Guerre en Ukraine

Réfugiés ukrainiens en Belgique : loin des bombes, ils espèrent revenir un jour à une vie normale en Ukraine

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Par Jean-François Herbecq avec E. Destiné

Huit mois après le début de la guerre en Ukraine, près de 60.000 réfugiés ont reçu une protection temporaire dans notre pays, selon l’Office des Étrangers. Un asile qui reste très difficile à vivre pour ces personnes, essentiellement des femmes et des enfants, souvent coupées de leur famille.

En province de Namur, Françoise et Yves ont décidé après le début de l’offensive russe, de fédérer un élan de solidarité pour l’accueil des Ukrainiens. Ils récoltent les dons d’une soixantaine de personnes pour louer des logements pour des Ukrainiens. Ils ont décidé de le faire dans le village de Bièvre.

Une quinzaine d’Ukrainiens, principalement des femmes et des enfants, sont logés dans deux appartements et deux petites maisons. Beaucoup d’enfants sont scolarisés dans la région.

Malgré la chaleur de l’accueil, elles subissent tous les jours la guerre à distance, alors que les offensives se succèdent. Joindre leur proche est leur combat. Leur seul rêve est de rentrer en Ukraine.

Le bruit de bombes au téléphone

Svitlana est originaire de la région de Kiev. Elle habite un de ces appartements. Elle est en Belgique avec deux de ses fils : Vova, 9 ans et Djena, 16 ans. Ils vont à l’école en Belgique. Elle est pendue aux nouvelles qui viennent d’Ukraine : "Quand je dors, je regarde encore les informations. Dès que je me lève à 5 heures du matin, je regarde encore les informations. Je regarde toujours ce qui se passe chez nous en Ukraine."
 

Svitlana de la région de Kiev
Svitlana de la région de Kiev © RTBF

"Quand je parle avec mon mari, j’entends des bombardements dans le téléphone, pendant notre appel. Il y a deux jours, on a parlé. Il était sur le balcon. Et un missile a été intercepté. A ce moment-là j’ai eu peur car mon fils aîné est toujours en Ukraine. Il est bénévole et il aide les autres comme il peut. Alors j’ai peur pour eux. J’ai peur pour ma famille. Et j’ai peur pour l’Ukraine".

Un mari prisonnier

Svitlana a encore des contacts avec sa famille restée en Ukraine, mais ce n’est pas le cas de sa voisine de palier Holena qui vient de Marioupol. Elle est sans nouvelles directes de son mari, prisonnier des Russes : "Je n’ai eu aucune nouvelle de lui directement. J’ai reçu un message qui a été transmis par la station de coordination militaire. Il y avait deux lettres de lui dans lesquelles il écrivait que tout allait bien et qu’il était vivant, qu’il priait et qu’il espérait que tout allait bien pour nous… J’espère beaucoup. Je prie chaque jour pour que mon mari revienne le plus vite possible. Il nous manque. Nous l’attendons."

Holena de Marioupol
Holena de Marioupol © RTBF

"C’est très difficile. Surtout moralement. Même si beaucoup de personnes nous aident en Belgique. Moralement c’est très difficile. […] Je sais que mon mari est vivant. Parce que plusieurs autres militaires me l’ont dit. Avant le moment où il a été fait prisonnier par la Russie, ils l’ont vu vivant. Il n’était pas blessé. C’est pour cela que j’espère que la Russie n’est pas si agressive."

Des enfants de la guerre

Holena a quitté Marioupol en mars après le bombardement du théâtre de la ville. Elle est en Belgique avec son fils de 5 ans, Danylo ainsi qu’avec sa mère. Ils vivent à trois dans l’appartement : "Je voulais que mon enfant soit en sécurité. En plus, ce qu’on a vu à Marioupol, c’était absolument terrifiant. Là-bas, l’armée russe a visé spécialement les populations civiles. Et quand a quitté Marioupol pour arriver à Dnipro. Nos amis nous ont proposé de venir en Belgique."

Le reste de la famille est toujours à Marioupol et le seul moyen de communiquer est les SMS ou les réseaux sociaux car les téléphones ne fonctionnent quasiment pas.

Julia est veuve, elle vient de Mikolaïv. Elle habite dans une des petites maisons louées. "Dans mon quartier, il y a un dépôt de munitions près de chez moi, à la même station de bus. Nous sommes partis le 9 mars, quand il y avait des bombardements sur ce dépôt de munition près de chez moi. Nous pouvions bien entendre cela."

Julia de Mikolaïv
Julia de Mikolaïv © RTBF

"J’ai trois enfants, j’ai encore un fils de 18 ans. Pendant les premiers jours, on a préféré descendre à la cave. On était stressés, énervés, car chaque jour il y avait des bombardements sur Mikolaïv. On a décidé de partir car ma cousine habitant en Belgique, à Libramont. C’est elle qui m’a appelé pour me dire que je devais quitter l’Ukraine en Europe."

"Mon mari est mort en 2014. Dans une zone où avaient lieu des opérations antiterroristes. Et ma sœur m’a dit que je devais partir. Alors nous sommes partis vers Odessa et puis vers l’Allemagne, tout seuls sans voiture."

Mon grand rêve, c’est voir la fin de ce qui se passe pour l’instant. Et qu’on puisse revenir chez nous

"Je ressens de la douleur, de la tristesse par rapport à ce qui se passe maintenant en Ukraine. J’ai grandi là-bas, je suis Ukrainienne. […] Cela fait six mois que je suis en Belgique et je regarde les nouvelles chaque soir. Et j’y pense beaucoup. Je prie Dieu pour que tout se passe bien et que tout cela se termine. Pour que ma ville de Mikolaïv soit épargnée. Pour que tout dans la ville reste intact, même mon appartement. Et tout le reste. Pour qu’on puisse enfin revenir."

"Ici nous sommes en sécurité, ici tout va bien. Ici je communique avec ma cousine et avec trois autres familles ukrainiennes qui habitent dans ce village. Victoria va à l’école, elle aime bien cela. Dans sa classe, il y a une autre fille qui vient aussi d’Ukraine. Ma plus petite fille a un an et demi. Elle va bientôt aller à l’école primaire. Mon fils fait ses études en ligne à l’université. Moi, je garde mes enfants, je cuisine pour eux, tout se passe bien."

"Mon grand rêve, c’est voir la fin de ce qui se passe pour l’instant. Et qu’on puisse revenir chez nous. C’est mon plus grand rêve. Et arrêter de lancer des roquettes sur les villes."

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