La justice russe examine jeudi une demande de dissolution du Centre de défense des droits humains de l’ONG Mémorial, pilier de la société civile et dernière cible d’une campagne visant les voix critiques du Kremlin.
Le procès s’est ouvert au tribunal de la ville de Moscou et se penche sur les conclusions du Parquet qui considère que la branche de Mémorial chargée des droits humains s’est rendue coupable d’apologie de "l’extrémisme et du terrorisme" avec la publication d’une liste de prisonniers comptant les noms de membres de groupes religieux ou politiques interdits en Russie.
Il l’accuse aussi d’avoir violé les obligations découlant de son statut "d’agent de l’étranger", label réservé aux organisations considérées comme œuvrant contre les intérêts russes avec des financements étrangers.
Un climat de répression croissante
Ces poursuites s’inscrivent dans un climat de répression croissante visant ceux perçus comme des adversaires du Kremlin, qu’il s’agisse d’ONG, de médias indépendants ou du mouvement de l’opposant emprisonné Alexeï Navalny, interdit en juin pour "extrémisme".
Les journalistes peuvent suivre les débats par visioconférence dans une salle du tribunal, qui avait indiqué dans un premier temps que ce ne serait pas possible à cause de restrictions sanitaires, avant de se raviser.
Le public ne peut lui pas assister à l’audience. Par un temps glacial, frisant les -15 °C degrés Celsius, une trentaine de personnes, principalement des jeunes, se sont rassemblées autour du tribunal en soutien à l’ONG.
Santé psychologique
Lors de l’audience, un procureur a assuré que le Centre pour les droits humains de Mémorial n’avait pas indiqué son statut "d’agent de l’étranger" dans toutes ses publications, ce qui peut mettre en péril "la santé psychologique" des Russes.
"Le site (du Centre de Mémorial) contient des informations justifiant le terrorisme et l’extrémisme, cela a une influence négative sur les mineurs", a abondé un autre procureur.
La défense de Mémorial réplique avoir déjà payé d’importantes amendes pour ces infractions et dit aider au contraire les "populations vulnérables" : les prisonniers politiques, réfugiés et minorités.
Ces "poursuites politiques sont lamentables, mais aussi mauvaises pour la société et le gouvernement", a estimé un des responsables de Mémorial, Alexandre Tcherkassov.
La prison ou l’exil
Depuis le début de l’année, l’opposition anti-Kremlin a subi les assauts de la justice, forçant nombre de ses figures à l’exil, tandis que d’autres étaient incarcérés.
Mémorial International, l’organisation chapeautant les différentes filiales de l’ONG, est aussi menacée de dissolution dans un autre procès, devant la Cour suprême où la prochaine audience est prévue le 28 décembre.