Trois décennies après l’abolition, le 30 juin 1991, des lois ségrégationnistes qui organisaient la domination de la minorité blanche, l’Afrique du Sud reste la société la plus inégalitaire au monde, selon la Banque mondiale : les 20% les plus riches contrôlent près de 70% des ressources.
Même si la fin de l’apartheid a permis l’émergence d’une bourgeoise noire (un quart des super riches sont Noirs), les inégalités sociales dépendent encore largement de la couleur de la peau. Selon les statistiques officielles, 64% des Sud-africains noirs et 40% des métis restent pauvres, contre 6% des Indiens et seulement 1% des Blancs.
Les inégalités se sont même accrues au cours de la dernière décennie, qui a uniquement profité aux 10% de Sud-Africains vivant dans l’opulence, selon l’économiste Murray Leibbrandt de l’Université du Cap. La classe moyenne (35% de la population) et les pauvres (50%) ont vu leurs revenus stagner.
"Depuis la fin des lois racistes, nous avons accès à l’université et nous pouvons habiter et aller partout où nous voulons, note Mmapula Mnisi, une coach en bien-être de 47 ans. Mais il y a encore beaucoup de défis à relever dans le domaine de l’accès à l’emploi, au logement, à l’éducation et à la santé."
Ainsi seulement 10% des Noirs – contre 72% des Blancs -sont couverts par des assurances médicales privées et peuvent s’offrir des soins de qualité. Même si tous les Sud-Africains sont scolarisés, le niveau de l’enseignement public, dans les anciennes écoles réservées aux Noirs, reste bien plus bas que dans les pays voisins.
"Le racisme fait partie de l’architecture de la société sud-africaine"
Les inégalités demeurent aussi criantes dans le paysage urbain : les Noirs pauvres continuent à etre relégués en lointaine périphérie des centres urbains. Rien que les frais de transport constituent un facteur de discrimination et d’exclusion. "Le racisme fait partie de l’architecture de la société sud-africaine depuis le colonialisme et on ne peut dissocier inégalités sociales et raciales", note Shanelle van der Berg, chercheur à la Commission sud-africaine des droits de l’homme.