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SMR, l’artiste à contre-courant joue avec les contrastes dans son nouvel EP Contresens

© Adèle Boterf

Par Laurenne Makubikua via

Contresens, c’est le nom du nouvel EP de SMR sorti ce vendredi 26 mai. Ce rappeur et illustrateur, que vous pourrez apercevoir sur certaines vidéos en train de freestyler, feuille de dessin et posca à la main quand il ne participe pas à différents concours ou accompagnements artistiques, est passé dans nos studios pour répondre à quelques-unes de nos questions.

 

Ce projet, "c’est le projet de la maturité" ironise SMR au sujet de son EP Contresens sorti ce vendredi 26 mai. "Je pense que c’est le projet qui me ressemble le plus, parce que plus je vais faire de la musique, plus je m’assume et plus elle se rapproche de qui je suis vraiment. Je pense que ce projet-là me ressemble encore plus que les précédents tout en s’inscrivant dans la continuité, parce que c’est le cheminement de ma réflexion. J’ai 28 ans, je n’ai plus 18 ans, je ne raconte pas la même chose."

Pour ce nouvel opus, le rappeur voulait offrir un univers plus solaire, loin de ses précédents projets plus sombres. "Quand j’ai commencé la musique avec mes projets solos, j’avais ce truc de vouloir être le mec ténébreux alors qu’en fait, au quotidien, les gens qui me fréquentent le savent, je ne suis pas du tout ténébreux. Je suis même très solaire, très souriant, très joyeux, même si, en parallèle, je suis quelqu’un de très pessimiste. On en revient à cette histoire de contraste qui se dégage dans cet EP. J’ai envie de plus montrer le Samir souriant, que le Samir ténébreux. Du coup, dans ce projet Contresens, je pense qu’il prend un peu plus de place."

"Rap game" au sens littéral du terme

SMR ou Samir, cet artiste pluridisciplinaire originaire de Mulhouse, qui excelle tant dans la musique que dans l’illustration, arrive à Bruxelles il y a cinq ans maintenant. C’est dans cette même ville qu’il fait une partie de ses études en graphisme et qu’il rencontre l’amour. Après avoir finalisé son cursus académique en France, il fait naturellement le choix de poser ses valises dans la capitale belge. "J’avais déjà fait quelques rencontres au niveau musical. Des gens avec qui c’était intéressant de travailler : photographe, graphiste… C’est l’équipe avec laquelle je travaille depuis maintenant trois ans. Ce sont des gens que j’ai rencontrés pendant mes études. Et puis, j’ai adoré la ville, j’ai adoré Bruxelles, l’énergie qui y réside. Il y a aussi un côté intéressant dans le monde de la bande dessinée. Tout ça m’a un peu aiguillé vers Bruxelles et la Belgique."

Ces premiers pas en tant que rappeur surviennent alors qu’il est âgé de 10 ou 11 ans. "Je commence le rap, comme beaucoup de jeunes de ma génération, un peu par mimétisme. J’écoutais du rap, c’était un peu la musique à la mode. J’ai grandi dans un quartier, tous les gens autour de moi écoutaient du rap. Les gens de ma famille écoutaient du rap. Du coup, au final, par mimétisme, je me suis mis à essayer de faire des rimes. Au début, c’était pour rigoler". C’est ainsi que le rap devient alors un nouveau terrain de jeu pour lui et qu’il le restera au fil des années. "Je pense que ce schéma a construit un truc en moi. Ce truc de garder l’impression de jouer, c’est encore quelque chose que j’ai aujourd’hui et que je continue de développer. C’est quelque chose de super important parce que ça entretient ma passion. J’ai toujours entrepris toutes mes pratiques créatives comme un jeu et je les vis de manière un peu ludique pour, d’un certain point, rendre ça plus léger dans ma tête. Faire en sorte que ça devienne un exutoire et que ce soit un moment où je ne pense plus à mes problèmes du quotidien. Du coup, c’est une échappatoire par le jeu que j’ai développé."

De la même manière que l’EP Contresens revient sur les contrastes qui font de la vie ce qu’elle est, le parcours artistique de SMR est jalonné de paradoxes en tout genre. Alors qu’il voit le rap comme un jeu, en 2013, il participe à la compétition "End of the weak" de France. Il en ressort vainqueur et devient le plus jeune champion du concours du haut de ses 18 ans. Celui qui rappait jusque-là uniquement dans sa chambre et devant quelques amis à l’occasion voit sa pratique artistique prendre un tout autre tournant. "Ça m’a un peu ouvert quelques portes. J’ai rencontré plein de rappeurs, de rappeuses, de chanteurs et de chanteuses, à ce moment-là. Suite à ça, on a créé un groupe qui s’appelait Sphère Primaire. Ça a été super formateur pour moi parce qu’on a fait énormément de concerts."

