Meilleur clip aux Victoires de la musique 2019, le texte de " Tout oublier " a été écrit entre frère et sœur, ce qui est assez rare. Angèle (23 ans) a écrit ses paroles, les a envoyées à son frère Roméo (26 ans) qui, lui, est arrivé en studio avec sa partie, sa sœur a trouvé ça super et hop, ça donne un tube redoutable d’efficacité… Voici une petite lecture philosophique de ce texte…
" Tout oublier " est un texte sur la recherche du bonheur et la recherche du bonheur, c’est le core business de la philosophie. Donc : Aristote – Angèle : même combat. Donc petit exercice de pop philosophie sur " Tout oublier " - une chanson où Angèle et Roméo font de la philosophie – comme Monsieur Jourdain faisait de la prose : sans le savoir. Ils font de la philosophie en jogging Adidas…
" Tout oublier " commence par une phrase estropiée : " N’existe pas sans son contraire qui, lui, semble facile à trouver. "
Une phrase sans sujet. Sujet qui arrive dès la deuxième strophe : " Le bonheur n’existe que pour plaire. Je le veux. "
Si on remet tout dans l’ordre, ça donne " Le bonheur n’existe pas sans contraire – le malheur – qui, lui, semble facile à trouver " contrairement au bonheur qui est difficile à trouver.
Ensuite : " Je le veux. Enfin, je commence à douter d'en avoir vraiment rêvé. Est-ce une envie ? Parfois, j'me sens obligée. "
Il y aurait donc une obligation à être heureux… Dans notre société, le bonheur serait une injonction. Et Angèle a écrit la chanson au moment où elle traversait un moment triste de sa vie familiale où elle a senti l’obligation (" j’me sens obligée ") l’obligation de sourire.
Le bonheur serait donc une consigne, un impératif d’autant que " le spleen n’est plus à la mode, c’est pas compliqué d’être heureux. "
Façon ironique de dénoncer cette petite dictature du bonheur, en faisant référence au spleen baudelairien qui, lui, a la sale réputation d’être sombre et d’alimenter le plaisir de la tristesse… Or, aujourd’hui, le spleen ne serait plus à la mode. C’est la gaieté et la joie de vivre qui seraient tendance – et ce n’est pas si compliqué d’atteindre cet état…
Arrive ensuite la partie chantée par Roméo Elvis : " N’existe pas sans son contraire, une jeunesse pleine de sentiments " - c’est-à-dire une jeunesse tellement pleine de sentiments qu’elle n’arrive plus à les exprimer au risque de passer pour son contraire – une jeunesse vide de sentiments…
" L’ennui est inconditionnel. Je peux ressentir le malaise des gens qui dansent. " L’ennui ferait partie de notre condition humaine (il est inconditionnel) : on ne peut rien contre ce mal être que même les plaisirs de la danse n’arrive pas à camoufler…
D’où cette phrase : " Je peux ressentir le malaise des gens qui dansent ". C’est " La nausée " de Sartre sur le dance-floor…
Cette idée de haut-le-cœur existentiel de la jeunesse d’aujourd’hui, il y a un garçon qui a mis le doigt dessus pour montrer le chemin :