Diables Rouges

Rétro football 2022 : l'année de trop pour les Diables Rouges ?

Diables Rouges : Martinez et De Bruyne

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Pour nos Diables rouges, l’année 2022 se referme sur : une humiliante élimination en phase de groupe de Coupe du Monde, le départ tête basse du sélectionneur Roberto Martinez et la retraite internationale sans gloire ni adieux d’Eden Hazard. Comme un triple constat d’échec pour cette fameuse "Génération dorée". Comme si 2022 était l’année de trop.

En guise de bilan (non exhaustif bien sûr) voici 10 affirmations, à démentir ou confirmer.

1. Les résultats de 2022 sont décevants, voire inquiétants : VRAI

Bien sûr, des dizaines de nations auraient signé des deux mains pour forger les mêmes résultats que la Belgique. Mais quand on est N2 mondial (après avoir été N1 durant plus de trois ans) et qu’on compte dans ses rangs tant de joueurs (jadis ?) considérés comme excellents, on doit regretter les prestations de l’année écoulée.

En Ligue des Nations, dans un groupe avec la Pologne, le Pays-de-Galles et les Pays-Bas, nos Diables signent un insuffisant 10/18, perdant 2 unités chez les amis de Gareth Bale, et 6 face aux Oranjes de Louis Van Gaal (dont un regrettable 1-4 à Bruxelles). Or la Ligue des Nations était devenue le dernier (et le moins prestigieux) trophée accessible à cette génération.

En Coupe du Monde, avec 4 points sur 9, les médaillés de bronze en titre (2018) sortent dès la phase de groupe, un résultat aussi décevant que celui de 1998. Et dire que le sélectionneur et certains joueurs prétendaient qu'on y allait pour la remporter ?!

 

2. La Coupe du Monde est un échec cuisant : VRAI

Et elle l’est à plus d’un titre, hélas !

Du côté des résultats d’abord : on a beau savoir aujourd’hui que deux de nos trois adversaires (la Croatie et le Maroc) sont allés jusqu’en 1/2 finale, il fallait sortir de ce groupe. Quand on sait que notre seule victoire (1-0 contre le Canada) est un véritable hold-up, et qu’en 3 matchs notre équipe n’a inscrit qu’un malheureux petit but (certes joli, par Batshuayi), cela dit beaucoup.

Mais c’est aussi dans la manière que les Diables ont déçu. Sans relief, sans flamboyance, sans génie, sans coups d’éclat individuel ou collectif. Le match de préparation contre l’Egypte, au Koweït, avait donné le ton. Ou plutôt le goût. Celui de "trop peu".

Trop peu d’implication, de fraîcheur et de niaque, que l’on a bien voulu attribuer à un manque de préparation, vu les contraintes temporelles de cette CM. En cours de tournoi, Roberto Martinez a regretté "un manque de plaisir ainsi qu’une certaine peur de perdre" ou de gagner, on ne sait plus trop.

C’était peut-être trop peu de qualité finalement ?

On attendait monts et merveilles du Maestro de Manchester City, mais King Kevin a déçu, paraissant tantôt fâché, tantôt triste, toujours en dessous du niveau dont on le sait capable.

Il y a eu des tensions et des amertumes dans le groupe (même si certains médias ont très largement exagéré la réalité). Le clash entre Toby Alderweireld et Kevin De Bruyne lors du premier match (Canada), les déclarations de KDB et d’Eden Hazard sur l’âge et la vitesse de nos défenseurs, mal vécues par Jan Vertonghen en tout cas, la frustration de l’un ou l’autre jeune loup de ne pas recevoir de temps de jeu, ont rendu l’ambiance moins harmonieuse. L’attitude assez critique des médias (parfois contestable dans le chef de certains) et de l’opinion publique belge a contribué à noircir le tableau et à créer de l’amertume.

Roberto Martinez a parfois semblé "s’emmêler les pinceaux" dans certains de ses choix.

Et au moment où Romelu Lukaku recevait enfin le feu vert médical pour monter au créneau, dans le match décisif contre la Croatie, notre attaquant vedette a vendangé 2 ou 3 occasions en or.

Et dire que le sélectionneur et certains joueurs prétendaient qu'on allait à la CM pour la remporter ?!

3. Le mauvais bilan 2022 et l’échec au Qatar sont une surprise : FAUX

Dans la foulée de la troisième place en CM 2018 et avant l’Euro 2021, les Diables ont rentré une copie quasi parfaite (19 victoires, 2 nuls, 2 défaites), seulement ternie par cet improbable revers en Suisse (5-2, après avoir mené 0-2), qui leur barrait l’accès à une phase finale de Ligue des Nations dont la victoire leur semblait promise dans la foulée de la brillante campagne de Russie.

L’Euro a montré les limites des N1 mondiaux. Trois victoires en phase de groupe (Russie, Danemark et Finlande), puis une qualification "aux forceps" contre le Portugal de Cristiano Ronaldo, et une élimination logique en quart contre l’Italie, victorieuse en finale.

