Les Emirats créent un fonds d’investissement doté de 10 milliards de dollars ciblant des secteurs stratégiques en Israël. Santé, énergies renouvelables, agronomie, dessalement d’eau, sécurité, les accords et les contrats sont conclus les uns après les autres. Une convention fiscale est signée pour éviter les doubles impositions et stimuler encore les investissements.
Clients de Pegasus
La vente par Israël de technologie de sécurité et de surveillance, drones, logiciels, intelligence artificielle, lui a permis d’établir des relations discrètes avec nombre de pays arabes avides de ces moyens de contrôle, avant même leur officialisation.
Une enquête journalistique internationale a révélé que les EAU font partie des clients de la firme israélienne NSO et utilisent son logiciel espion Pegasus, tout comme Bahreïn, le Maroc et l’Arabie saoudite. Les Emirats sont à la pointe de la lutte contre les Frères musulmans et contre les soulèvements pro démocratie qui secouent la région depuis 10 ans.
Des débats difficiles
Les affrontements entre Palestiniens et forces israéliennes ont cependant troublé la lune de miel israélo-émiratie. Les violences sur l’Esplanade des Mosquées, les tentatives d’expulsions de Palestiniens de Jérusalem-est et les 260 Palestiniens tués au mois de mai dans la bande de Gaza choquent les opinions publiques arabes.
Ces évènements ont suscité des débats "pas faciles" avec les partenaires commerciaux émiratis, de l’aveu même d’une représentante israélienne à Dubaï, Fleur Hassan-Nahoum. "Il y a eu des discussions qui rendaient mal à l’aise, mais c’était important d’en parler", a-t-elle avoué. Nouer une relation d’amitié après tant d’années de tensions, "je pense que ça va prendre du temps", a-t-elle admis.
Trahison pour les Palestiniens
L’établissement de relations officielles entre plusieurs pays et Israël a fait éclater le bloc arabe qui mettait cette normalisation des relations dans la balance en échange d’une solution juste à la question palestinienne. Les responsables palestiniens ont eu beau hurler à la trahison, leur cause a été mise au second plan par ces dirigeants.
Un pays a refusé obstinément de franchir le pas, malgré les multiples pressions américaines et israéliennes : l’Arabie saoudite a maintenu sa position traditionnelle. La question a pu diviser la famille des Saoud. Le prince héritier MBS n’avait pas caché son ouverture à un rapprochement avec Israël. Son père, le roi Salman, 85 ans, est intervenu pour rappeler que le soutien à la cause palestinienne et la défense de Jérusalem constituent des obligations du pays.
La différence saoudienne
Ce fut l’occasion pour les Saoudiens de marquer leur différence avec les Emiratis. Les relations entre les deux monarchies se sont tendues ces dernières années, après une période de grande convergence de vues. Les anciens partenaires sont progressivement devenus des concurrents pour la prééminence économique et politique dans le Golfe. Cette nouvelle rivalité pousse les Saoudiens à stigmatiser la politique de normalisation avec Israël. En juillet, le royaume a décidé de surtaxer à l’importation les produits comportant des composants Made in Israel.
Un an après, la normalisation des relations entre les Emirats Arabes Unis et Israël provoque encore des remous, mais elle a brisé un tabou et permis le développement de projets manifestement très attendus de part et d’autre. Cette étape laisse sur le bas-côté un grand perdant : les Palestiniens. Ils ont appris qu’ils ne doivent plus compter sur la solidarité arabe pourtant si souvent proclamée. Leur revendication de création d’un Etat au côté d’Israël, officiellement soutenue par la communauté internationale, paraît plus lointaine que jamais.