C’est donc bien un roman, à la fois très intime, familial et vertigineux, à travers lequel Richard Powers plaide pour que nous inventions de nouvelles solidarités, à l’image de nombreuses espèces, et pour une technologie éthique, mais aussi pour une forme de tendresse pour l’existence qui pourrait réparer nombre de nos dégâts.
Il faut vous dire qu’il a écrit ce roman sous l’ère Trump, qu’il estime assez peu faut-il le dire, il lui préfère nettement Greta Thunberg, avec ou sans ses tresses.
Et son arme à lui, non-violente, est de réintroduire l’imaginaire comme source féconde pour se réinventer. Lui-même s’intéresse à tout, et il nous régale d’informations passionnantes sur les astres, les fleurs sauvages ou les oiseaux — tout ce qui passionne cet enfant et ses parents.
C’est un roman alarmé et alarmiste, oui, mais aux pages enchanteresses et aux dialogues étincelants et plein d’esprit.
Et en filigrane de cette œuvre de salubrité publique, il y a cette vraie question : comment transmettre à un enfant sensible, tout ce en quoi on croit : l’importance d’un Etat démocratique, l’importance du beau, du savoir, de la complexité, du respect, dans un monde de plus en plus binaire, docile, égoïste. Comment faire sans le mettre en danger, le fragiliser, ou même le tromper ? Sera-t-il préparé à affronter le monde qui vient, pourra-t-il y trouver sa place ou sera-t-il la prochaine victime d’une civilisation qui se saborde elle-même en nous prenant tous en otage ?
"Sidérations" de Richard Powers paraît aux éditions Actes Sud dans la traduction de Serge Chauvin. Il sera à Passa Porta à Bruxelles ce lundi 8 novembre.