Dans ce tournoi, trois des cadres importants : Eden Hazard, Axel Witsel et Kevin De Bruyne, revenaient de blessure et jouaient en dessous de leur niveau optimum. La dépendance de l'équipe à ses vedettes est apparue, douloureusement.

Trois mois plus tard, les deux défaites en phase finale de la Ligue des Nations (2-3 contre la France en menant 2-0 à la mi-temps) et 1-2 contre l’Italie) confirmaient le creux de vague que traversait l’esquif noir-jaune-rouge. Et pourtant là, l’effectif était au complet.

Après, il y a eu cet inhabituel bilan de 10/18 et la non-qualification pour la phase finale de la Ligue des Nations 2022.

L’échec récent en CM n’est donc pas vraiment une surprise.

4. C’est la fin de la fameuse "Génération dorée" : VRAI

Une page se tourne, comme on dit. C’est même un chapitre entier de la longue histoire du football belge. Les brillants auteurs des plus belles lignes de cette partie d’histoire ont pour noms Vincent Kompany, Thomas Vermaelen, Marouane Fellaini, Mousa Dembélé, Nacer Chadli, et (peut-être) Radja Nainggolan. Ils ne sont plus là. D’autres comme Eden Hazard, Jan Vertonghen, Toby Alderweireld, Axel Witsel, Dries Mertens, Thomas Meunier et Romelu Lukaku ont leurs meilleures années derrière eux ou tardent à retrouver leur niveau. De cette "Génération en or", finalement, seuls Thibaut Courtois et Kevin De Bruyne continuent à partager la table des plus grands (KDB 3e au Ballon d’Or, Courtois élu Meilleur gardien planétaire).

Voici les clubs auxquels appartenaient les cadres de 2018.

Courtois : Chelsea. Alderweireld et Vertonghen : Tottenham. Kompany et De Bruyne : Manchester City. Chadli : WBA. Witsel : Tianjin. Meunier : PSG. Fellaini et Lukaku : Manchester United.

Aujourd’hui, une partie du 11 aligné se limite (pour le moment) à des clubs tels l’Antwerp, Anderlecht, Bruges, Leicester, Aston Villa, Everton, Brighton, Lens ou Rennes. Ce n’est pas la même chose.

5. Cette Génération dorée n’a rien gagné : FAUX

Quelques chiffres ou références historiques parlent d’eux-mêmes :

- Le meilleur résultat en CM datait de 1986, avec une 4e place au Mexique. La médaille de bronze de 2018 est donc historique, et unique.

- En 2007 la Belgique occupait un triste 71e rang mondial. En 2012: le 54e, moment où Marc Wilmots a pris en mains la destinée de cette génération qui avait accroché une prometteuse 1/2 finale aux JO de Pékin 2008. Entre 2018 et 2022, durant plus de trois ans donc, notre petit pays a trusté la 1re place du classement FIFA, ce n’est pas rien, même si cela ne veut pas tout dire !

- Avant la "bande à Kompany", les Diables avaient manqué 3 Euro (2004, 2008, 2012) et 2 CM (2006 et 2010). Une longue traversée du désert. Depuis "Vince The Prince", ils se sont qualifiés pour 5 tournois majeurs consécutifs, en y accrochant 3 quarts de finale et une demie. Pas mal, pour un pays de 11 millions d'habitants.

Et je ne parle pas de l’enthousiasme, de la fierté, du plaisir et des vocations suscitées en Belgique. Et de l’envie voire de la jalousie provoquées chez nos voisins.

Petits rappels concernant le palmarès en CM: 8 nations seulement se partagent les 22 titres décrochés. Les Pays-Bas, avec des générations au moins aussi dorées que la nôtre, n'ont remporté aucune des trois finales auxquelles ils ont participé. 

6. 2022 a laissé de nombreux joueurs sur le carreau : VRAI

Dedrick Boyata, Jason Denayer, Adnan Januzaj, Christian Benteke, Divok Origi, Brandon Mechele et autre Nacer Chadli rêvaient sans doute du vol pour Doha et ont dû se résigner. Chez les jeunes, c’est la même déception teintée d’inquiétude pour les Albert Sambi Lokonga, Dodi Lukebakio, Yari Verschaeren ou encore Dante Vanzeir.

7. Roberto Martinez n’a pas préparé la relève : FAUX

Dès 2018, il emmène dans ses bagages russes Leander Dendoncker (23 ans), Adnan Januzaj (23), et Youri Tielemans (21) qui constituera une des révélations du tournoi.

En 2021, l’Euro permet à Jérémy Doku de s’illustrer en 1/4 contre le futur vainqueur italien.

Et pour le Mondial au Qatar, le sélectionneur ajoute Arthur Theate (22), Zeno Debast (19), Wout Faes (24), Charles De Ketelaere (21), Loïs Openda (22) et Amadou Onana (21). Et on sait que ce dernier a convaincu lors de ses prestations à Doha, au point d'être considéré comme LE grand absent du 3e et dernier match de poule (il était suspendu).

