Exposition

Stephan Balleux à la nouvelle Fondation blan la démesure en exposition

Stephan Balleux, Beauty is the beast – 2007

© Stephan Balleux

Un nouveau lieu d’exposition est toujours une bonne nouvelle. La Fondation blan ouvre ses imposants espaces dans un hôtel de maître près des étangs d’Ixelles. Le plasticien prolixe Stephan Balleux inaugure l’espace sur quatre étages avec ARTIFICIALIA (c-à-d tout objet créé ou modifié par l’homme) qui rassemble une cinquantaine d’œuvres au bas mot.

La Fondation blan à Ixelles
dessin de la façade signé François Schuiten

Thomas de Wouters, fondateur de la Fondation blan, se définit comme simple amateur d’art ; ni historien de l’art ni expert ou commissaire. Modeste collectionneur qui s’avoue plus baroque que minimal – Stephan Balleux confirme !- dont les maîtres mots sont ouverture, éclectisme et questionnement à une époque ou la polarisation des opinions oblitère bien souvent tout dialogue. Douter est salvateur. Et c’est précisément le cœur du travail de Stephan Balleux qui interroge l’image et notre perception à travers la matière, la texture, les médiums utilisés, l’appropriation d’images existantes, la peinture, la photo, la manipulation numérique, la sculpture et aussi la vidéo.

vue de l’exposition Artificialia 2023
vue de l’exposition Artificialia 2023 © Xavier Ess

L’hôtel de maître du 26, boulevard général Jacques, avec son escalier de pierre et ses salons aux lustres d’époque est tout en verticalité, rehaussé d’un toit terrasse surplombé d’un cube de verre au cinquième étage, appartement du maître des lieux qui promet un banquet mensuel et l’ouverture un jour par semaine d’un des salons " où l’on est sûr de rencontrer un artiste, un intellectuel, un homme de la rue " nous dit-il. A voir…

Stephan Balleux, Ars Memoriae (l’invitation #001) – gouache sur ancien document trouvé, 2020
Stephan Balleux, Ars Memoriae (l’invitation #001) – gouache sur ancien document trouvé, 2020 © Stephan Balleux

Le sens et le beau

Ni galerie, ni musée la Fondation se veut éclectique et foisonnante.Un bazar flottant " au sein duquel on nous annonce concert, littérature, théâtre, performance, cinéma… L’art à la Fondation blan nous donnera donc à réfléchir et admirer ce que Thomas de Wouters appelle le beau qui, lorsqu’il est " remarquable " si l’on peut dire, toucherait à l’universel au-delà de toute subjectivité. Une notion que Stephan Balleux interroge précisément à travers différentes séries d’œuvres qui créent un corpus redoutable de cohérence. Le plasticien qui possède des milliers de livres, est un chineur invétéré à la recherche d’images et de documents qui se retrouveront dans ses tableaux ou qui seront rehaussés sur le document même. 

Stephan Balleux, vue de l’exposition Artificiala, 2023
Stephan Balleux, vue de l’exposition Artificiala, 2023 © Tous droits réservés

Le tableau du grand escalier d’un hôtel particulier parisien, créé pour l’exposition, résonne parfaitement avec le lieu. Ailleurs jouant avec les styles, on trouve une gouache inspirée des papiers peints du XIXe, puis deux grands formats de ce qu’il appelle de fausses peintures abstraites qui interrogent le regard par une mise à plat des couleurs, une absence totale de profondeur. Plus loin, un grand silex taillé sur fond de gravure (renversée) qui pourrait aussi bien être un fragment de météorite, venu lui aussi du passé. Les espaces-temps se télescopent.

vue de l’exposition Artificialia 2023
vue de l’exposition Artificialia 2023 © Xavier Ess
une des fausses peintures abstraites de Stephan Balleux, vue de l’exposition Artificialia 2023
une des fausses peintures abstraites de Stephan Balleux, vue de l’exposition Artificialia 2023 © Xavier Ess

Charlotte Rampling est dans la place

La plus petite salle, confinée, rassemble quatre grandes toiles qui sont des variations d’une image de Charlotte Rampling dans Les Damnés de Visconti. Le regard perdu, le personnage est entouré d’oiseaux tous disparus en ces temps d’anthropocène. L’ensemble est " l’expression contradictoire d’un sentiment féerique et dramatique " commente l’artiste.

Stephan Balleux, The Birds
Stephan Balleux, The Birds © Stephan Balleux
© Tous droits réservés

Bien sûr, on retrouve aussi ses emblématiques masses flottantes menaçantes et les distorsions dans des portraits squeezés sous acide. Stephan Balleux qui fonctionne de manière plus libre aujourd’hui qu’auparavant a aussi produit une série de peintures d’onomatopée dont le joyeux Bardaf qu’on peut voir, si on a l’œil, quelque part dans la visite d’Artificialia.

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La Fondation blan accueillera entre trois et six artistes en résidence avec des ateliers installés dans la cave, investis pour l’occasion par Stephan Balleux avec des vitrines présentant des documents et les créations plastiques qui en résultent ; de minuscules photos qui apparaissent comme des fragments d’une image plus grande, comme un recadrage qui brouille le sens ; la phrase "La terre est dure le ciel est loin" gravée dans le marbre qui se déploiera sur bâche en façade du bâtiment… et jusque dans la chaufferie, cul-de-sac du parcours qui se termine sur Le Récit Spéculaire en résine et argent, une sorte de miroir sans image. Nous voilà renvoyés à nous-même.

Le Récit Spéculaire, 2015
Le Récit Spéculaire, 2015 © Stephan Balleux

Les cabinets de curiosités étaient organisés par séries, l’une d’entre elles est l’Artificialia, qui contient des objets créés ou modifiés par l’homme (antiquités, œuvres d’art, etc.). L’éclectisme du cabinet de curiosités fait tout son attrait : il place le visiteur devant l’inconnu, l’étrange avec en fil rouge les choix du propriétaire. Stephan Balleux a lui aussi conçu cette vaste exposition suivant un fil rouge – le rapport entre la matière, le cadre, la couleur, la texture et l’image. Qu’est-ce qu’on voit ? – qu’on nous laisse la liberté de rechercher, ou pas.

ARTIFICIALIA du 29.03 au 01.07.2023

Fondation blan – 26, boulevard Général Jacques – 150 Ixelles

 

vue de l’exposition Artificialia 2023
vue de l’exposition Artificialia 2023 © Xavier Ess
Stephan Balleux, R PATT (the mountain), 2020, mixed media on found frame
Stephan Balleux, R PATT (the mountain), 2020, mixed media on found frame © Stephan Balleux

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