Christian Jade : Quel est votre rapport historique au Rideau ?
Cathy Min Jung : Je suis sensible et à la formidable équipe en place et à la tradition de Claude Etienne, orientée vers le théâtre de texte, l’écriture dramatique. J’ai à la fois un grand respect pour cet héritage et le désir d’y apporter des nuances, l’agrandir. Le Rideau doit davantage s’ancrer dans son territoire, son quartier, l’espace public et revaloriser tout ce qui est mission de service public du théâtre.
Vous écrivez qu’il faut élargir le public et représenter la diversité sur scène et dans la salle. Comment allez-vous faire ?
On est à un carrefour entre plusieurs communautés, Matonge, la rue Malibran et les Communautés européennes. Je n’ai pas de recette magique et il va falloir chercher. Quant à la diversité, on ne l’invente pas, on ne la construit pas, elle existe, qu’elle soit sociale, ethnique, culturelle… Il faudra mettre en place des évènements festifs fédérateurs qui donnent au plus grand nombre possible l’envie de partager un moment avec d’autres sensibilités.
Il est question dans votre projet d’un "collectif associé". Des artistes issus de cette diversité y figurent-ils ?
Ma vision "artistes" pour le Rideau a deux axes principaux. D’un côté, il y a les "artistes du cercle mouvant", qui fréquenteront la maison au gré de leurs productions et qui changeront de saison en saison. Par ailleurs, il y a un groupe d’artistes, mais aussi de penseurs, de critiques, de philosophes dont j’ai envie de m’entourer pour discuter une fois par trimestre, avec l’équipe du Rideau et moi-même, des grandes orientations de la maison et questionner le sens même du théâtre dans la société d’aujourd’hui.
On peut avoir des noms ?
Bien sûr : Nancy Delhalle, Jessica Gazon, David Murgia, Etienne Minungu, Bwanga Pilipili, Laurence Vielle, Ilyas Mettioui, Petra Van Brabandt… J’aimerais impliquer ce "collectif associé" dans des activités de médiation et d’élargissement des publics. J’aimerais par exemple proposer à Laurence Vielle d’aller à la rencontre des habitants du quartier pour recueillir leurs paroles et en tirer un portrait poétique. J’imagine aussi un projet de quartier participatif que je dirigerais pour aller à la rencontre des voisins, pourquoi pas en collaboration avec le CPAS d’Ixelles et qui déboucherait sur un spectacle à part entière.
La notion classique d’"artiste associé" n’existe pas dans votre programme ?
Je n’ai pas prévu d’"artiste associé " au sens classique mais le "collectif associé" en est la matrice. En son sein, il y a des créatrices et créateurs dont les projets pourront être accompagnés par le Rideau de Bruxelles.
Comment retrouver du public dans l’immédiat pour 2020-21 ?
Il faut diffuser cette saison 22020-21 imaginée par Michael Delaunoy en ne se focalisant pas uniquement sur le nombre de spectateurs présents. Les artistes doivent continuer à travailler, même si les représentations sont perturbées. On est tous traumatisés, il faut accompagner tout le monde, artistes et public. Les réponses à ces questions doivent se construire avec l’équipe.