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Trois roues et des sourires à la pelle, les triporteurs cartonnent dans les maisons de repos

© Capture d’écran Canal Zoom

Par Bruno Schmitz avec Canal Zoom, RTC Liège et TV Lux via

"Ce vélo, c’est formidable. Tu ne fais rien. Tu regardes. Tu as tes cheveux qui bougent un peu (au vent). C’est très chouette", se réjouit une pensionnaire du home Trémouroux de Perwez dans le Brabant wallon. "Ce vélo me rappelle mon jeune temps où j’en faisais beaucoup. Maintenant c’est fini", sourit sa voisine de banc au micro de Canal Zoom. Un banc un peu particulier puisqu’il se situe à l’avant d’un gros vélo à assistance électrique, lui-même entraîné par les jambes et les mollets d’une accompagnatrice.

L’utilisation de vélos qu’on appelle des triporteurs se multiplie dans les homes chez nous. Ils permettent notamment d’offrir un grand bol d’air et une balade à des résidents qui sortent peu de leur chambre ou de leur institution. Un phénomène encore accentué ces dernières années par les confinements dus à la pandémie de Covid. "On a toujours tendance à vouloir mettre un peu les gens sous cloche comme ça", explique la directrice du home Trémouroux Marlène Mangon à Canal Zoom. "Il ne faut pas que les résidents tombent. Il ne faut pas qu’ils se fassent mal. On agit en fait comme on pourrait le faire avec des enfants. Or, on sait tous que le risque zéro n’existe pas. Mais avec ce triporteur tout est fait pour limiter les risques".

>>Retrouvez ici le reportage de Canal Zoom sur le triporteur du home Trémouroux de Perwez

 

"Les retours sont très positifs, tant du personnel, que des résidents et de la famille", ajoute la représentante de l’association qui prête l’engin pendant trois semaines à plusieurs maisons de repos à tour de rôle. A Perwez et ailleurs.

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"Il y a le bon air". "Je ne savais pas qu’il y avait tant de choses à voir dans le village". "Moi je croyais que c’était plus petit que ça". Yolande et Liliane, chacune 88 ans, deux résidentes d’un autre home, à Temploux cette fois dans la commune de Namur, font elle aussi le même genre de balade. Sur le même genre de vélo triporteur. Et avec les mêmes sourires.

>> Le reportage de TV Lux sur le triporteur utilisé au Home Libert à Marche-en-Famenne

 

Ce système est né au Danemark en 2012. En 20 ans, il a conquis 52 pays et la passagère la plus âgée dans le monde qui serait montée sur ce genre de vélo avait tout de même 110 ans. Selon plusieurs associations qui le proposent désormais gratuitement dans des maisons de repos, ce "vélo sans âge" permet à des personnes qui ne peuvent plus se déplacer facilement d'encore bouger et de voir du pays. De prendre le soleil. De profiter de la nature et du vent sur le visage.

 

© Capture d’écran RTC Liège

Le système grandit et s’ouvre à d’autres bénéficiaires…

A Waremme, en Région liégeoise, c’est un particulier qui s’était lui-même équipé d’un triporteur pour proposer des balades, Jean-Paul Gueuns. Aujourd’hui décédé, son engin a été racheté par Pierre Binet, lui aussi de la Région, et qui à son tour transporte des aînés des maisons de repos sur les routes de la campagne hesbignonne. "On fait même concurrence au bus du coin", rigole Pierre au micro de RTC Liège. "Ils sont deux dans ce bus qu’on croise alors que, moi aussi, j’ai la place pour deux personnes sur le vélo".

On fait même concurrence au bus du coin

Des aînés, mais pas seulement. Pierre embarque aussi les résidents d’autres centres ou associations locales qui font appel à lui. Par exemple, le centre du Long Champs, un espace pour personnes porteuses de handicap. Là encore, les sourires sont de rigueur sur la banquette avant du vélo.

