Être malade sans jamais pouvoir mettre un nom sur sa maladie. S’entendre dire qu’on joue la comédie, qu’il est normal d’avoir mal pendant les règles, que l’on souffre de problèmes psychologiques… Voilà ce que traversent de nombreuses femmes souffrant d’endométriose. Et c’est bien ce qu’a vécu Laura Lequeu, une Enghiennoise âgée aujourd’hui de 21 ans. Son errance médicale commence aux débuts de l’adolescence. Des règles très douloureuses, des évanouissements et une fatigue chronique qui résiste à toutes les cures de vitamines… A aucun moment, les médecins consultés n’évoquent l’endométriose. Pas même lorsque Laura, à l’âge de 19 ans, subit des douleurs violentes lors des rapports sexuels : "j’ai vu huit gynécologues en 3 mois, aucun ne m’a pas parlé de ça, ils m’ont dit que c’était psychologique, que mon corps rejetait mon copain, que je ne l’aimais pas, que j’avais fait une fausse couche, des choses horribles…".
Après un long parcours de "la combattante" et des recherches personnelles, la jeune femme rencontre enfin un médecin qui lâche le nom de la maladie : l’endométriose. Une pathologie qui touche une femme sur 10 en âge de procréer. Pour comprendre le problème, il faut rappeler que l’endomètre est le tissu qui tapisse l’utérus. En l’absence de fécondation, l’endomètre se désagrège et est éliminé par les règles. Mais chez 10% des femmes, une partie de ce tissu utérin va migrer vers d’autres organes, provoquant des lésions, des kystes, des adhérences. "Cela peut provoquer des douleurs pendant les règles, pendant les rapports sexuels, des troubles digestifs et urinaires, des douleurs pelviennes et lombaires et de l’infertilité", raconte Laura Lequeu, désormais très documentée sur le sujet.
Eviter l’errance médicale
La jeune femme n’est pas tirée d’affaire, après trois opérations chirurgicales en un an et demi, elle est toujours sous traitement pour atténuer les conséquences de la maladie, elle est cependant rassurée de savoir de quoi elle souffre : "je m’estime heureuse d’être prise en charge, comparé à il y a deux ans, je vais mille fois mieux, même si la maladie est toujours là, c’est ma coloc et j’apprends à vivre avec elle en fait".
Ce qui motive Laura aujourd’hui, c’est la volonté d’éviter à d’autres ce qu’elle a subi. Une errance médicale malheureusement courante, plusieurs études démontrent un délai de 7 à 10 ans entre l’apparition des premiers symptômes et le diagnostic d’endométriose. Une longue attente difficile pour les patientes tant sur le plan physique que sur le plan psychologique. Laura en témoigne : "j’avais beau être entourée par ma famille, par mon copain extraordinaire et par sa famille malgré tout je ne me suis jamais sentie aussi seule parce que c’est une maladie taboue, on ne parle pas de règles, on ne parle de douleurs pendant les rapports sexuels, on ne parle pas de ces choses-là avec ses copines ou qu’on voit dans les médias… Moi j’ai eu la chance d’avoir ma famille, c’est pour ça que je veux créer une "toi mon endo famille" pour toutes les femmes qui ont besoin d’être comprises et soutenues, parce que je suis sûre que c’est ensemble qu’on peut faire évoluer les choses".
Sensibilisation et accès aux thérapies
En créant son asbl Toi mon endo, Laura se concentre sur trois projets. Le premier concerne l’enseignement. Quand la situation sanitaire le permettra, elle aimerait proposer aux écoles secondaires des séances d’information à destination des élèves de 5e, filles et garçons : "le but est de faire une session éducative et ludique, avec une équipe de professionnels, pour éviter d’attendre l’âge de 21 ou 27 ans pour entendre parler pour la première fois de l’endométriose, si on en parle plus tôt, on pourra éviter l’errance médicale".
Autre axe de son action : l’accès aux thérapies qui peuvent soulager les patientes : "pour soigner l’endométriose, il y a l’opération et le rôle du gynéco mais il y a plein d’autres choses qui peuvent améliorer le quotidien des femmes atteintes d’endométriose. Par exemple la consultation chez un sexologue, un kiné, un psy… Et ça malheureusement ça coûte cher et ce n’est pas toujours pris en charge par les mutuelles. C’est pour ça que j’aimerais mettre en place des ateliers thématiques à prix démocratique, pour faciliter l’accessibilité à toutes ces thérapies".
Enfin, Laura et les femmes qui l’ont rejointe dans l’asbl ont déjà commencé un travail de sensibilisation auprès du grand public, en utilisant massivement les réseaux sociaux, histoire de toucher toutes les générations.