Avec Joe Biden s’ouvre une nouvelle ère, celle des faits et de la vérité. C’est en tout cas ce qu’il a martelé lors de son discours d’investiture : “Tous les désaccords ne doivent pas mener à la guerre totale. Et nous devons rejeter la culture où les faits eux-mêmes sont manipulés, et même inventés.” “Il y a la vérité et il y a les mensonges, a-t-il ajouté, les mensonges prononcés pour le pouvoir et pour le profit. Et chacun d’entre nous a le devoir et la responsabilité en tant que citoyens, qu’Américains, et particulièrement en tant que dirigeants […] de défendre la vérité et de combattre les mensonges ".
Pouvoir parler des preuves, de la science, c’est libérateur
Dès le lendemain, jeudi, l’immunologue américain Anthony Fauci, expert en maladies infectieuses du gouvernement américain sous Trump et désormais conseiller du Président Biden sur la pandémie, s’exprimait en ces mots devant un parterre de journalistes, dans la salle de presse de la Maison Blanche : "L’idée de pouvoir venir ici, parler de ce que l’on connaît, des preuves, de la science, est un sentiment libérateur."
Plus de clarté
Le réseau international de fact-checking vient par ailleurs d’être nommé pour le Prix Nobel de la paix. La coïncidence est fortuite mais osons la question : peut-on se dire que l’ère des “fake news” à la Donald Trump est révolue ? Commençons par utiliser le terme exact : “désinformation”. Le terme “fake news” a été popularisé par Donald Trump lui-même qui l’utilise pour étiqueter des faits qu’ils rejettent, et pour dénoncer les “fake news media”, ces médias dominants qui lui veulent tant de mal, comme le New York Times, le Washington Post ou CNN.
“C’est Trump qui disait “Fake News” aux journalistes qui le contredisaient, explique Marie Peltier, historienne spécialiste du complotisme. Ce qui était particulier avec Trump, c’est que c’était le pouvoir lui-même qui faisait de la désinformation. Joe Biden se place, lui, du côté de la vérité, des faits. Quelque part ça va apporter plus de clarté aux citoyens.”
Les complotistes vont accuser Joe Biden
“Il va y avoir comme un effet miroir, poursuit-elle, cela va s’inverser : ce sont les sphères complotistes qui vont accuser Joe Biden de mentir. Il va y avoir des contre-récits qui vont s’opposer à celui de la Maison Blanche.”
Les réseaux complotistes sont internationaux et sont actifs depuis très longtemps. Le changement de pouvoir politique ne va donc pas tout changer. Ce que Marie Peltier appelle “l’imaginaire de la défiance” (la remise en question de la parole scientifique, médiatique…) imprègne toute la société américaine, et bien au-delà.
Un travail titanesque
Donald Trump n’est, selon elle, que le signe que le complotisme est devenu majoritaire dans nos sociétés, il n’en est pas la cause. “Le fait de ne plus avoir ce type de discours à la tête de la première puissance mondiale est une bonne chose, mais la position de Joe Biden est fragile. La moitié du pays est prise dans la désinformation. Il va devoir recréer la confiance, redonner confiance aux institutions au sens large, aux médias, au système judiciaire, à la science.” Le travail est titanesque, aux Etats-Unis comme ici.