Déclic

Selon un ex-agent du KGB, Vladimir Poutine est "capable" d’utiliser l’arme nucléaire "s’il est acculé"

L'invité: Sergueï Jirnov

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Par François Saint-Amand via

La guerre en Ukraine a pris un nouveau tournant en ce début juin 2023. La contre-offensive aurait commencé du côté de Zaporijia et la destruction du barrage de Khakhovka, pour endiguer cette contre-attaque, a inondé les villes et villages bordant les deux rives de la Dniepr jusqu’à Kherson, mettant ainsi en danger l’écosystème et des dizaines de milliers de civils. Sergueï Jirnov, ancien agent du KGB, a commenté la récente actualité dans Déclic.

Pour lui, il n’y a aucun doute, les Russes ont bien fait sauter le barrage car "ils sont les premiers bénéficiaires" alors que "du point de vue militaire, les Ukrainiens n’avaient absolument rien à gagner là-dedans", puisque les inondations qui en résultent empêchent la contre-offensive.

Agent du KGB entre 1979 et 2002, Sergueï Jirnov a côtoyé Vladimir Poutine et une partie de la classe politique russe. Sous la menace, il s’est exilé depuis en France et s’est reconverti en journaliste et auteur. Il connaît néanmoins encore le mode de fonctionnement des renseignements russes et le système de l’intérieur.

Son dernier livre dresse un nouveau portrait du président Poutine : L’escalade : est-il vraiment fou ? Il explique notamment que les membres des services secrets russes et ukrainiens se connaissent très bien. "Ce sont plus que des cousins, ce sont des frères parce que les gens qui travaillent actuellement et précédemment dans les services de renseignements ukrainiens et russes ont fait les mêmes écoles du KGB car cela fait juste 30 ans que les pays se sont séparés. Même que pendant plusieurs décennies, l’Ukraine est restée dans le sillon de la Russie. Il y a des officiers ukrainiens qui continuaient à aller dans les écoles russes. L’Institut du Drapeau rouge que j’ai fait est devenu l’Académie des renseignements extérieurs et jusqu’à 2018, les espions ukrainiens étaient formés dans cette académie. Par exemple, jusqu’à 2018, le représentant officiel du SVR, le service des renseignements extérieurs de Russie à Kiev, était quelqu’un avec qui j’ai fait mes études pendant trois ans".

© Contributor/Getty Images

La menace nucléaire est à prendre au sérieux

Serguei Jirnov aborde aussi la question de l’arme nucléaire dans son livre. Poutine a brandi cette menace à de nombreuses reprises, et ce depuis le début de l’invasion de l’Ukraine. Doit-on croire ses paroles ? Pour l’ex-agent du KGB, Poutine "est un être très complexe et torturé mais en même temps très simple : on a remarqué avec les années que ce que Poutine disait, il l’exécutait. Il fait et croit en ce qu’il dit".

Ce qui signifie que quand il nous menace avec l’arme nucléaire, il est mentalement et psychologiquement prêt à l’employer. Il ne bluffe pas. Quand il dit cela, il faut bien le croire. Parce que par exemple sur le barrage de Khakhovka, les Russes ont dit 'on va le faire sauter' au mois de novembre. Ils ont attendu six mois, mais l’ont fait sauter.

L’ancien espion poursuit sa réflexion : "Poutine est quelqu’un qui a compris qu’il n’a pas d’armée et de forces conventionnelles pour gagner cette guerre. Donc s’il est acculé, s’il est poussé au bout, surtout si les Ukrainiens récupèrent une bonne partie du terrain que les Russes occupent, il est capable de les punir". Poutine a en effet une rancœur envers l’Ukraine d’avoir chassé son vassal Viktor Ianoukovytch à deux reprises. "Plus les Ukrainiens sont sur la voie de la victoire dans cette guerre, plus malheureusement cela les rapproche du risque (nucléaire) de la part de Vladimir Poutine".

C’est d’ailleurs pour cette raison que le président russe a raté sa carrière d’espion à l’Académie Andropov du KGB. Selon les ressources humaines de ce service secret, il est une personne trop émotive, "et sous le coup de l’émotion, il est capable du pire" souligne Jirnov.

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