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Sciences participatives : compter les morses de l’Arctique en télétravail

Par Marie-Amélie Lenaerts

Le Fonds mondial pour la nature (WWF) et le British Antarctic Survey recrutent 500.000 volontaires pour identifier des morses sur des milliers d’images de l’océan Arctique prises depuis l’espace. L’objectif est de mieux comprendre comment les morses sont impactés par le changement climatique. C’est ce qu’on appelle de la science participative.

Originalité du job : c’est du télétravail ! Mode d’emploi de cette action de grande envergure, dans la chronique Océan du magazine Déclic.

Une étude scientifique avec des airs de serious games

Le projet " Walrus from Space " (Les morses depuis l’espace) est le premier recensement des morses de l’Atlantique et des morses de la mer du Laptev (sous-populations étudiées dans le cadre de cette étude) réalisé à partir d’images satellites. Cette technique permet d’évaluer le nombre d’individus sans les perturber ; elle est d’autant plus intéressante qu’elle permet de recenser les individus se trouvant dans des endroits éloignés et difficiles d’accès.

Les volontaires, derrière leur ordinateur, sont invités à se glisser dans la peau d’un.e détective pour analyser des images satellites les unes après les autres.

Dans un premier temps, il s’agit d’identifier des groupes de morses sur les plages, facilement identifiables depuis l’espace, et donc d’éliminer toutes les photos où il n’y a pas de morse. Ensuite, les volontaires sont amenés à compter les petits points bruns qui correspondent à des morses. À la clé : des badges en bronze, argent et or à chaque palier, et un classement qui permet de suivre son score et celui de la communauté des " joueurs ".

Légende: Images satellite d'un petit (à gauche), moyen (au milieu) et grand (à droite) groupe de morses à terre.
Légende: Images satellite d'un petit (à gauche), moyen (au milieu) et grand (à droite) groupe de morses à terre. ©2020 Maxar Technologies

Le morse, animal polaire aux premières loges des conséquences du réchauffement climatique

Les morses sont des animaux qui, lorsqu’ils ne sont pas dans l’eau pour pêcher, aiment passer du temps sur la banquise arctique pour se reproduire et se reposer.

L’épaisseur et l’étendue de la banquise, aussi appelée " glace de mer ", varient fortement en fonction de la saison. En hiver, elle recouvre presque tout l'océan Arctique. Au retour du printemps, elle s'amincit et se rétracte. C’est un phénomène tout à fait naturel, qui est malheureusement perturbé depuis quelques années par le réchauffement climatique.

Selon Krishna Das, océanographe à l’ULiège, la surface des glaces périannuelles (subsistant à la fin de l'été) a diminué de 13 % lors de la dernière décennie. Par conséquent, les morses ne trouvent plus de glace de mer en été sur laquelle se hisser. Ils se rabattent alors sur la terre ferme qui entoure l’océan Arctique, en Russie, Norvège, au Groenland et au Canada.

La glace de mer disparaissant davantage d’année en année, les morses sont de plus en plus nombreux à se retrouver sur la terre en été. Ils s’entassent les uns sur les autres, par milliers parfois.

Le grand problème de ces groupes de morse sur les plages, c’est qu’ils sont sujets à des mouvements de panique généralisés. En fuyant vers la mer, ils se marchent dessus, écrasent les plus jeunes, entrainant ainsi la mort de nombreux individus.

Se reposer sur la terre plutôt que sur la banquise signifie aussi que les morses doivent nager plus loin et dépenser plus d’énergie pour trouver leur nourriture.

À quoi ça sert de compter les morses ?

Selon Krishna Das, recenser les morses permet d’aboutir à une évaluation du nombre d’individus, et de voir si la population est stable, ou si elle diminue ou augmente.

Ces données permettent de mieux connaître les morses et de mieux comprendre comment ils sont impactés par le changement climatique, ce qui permet à terme de mieux les protéger.

Des sciences marines participatives

Selon le VLIZ, l’Insitut Flamand de la mer basé à Ostende, l’océan est l’écosystème le plus large de notre planète et il est encore très peu exploré. C’est pourquoi les scientifiques essaient de plus en plus d’inviter les citoyens à contribuer à leurs efforts de recherche.

Les citoyens peuvent intervenir à tous les stades du processus scientifique. Souvent pour la collecte d’échantillons, sur les plages par exemple. Ou pour analyser des échantillons ou des images satellites comme dans le cadre du projet " Walrus from Space ", qui prévoit d’analyser 600.000 images à analyser par an, durant cinq ans.

Comment participer ?

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