasion d’activer toutes les réductions fiscales auxquelles elle a droit." Dès lors, les 3 experts consultés proposent par exemple de transformer, pour les plus bas revenus, les réductions fiscales en crédits d’impôts immédiatement et intégralement remboursables.
Cela signifie que si une personne ne paye pas assez d’impôts sur le revenu pour pouvoir en retrancher toutes les réductions auxquelles elle a droit, l’administration fiscale devrait lui rembourser quand même la totalité des montants de réduction.
Améliorer la lisibilité
"Ce n’est quand même pas normal que sur la feuille d’impôt que l’on reçoit… on ne voit que des codes" dit Etienne de Callataÿ. Pour nos 3 experts, il conviendrait que chaque année le contribuable reçoive une feuille d’impôt qui lui explique clairement ce qu’il paye comme impôt, ce à quoi il va servir, comment il est calculé… Ils proposent également que l’administration fiscale mette en place un point de contact facile d’accès pour poser des questions ou contester. Pour Philippe Defeyt "tout est dans tout… Je pense aussi et surtout que si on avait un système fiscal plus simple, il serait plus lisible".
Harmoniser les revenus de la propriété
Dans cet exercice de réforme fiscale au départ d’une page blanche, les 3 experts sont d’accord pour taxer au même taux, tous les revenus de la propriété : actions, obligations, biens immobiliers. "Avec un taux clair, net et perçu immédiatement… rien que ça pourrait payer un véritable tax shift et un véritable allègement de l’impôt sur le revenu", précise Philippe Defeyt.
Faire le ménage dans les niches
Sur l’impôt des sociétés, nos trois experts convergent pour estimer que l’enjeu n’est pas que belge, il faudrait harmoniser l’impôt au niveau européen pour éviter la concurrence fiscale entre les états et endiguer la "course vers le bas" qui finit par grever les recettes de tous les États.
Pour l’aspect belge des choses, ils proposent de supprimer ou limiter très fortement toutes les niches fiscales actuelles. "Je préfère un impôt des sociétés plus bas qu’aujourd’hui, mais que tout le monde paie… plutôt qu’un impôt de 25% avec une base taxable dans laquelle il y a plein de trous", explique encore Philippe Defeyt.
Taxer le carbone
Etienne de Callataÿ, Sabrina Scarna et Philippe Defeyt s’accordent sur l’idée d’une taxe environnementale visant à pénaliser les comportements les plus polluants. "On propose une fiscalité où tout comportement polluant est taxé de manière proportionnelle et où les recettes vont dans un pot commun qui est redistribué équitablement entre tous les citoyens", explique Etienne de Callataÿ.
L’idée donc que si vous polluez beaucoup, vous serez fortement pénalisés et si vous arrivez à adopter des comportements qui polluent très peu, vous pourriez même y gagner. Un mécanisme qui serait assorti d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE pour éviter que nous augmentions notre empreinte carbone via l’importation de produits fabriqués de manière polluante à l’extérieur de nos frontières.
Ceci est un aperçu résumé, vous trouverez bien plus de détails et d’explication dans le Podcast " Déclic – Le Tournant " de cette semaine.
Une révolution fiscale détaillée en 42 minutes de journalisme constructif.