Entre formations musicales, concours, accompagnements artistiques et carrière solo

Ce groupe qui débute à peine va ainsi enchaîner une soixantaine de dates en France entre 2014 et 2016 et sortir un EP. Un an plus tard, SMR poursuit son bonhomme de chemin et sort un premier projet solo. En même temps que de performer sur scène pour différents concerts, il reprend le chemin des compétitions et sera finaliste au "Redbull Dernier Mot". En parallèle, alors qu’il évoluait désormais en solo, l’artiste intègre à nouveau un collectif, Odisy, avec lequel il sort trois EP et bénéficie d’un accompagnement et de résidences artistiques. "Chacun a repris un peu le contrôle de sa vie et moi j’avais envie de continuer en "solo" ou plutôt en duo avec DJ Cerk. Sans lui, il n’y a pas de SMR." Ce nouvel EP, il l’a d’ailleurs réalisé aux côtés de son binôme de longue date : DJ Cerk, crédité sur les six morceaux de Contresens. "J’entrevois notre relation comme celle d’un duo. Même si c’est l’homme de l’ombre, et qu’il aime bien aussi être dans l’ombre, ça reste un duo."

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Après son album Jeu d’enfant sorti en octobre 2020, on pourrait croire que les choses se calment pour l’artiste. Pourtant, il profite du confinement pour concevoir une grosse partie des morceaux présents sur le projet Contresens. Côté concours et accompagnements artistiques, il est contacté par le télécrochet produit par Netflix, Nouvelle École, et entame le parcours FrancoFaune. Alors que le parcours FrancoFaune lui donne l’opportunité de jouer avec un groupe de musiciens, Netflix devait l’aider à gagner en visibilité. Du moins, c’était dans cette optique que le rappeur avait accepté de participer au show télévisé. "Quand j’ai vu le montage, je ne te cache pas que c’était la douche froide. Je n’ai pas été prévenu à l’avance, donc c’est frustrant parce que je sais que j’ai donné quelque chose d’intéressant. Au final ça a été coupé pour des raisons qui me dépassent, mais je vais rebondir. Là, c’est à chaud parce que ça fait quelques jours que c’est sorti et évidemment, il y a beaucoup de déception et de frustration, parce que je sais ce que j’ai donné en live. Ils ne m’ont pas sélectionné directement pour rien".

"De l’image au son, je veux tout faire et tout de suite"

La "douche Netflix" étant en train de sécher, c’est un SMR excité par la sortie de son projet qui nous explique la direction artistique qu’il voulait pour Contresens. "Je suis très enthousiaste parce qu’il y a un gros clip qui arrive, j’ai pressé des CD. J’avais envie de faire un vrai objet. Vu que j’ai réalisé l’artwork de la pochette, j’avais la liberté de réaliser l’artwork du CD. Je vais aussi faire des posters, des stickers… En fait, j’ai envie de faire une espèce de truc complet. Je vais présenter tout ça le 17 juin au Botanique. Je vais faire en sorte que ce soit à la fois un concert et qu’on puisse aussi avoir un stand de merch et une exposition. L’idée, c’est que tout cela fasse le lien entre Contresens qu’on va jouer en live et Contresens qu’on a défendu de manière visuelle. Pour l’instant, je suis là-dedans et c’est quelque chose qui m’excite à fond forcément parce que ce sont mes deux passions et que, là, j’y consacre tout mon temps".

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Quant à l’écriture de ce projet, l’artiste confie que l’image qu’il avait en tête en le réécoutant était celle "de quelqu’un qui danse alors que tout est en feu autour de lui". SMR détaille : "Ce qui m’intéresse dans la musique, dans mon écriture, ce qui m’influence le plus, ce sont les contrastes entre quelque chose de positif et quelque chose de négatif ; quelque chose de lumineux et quelque chose de sombre. Du coup, ça s’interprète de la manière suivante : je peux à la fois parler d’un moment super triste de ma vie, mais en parler en le rendant drôle. C’est quelque chose qui va souligner un contraste et c’est ça qui m’intéresse. À titre personnel, je pense que ce qui distingue mon écriture, c’est qu’elle est à la fois joyeuse et à la fois triste. Parfois, j’aime bien les morceaux qui sont entre les deux et où on ne sait pas forcément lire la jointure entre le côté marrant et le côté triste."

L’histoire de Contresens, c’est une histoire qui est commune à toutes et tous. Une histoire à travers laquelle beaucoup pourront se reconnaître. Entre l’impression d’être à contre-courant, le sentiment d’être seul malgré la foule et l’envie de tendre vers l’acceptation de soi, SMR nous plonge dans une écriture qui se veut comme le reflet de sa personne, de son histoire. Et, parce que pour lui, la scène est l’aboutissement de toutes ces heures de travail, l’artiste nous donne rendez-vous le 17 juin au Botanique pour une release party qui promet de centraliser tout son art.

Découvrez des extraits exclusifs de cette interview lors de la prochaine Jam Block Party ce mardi 30 mai.

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