Et la liste des jeunes que Martinez a invités en stage ou sélectionnés pour l’un ou l’autre match est bien plus longue, incluant notamment Zinho Vanheusden, Orel Mangala, Sebastiaan Bornauw, Hannes Delcroix ou Jari Vershaeren.

Mais c’est aussi en tant que Directeur Technique que Roberto Martinez a préparé l’avenir. Il a restructuré toute la filière de détection des talents dans les clubs ainsi que la formation dans les équipes d’âge, et collaboré étroitement avec les U21 de Jacky Matthijssen. Par rapport à la politique des jeunes, son travail à la Fédération est unanimement salué.

8. La relève tarde à reprendre le flambeau : VRAI

Un exemple : Youri Tielemans. Présenté, à raison, comme la révélation du noyau belge à la CM en Russie il y a quatre ans, l’ancien monégasque n’est pas devenu le cadre incontournable qu’on attendait en milieu de terrain.

Autre exemple : Jérémy Doku. Lui aussi tellement prometteur lors de l’Euro 2021, présenté comme le possible successeur d’Eden Hazard à son poste, il a enchaîné les contretemps depuis. Que ce soit pour des blessures, pour un manque de temps de jeu en club, ou pour toute autre raison, plusieurs anciens "grands espoirs du football belge" ne répondent pas (encore) à l’attente. Par exemple : Albert Sambi Lokonga (23), Hannes Delcroix (23), Zinho Vanheusden (23), Yari Verschaeren (21), Léander Dendoncker (27), Alexis Saelemaekers (23), Orel Mangala (24), Charles De Ketelaere (21), ou encore Jason Denayer (27), présenté jadis comme le futur "Vincent Kompany".

Bien sûr, pour certains d’entre eux, on pourra reprocher à Roberto Martinez de ne pas leur avoir donné assez de temps de jeu ou même les clés de l’équipe nationale. 

Le blé qui lève promet une belle récolte, plusieurs de ses épis ont trouvé en 2022 une terre fertile, propice à leur éclosion: Onana à Everton, Faes à Leicester, Theate à Rennes, Openda à Lens, CDK au Milan AC, etc. Mais la moisson est pour plus tard, et il est possible que le pain n'ait plus la même saveur avant longtemps.

9. Le départ de Roberto Martinez est une bonne chose : VRAI

En tout cas il faut l’espérer ? !

Je l’avoue, je suis plutôt fan du Catalan, pour différentes raisons, et je suis de ceux qui pensent que la Belgique lui doit beaucoup. L’attachement des Diables à leur sélectionneur, malgré l’échec récent, est d’ailleurs un bon indicateur. Je pense aussi que sa responsabilité dans les revers de 2022 est faible, d’autres facteurs les expliquent.

MAIS…

Suite à la déroute de Doha, la déflagration dans le ciel du football belge est telle qu’il faut du changement. Il faut un nouvel Amiral à la barre de l’embarcation qui tangue.

Ensuite, comme une page doit se tourner entre les anciens et les nouveaux, le successeur de Martinez sera moins attaché ("lié", diront certains) aux cadres historiques. Il repartira d’une feuille blanche et redonnera sa chance à chacun.

Mais soyons certains que le candidat idéal ne se trouvera pas sur claquement de doigts.

10. La retraite internationale d’Eden Hazard, c’est du gâchis : VRAI

Attention, pas question de juger la décision d’Eden, elle  n'appartient qu'à lui (et à sa famille). Je ne dis pas non plus qu’il était encore et toujours un titulaire incontournable, vu son niveau de jeu insatisfaisant.

MAIS…

C'était peut-être trop tôt pour décider et annoncer sa retraite. S’il continue, dans les mois qui viennent, à remonter la pente, il pourrait encore s’avérer précieux, tant son talent est grand. Et il n’aura que 32 ans.

L’annonce de la fin de l'aventure, quelques heures seulement après l’élimination de la Belgique puis l’annonce du départ de Martinez, est vécue comme le coup de grâce. Elle est si symbolique ! S’il y avait encore un doute sur le fait que 2022 était une année pourrie pour le football belge, le retrait de notre N.10 le dissipe définitivement.

Enfin, justement, les adieux-sans-adieux du capitaine sont tristes à pleurer. Quand on est un des meilleurs joueurs belges de tous les temps, quand on est à ce point apprécié par ses équipiers, ses coachs, le public et les journalistes, quand jusqu’au bout, malgré les trois dernières années de souffrance, de doutes et d’humiliation, on a continué à tout faire, à tout donner pour y croire encore et essayer de porter l’équipe, eh bien on a droit, en guise de cadeau de départ, à autre chose que quelques réactions sur les réseaux sociaux suite à un message posté sur un smartphone.

Du gâchis, je disais.

Il sera toujours temps de réparer la casse.

En attendant, mille mercis, Eden, et peut-être...à 2023 ?

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