Très vite, elle a été rejointe par d’autres et Sororasie est devenu un projet collectif, une véritable plateforme anti-clichés et un webzine. Parmi les abonné·e·s de ce compte qui démonte les stéréotypes, Sung Shim Courier, 35 ans, journaliste bruxelloise.
Asio-féminisme
Pendant longtemps, Sung, d’origine coréenne explique s’être sentie "Belge avec une tête asiatique". C’est au fil des rencontres et des discussions qu’elle a commencé à s’intéresser à l’asio-féminisme. "Je suis en train de réaliser un documentaire qui parle de mon histoire personnelle d’adoption. Je rencontre différents profils, la question sous-jacente de mon travail, c’est ‘comment on peut être belge quand on a été coupé·e de ses racines’. Le docu modifie la manière dont j’appréhende mon identité de femme asiatique."
Il y a un an, en mars 2020, elle assistait à l’enregistrement du podcast Kiffe Ta Race * Les Grenades au Parlement Bruxellois. "J’ai trouvé ça incroyable. On se demande souvent où est la jeunesse, où sont les femmes, les minorités visibles ? Elles étaient là ! Je trouvais ça super ce public qui avait envie d’être représenté."
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Lors de l’événement, elle a fait la rencontre de Grace Ly, autrice et co-animatrice du podcast avec Rokhaya Diallo. "Je lui ai parlé du phénomène de la banane, le fait de se sentir blanche alors que je suis jaune. Je jouais de cet humour, mais en discutant avec elle, j’ai réalisé qu’il y avait quelque chose de péjoratif, même en me réappropriant cet humour colonial."
Je venais de vivre du racisme au travail où on m’avait demandé de manière insidieuse si j’avais le covid, alors que je n’étais pas du tout malade…
Par la suite, Sung a continué d’écouter le podcast Kiffe Ta Race et commencé à suivre des militantes sur les réseaux sociaux. C’est comme ça qu’elle a découvert le compte Sororasie d’Amanda. "Elle avait un discours politique, structuré et engagé qui expliquait le malaise que j’avais ressenti gamine. Par exemple, quand j’étais petite dans les rues, les enfants qui me croisaient disaient ‘oh une chinoise’ en se tirant les yeux."
Asidentités, célébrer ses racines
Au déconfinement, Sororasie est passé à la vitesse supérieure, en lançant sur Instagram, un appel pour faire des portraits de femmes et minorités de genre asiatiques à Paris. En découvrant le post, Sung a pris son courage à deux mains et a décidé de se rendre en France pour rejoindre l’événement. "J’étais hyper stressée, mais ça s’est super bien passé. Il y avait des nanas de partout. On était dans le ‘body positive’ à fond. L’idée, c’était vraiment de s’accepter dans sa féminité comme dans ses racines."
Dans ce projet, intitulé Asidentités, la question de la représentation est cruciale, l’objectif est de mettre en avant la diversité des identités asiatiques. "Plus de 170 personnes ont répondu présentes. On est toutes et tous un corps politique", explique Amanda. "L’Asie c’est 48 pays, pas que la Chine", insiste Sung.
Toujours dans cet esprit de sororité, le shooting de ces mannequins d’un jour a été réalisé par une équipe de femmes photographes asiatiques. "La convergence de talents féminins issus de différents corps artistiques étaie en-soi un symbole pour créer une œuvre originale qui tente de s'émanciper du ‘male gaze’", a publié le collectif dans un communiqué.