Roland Garros

Sans Rafaël Nadal, l’édition 2023 de Roland Garros sera plus excitante

Pour la première fois depuis 2005, Rafaël Nadal sera absent du tournoi de Roland Garros

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Par Laurent BRUWIER

L’émotion a fait place à la raison. La période du deuil est passée. Chacun essuie ses larmes. Même si l’annonce était tant attendue que redoutée, le forfait de Rafaël Nadal a saisi la majorité de la planète tennis. Peut-être plus parce qu’inconsciemment chacun a fait le raccourci entre l’absence de la quinzaine et le vide définitif dans lequel l’Espagnol va nous plonger. Sur ses terres, à Manacor, Nadal a fixé lui-même la date de fin théorique. Automne 2024 parce que "sa carrière mérite une autre fin qu’une conférence de presse". Ce sur quoi chacun s’accorde, reste à savoir si son corps l’entend de cette oreille.

La seule motivation qui pouvait réellement habiter l’Espagnol cette année c’était ce 23e titre en Grand Chelem pour écrire encore un peu plus l’histoire du tennis car l’histoire du tournoi est déjà la sienne. Quatorze ou quinze, ça ne changera rien dans les livres d’histoire tant la probabilité que son record tombe est infime. Rafaël Nadal est désormais lié à l’histoire de Roland Garros. Un mariage indestructible pour l’éternité.

Jamais en 17 années (en 2005, année du premier titre, Rafaël Nadal n’était pas encore le maître des lieux) la course au sacre sur le Chatrier n’aura été aussi indécise.

Finalement, l’absence de l’ogre espagnol est peut-être une bonne chose pour l’amateur de tennis. Le scénario n’est pas écrit à l’avance et les prétendants à la couronne sont réellement plus que deux cette année. Un sentiment partagé par Philippe Dehaes.

" Ce n’est pas le joueur qui fait le tournoi. Roland Garros c’est le plus grand tournoi sur terre battue au monde. Ce serait manquer de respect à l’institution et aux autres joueurs de dire que Roland Garros aurait moins de saveur sans Nadal. La nouvelle génération est là et elle est incroyable. Je pense que cette édition sera même plus excitante à suivre ".

La course est ouverte

Si le Roi n’est pas, la dynastie doit se trouver un successeur. Pas d’évidence mais une foule de prétendants.

Parmi les candidats, son plus grand rival Novak Djokovic, le Serbe, contrairement à Nadal aura peut-être l’opportunité de viser un 23e, 24e voire 25e titre en Grand Chelem cette année. Le Serbe a trébuché sur Nadal en quart l’an dernier à Paris avant de s’offrir les deux autres GC auxquels il a participé dans la foulée… À Wimbledon et à l’Australian des surfaces qui conviennent mieux à son jeu.

Djoko n’est pas allergique à la terre battue loin de là mais cette année, Musetti, Lajovic et Rune ont mis à jour ses carences dans des matchs en deux sets gagnants. Pour lui aussi le poids des années se fait sentir (36 ans).

" Attention au Serbe car il arrive comme une bête blessée et c’est là pour moi qu’il est le plus dangereux " confie Philippe Dehaes. Sur un Grand Chelem, il se transforme, il se transcende, il se métamorphose ce qui me pousse à dire qu’il sera aussi un des favoris comme Medvedev d’ailleurs ".

"C’est certainement sa plus mauvaise préparation sur ses 10 derniers RG" analyse notre consultant Michel Bouhoulle. "En temps normal, j’aurais tendance à dire que c’est lui que je place comme favori mais pas au vu de sa préparation actuelle. Ce n’est pas le Djoko qu’on était habitué de voir."

Derrière les regards filent tous azimuts. Carlos Alcaraz, numéro un mondial et digne successeur ibérique du grand Rafaël focalisera l’attention.

"C’est sans doute celui qui a le jeu le plus adapté pour succéder à Nadal" selon Michel Bouhoulle. "S’il n’a pas de pépins physiques, je le place parmi les trois favoris pour la victoire finale. J’émets une petite réserve et je ne le place pas comme seul favori car les choses ont changé depuis quelques mois. Désormais il est numéro un mondial, la pression est différente, on va voir comment il va la gérer ".

