Mais cela ne suffit pas. Dernier port d’attache pour les dizaines de milliers de réfugiés européens fuyant le nazisme, Lisbonne devient la cible de son voisin espagnol. Suite à l’entrevue entre Hitler et Franco en octobre 1940, Madrid fixe une date d’invasion. Salazar l’évite de justesse : habilement, il obtient de Churchill des livraisons de blé aux Espagnols, au bord de la famine. Pour se garantir la bienveillance d’Hitler, il vend aussi à Berlin du tungstène, nécessaire à l’effort de guerre. Unique point de passage entre Londres et Berlin, Lisbonne devient la capitale de l’espionnage avec la bénédiction de Salazar. Mais il est pris à son propre jeu : alors que son allié britannique recrute ses opposants communistes, les espions allemands infiltrent jusqu’aux flottes de pêcheurs de l’Atlantique nord. Or remporter la bataille de l’Atlantique devient crucial pour les Alliés qui préparent le Débarquement en Normandie. Et l’archipel portugais des Açores est le point névralgique pour protéger leurs convois militaires. Salazar y négocie pied à pied avec Churchill et obtient en échange la survie de son régime. Lorsque les ouvriers portugais, portés par les victoires alliées, se mettent en grève, il les réprime implacablement. Il continue aussi de vendre son tungstène au IIIe Reich, au prix fort. Les Alliés emploient les grands moyens : menacé d’un coup d’Etat, Salazar finit par signer l’embargo sur le tungstène, deux jours seulement avant le Débarquement en Normandie. Il se rallie aux vainqueurs in-extremis. Et en profite pour renforcer son pouvoir pour les 25 ans à venir.
Salazar, le Portugal à quitte ou double" un documentaire de Bruno Lorvão & Christiane Ratiney à voir le samedi 21 janvier à 20h23 sur la Trois. A revoir sur AUVIO durant 90 jours