>> Découvrez le reportage de RTC Liège sur le triporteur de Pierre Binet à Waremme

… et peut aussi servir à casser les clichés sur son quartier

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A Bruxelles, un quartier est parfois pointé du doigt comme l’un des plus problématiques de la Région. Le quartier Nord, à deux pas de la gare du même nom vit 24h/24, est un haut lieu de la prostitution, connaît pas mal de trafics de drogue et de petite (et parfois plus grande) criminalité. Bref, peut-être pas l’endroit où des personnes âgées se sentent le plus à l’aise. Pourtant, au cœur de ce quartier, on trouve un espace d’activités pour des seniors du coin ou des environs. Et depuis quelques mois, l’association "Biloba" a elle aussi choisi le triporteur à trois roues pour faire bouger les aînés qui la fréquentent. Sauf qu’ici, ces balades dans des ruelles où on retrouve des dames prostituées en vitrine, ont une autre utilité : casser les clichés, voir de ses propres yeux ce qui se passe dehors, se faire remarquer par les habitants et ceux qui fréquentent les alentours et, parfois aussi, échanger avec eux un petit mot ou un signe de la main.

Depuis plusieurs années, certaines dames prostituées dans notre rue sont même devenues des amies et sont par exemple venues participer à des barbecues avec nos résidents

L’objectif final est de freiner les peurs des seniors face tout ce qu’ils lisent ou entendent sur le quartier Nord. "Et ça marche", explique Sophie Hecq la directrice de Biloba. "Depuis plusieurs années, certaines dames prostituées dans notre rue sont même devenues des amies et sont par exemple venues participer à des barbecues avec nos résidents".

Vers un nouveau vélo où les résidents sont même actifs ?

© Capture d’écran Canal Zoom

Ces dernières semaines, deux jeunes rhétos de Perwez en Brabant wallon, ont été encore plus loin. Pour leur travail de fin d’études au collège Da Vinci, Nino et Zakaria testent des balades avec les résidents seniors du Val d’Orbais. Mais ils n’utilisent pas un triporteur électrique, plutôt un gros vélo biplace jaune. "Ici, c’est un vélo où le résident peut être actif. Ce qui est beaucoup plus intéressant pour la kiné chez nous", détaille la directrice du Val d’Orbais Valérie Dangremont à Canal Zoom, "par rapport à un triporteur classique, plus passif".

>> Le reportage de Canal Zoom sur le projet de deux jeunes perwéziens pour équiper un home d’un vélo pas comme les autres

 

Les deux jeunes sont voisins du home et ont eu l’idée du projet en regardant simplement par la fenêtre pour constater que leurs voisins aimeraient peut-être avoir l’opportunité de bouger un peu plus. Le vélo à assistance électrique qu’ils utilisent pour leurs balades n’a que deux places. Une pour le pilote/accompagnateur et l’autre pour le résident qui s’installe à ses côtés. Un résident qui a la possibilité de pédaler s’il le souhaite.

On s’était dit avec Nino que, quand nous aussi on sera âgés, ce serait sympa d’avoir un truc comme ça dans le home si on y vit

 

L’expérience a visiblement porté ses fruits auprès des seniors. "C’est très agréable. La première fois où j’ai eu l’occasion de le faire, j’ai été très content. Comme un enfant", confie Marc derrière sa barbe blanche et son manteau multicolore. Les deux jeunes voudraient maintenant pérenniser ce test et pouvoir acheter le vélo pour la maison de repos. "C’est presque 13.000 euros", explique Zakaria. "C’est un gros travail. On a lancé un financement participatif et on fait tout ce peut pour essayer de récolter cette somme. On s’était dit avec Nino que, quand nous aussi on sera âgés, ce serait sympa d’avoir un truc comme ça dans le home si on y vit".

Les jeunes tenteront de récolter la somme d’ici à la fin du mois de juin et la fin de leur rhéto. Ils cherchent aussi des bénévoles pour piloter le vélo et accompagner les seniors en balade.

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