" Je pense qu’il a la capacité et les qualités pour gérer la pression " enchaîne Philippe Dehaes, " mais ça reste un Grand Chelem, ce n’est pas un Master Series. Il l’a fait à l’US Open mais sur terre battue, c’est sans doute encore plus grand à ses yeux ".

La route est longue pour atteindre l’inaccessible étoile mais avec un chelem en poche à 20 ans et un bilan sur terre couronné à Barcelone et à Madrid, le jeune protégé de Juan-Carlos Ferrero devra assumer son statut comme Daniil Medvedev qui depuis son titre à Rome semble désormais prendre du plaisir dans les glissades. Numéro deux mondial, le Russe est capable du meilleur comme de l’inattendu. Suffisant pour être parmi les favoris.

"C’est celui qui a le plus d’expérience derrière Djokovic, il a un jeu atypique qui reste très difficile à jouer. C’est le prototype des adversaires que les joueurs n’aiment pas rencontrer. Il a les capacités à donner à son adversaire la balle qu’il n’a pas envie de recevoir. Il a tendance à faire mal jouer ses adversaires. Pour moi, il figure également dans le top 3 des favoris avec Alcaraz".

Les derniers finalistes

Finalistes déçus en 2021 et 2022, Stefanos Tsitsipas et Casper Ruud verront peut-être dans l’absence de Nadal le signe qui leur manquait pour décrocher le graal. Le Grec a déjà connu une meilleure préparation avant de débarquer à Paris, pas le moindre titre lors des tournois préparatoires et juste une finale perdue à Barcelone (face à Alcaraz) mais son talent sur cette surface qu’il adore peut le mener loin. Spectaculaire et apprécié du public parisien, Stefanos n’a toujours digéré son échec de 2021 face à Djokovic.

"Très beau joueur, très complet mais sa préparation et ses résultats du printemps sur terre ne lui permettent pas d’intégrer le statut de favori à mes yeux." tranche l’entraîneur de Yanina Wickmayer.

Pour Casper Ruud, le constat est différent, finaliste de la dernière édition, il avait déjà perdu la partie dans le couloir qui le menait sur le court central en 2022 quand Nadal son idole s’échauffait devant lui. Titré à Estoril, au début de la campagne sur terre, le Norvégien possède toutes les armes pour faire mal à Paris mais pour Michel Bouhoulle, 2023 sera totalement différente de 2022 pour le Norvégien. " Il n’arrive pas dans les mêmes conditions que l’an dernier quand il avait un nombre de victoires sur terre battue impressionnant. Finaliste ici, il aura beaucoup de points à défendre. Il va devoir gérer la pression. Il n’aura pas le droit à l’erreur sans quoi il va chuter au classement ".

La Next Gen c’est maintenant

Enfin la révélation de 2022 pourrait être la surprise de 2023. Holger Rune, le bad boy danois, allie tous les coups du tennis à un gros physique. Son tempérament ne laisse personne indifférent. Certains l’adorent, d’autres le détestent mais tous se rejoignent pour louer son talent et son sens du spectacle.

" Il a été finaliste à Rome et à Monaco, il a remporté Munich. Il a battu Medvedev et Djokovic sur terre battue. Il est dans une spirale positive. Il va débarquer en confiance à la Porte d’Auteuil, ça pourrait être son année". Pour Michel Bouhoulle, le Danois a sa place dans le Top trois des favoris.

Et puis derrière, la Next Gen arrive à maturité. Sinner, Musetti, Rublev ou autre Augier-Aliassime pourraient profiter des circonstances pour définitivement quitter le statut d’espoir.

" Comme je l’ai dit, poursuit Philippe Dehaes, cette nouvelle génération est capable de faire des choses incroyables. Rune, mais aussi Augier Aliassine sans oublier Sinner. Attention à l’Italien, il est capable de surprendre tout le monde ".

Les premiers éléments de réponse arriveront dès ce dimanche mais on ne sera fixé que le 11 juin en début de soirée.

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