Le mug

Richard Gotainer : "Un gros mot bien juteux pour fleurir une histoire"

Par La Première via

Gotainer, c’est la liberté des années 80. Les déjantés Primitif, Le Sampa, Le Youki, La Ballade de l’obsédé, Le Mambo du décalco, Femmes à lunettes... Tous ces titres et bien d’autres ont animé les postes de radio, et déhanché bien des bassins. Sur les rythmes entêtants composés par Claude Engel, Richard Gotainer a décliné des paroles loufoques, souvent provocatrices, rythmées par des allitérations.

Son talent pour les mots s’est aussi appliqué à une série de pubs inoubliables. Pour une marque d’eau minérale, son 'Buvez, E-li-mi-nez' est implacable. Plus fleur bleue, il envoie 'baguenauder dans les pâturages' une belle campagnarde, de quoi en faire tout un fromage.

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Richard Gotainer

Ces petits bijoux sont le fruit d'inspiration, et de talents conjugués. Gotainer a travaillé pendant des décennies avec Claude Engel à la partie musique, rencontré durant l'enregistrement de la publicité 'Banga' en 1978. 

"Quand on rentre en studio, qu’on commence à s’atteler à un morceau, on ne sait pas très bien où l’on va. Moi j’arrive avec un texte, le musicien arrive avec une composition, on tâtonne ensemble. Quelque fois, il nous est arrivé de jeter le truc et de recommencer à zéro parce que cela ne nous plaisait pas. Le Youki par exemple, j’ai présenté trois fois un texte à Claude, qui me disait : 'J’y arrive pas. C’est pas structuré'. Moi j’avais un sketch. Mais on s'est dit qu’on va en faire une chanson parce que l’idée est bonne, et qu’on était sûrs d’en faire quelque chose. Je m’y suis repris à trois fois, parce que c’était moi qui n’étais pas bon ! Et puis ça a donné ce que vous connaissez."

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Richard Gotainer se consacre à une nouvelle forme de spectacle. Il explique pour Le Mug le processus qui est né d’un accident. En 2018, lors de la réception d’un prix, Gotainer n’a rien préparé comme discours. Il improvise une version déclamée d’un de ses textes issus de son dernier album Saperlipopette.

"Je suis devant un parterre d’auteurs et de compositeurs, à la SACEM (l’équivalent de la Sabam en Belgique) et... je fais un tabac ! Arrive la Covid. C’est long, coincé à la maison. Je me dis: et si je reprenais cette idée ? J’ai fait 5-6 textes comme ça, derrière mon bureau, avec une webcam pourrie. Et en fait, on s’est fait des millions de vues ! Ça m’a encouragé à penser mieux ce spectacle. Mais réciter sur une scène, dans un col roulé noir, sur un tabouret noir, sur un fond noir, ce n’était pas mon style. Donc ce que j’ai fait, j’y ai ajouté de la musique."

Connaissant le grain de folie de Gotainer, le résultat va prendre une autre tournure. La guitare de Brice Delage qui l’accompagne ne va pas s’en tenir à une gentille mélodie de soutien, elle produit des bruitages, des sons, elle ponctue. Quant à Gotainer, il ne chante pas, il ne déclame pas ses textes, il les joue. Un résultat unique de chansons parlées. Ses textes au contenu explicite, dans la lignée de Brassens et Pierre Perret, sont livrés sur scène sans artifices au public. 

Quoi de plus savoureux, de plus jubilatoire
Qu'un gros mot bien juteux pour fleurir une histoire
D'une couille bien placée
D'un trou de balle bien senti
Et la phrase étriquée
Se transmute en saillie

'Saperlipopette', 2018 

"Il y a des textes qui n’ont aucun intérêt à être joués dans mon spectacle. 'Le mambo du décalco', je n’ai pas trouvé de manière formidable de l’adapter parce qu’il a besoin de la musique. Quand il y a un peu de violence dans un mot, un contenu un peu subversif, ça apparait beaucoup plus. Par exemple, le texte ‘A poil’ devient hirsute. Avec un texte un peu trapu, la musique va arrondir les angles."

A 74 ans, Richard Gotainer ne s'assagit décidément pas, que du contraire.

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