C’est une journée sombre qu’ont vécu le dimanche 8 mai, les habitants de la localité de Banyali-Kilo, dans le territoire de Djugu en Ituri, une province de l’Est de la République démocratique du Congo placée sous état de siège depuis pratiquement un an.
En effet, il s’agit d’un campement d’orpailleurs (des ouvriers qui recherchent des paillettes d’or dans les cours d’eau) qui a été pris d’assaut par les miliciens la Coopérative pour le développement du Congo (CODECO) entre 3 heures et 5 heures du matin.
" Ils ont barricadé le camp et se sont mis à massacrer systématiquement ! ", se désole Jean-Pierre Bikilisende, bourgmestre de la commune de Mungwalu, une municipalité qui se situe à 7 kilomètres du lieu du drame.
" Dans ce camp, vivaient des orpailleurs et leurs familles ", poursuit-il, affirmant que pour l’instant, le bilan est difficile à établir : " ce matin, le bilan commence à s’alourdir. Hier on a su évacuer trente-deux corps, hier même pendant qu’il pleuvait on a rassemblé d’autres corps. Ce matin, on continue à fouiller et les services sur place nous parlent déjà de plusieurs autres corps qu’on a retrouvé en brousse et quatre blessés viennent de décéder à l’hôpital ", indique-t-il dans une interview accordée à la RTBF.
Le camp a " complètement " été incendié, d’après notre source. Parmi les victimes, se trouvent des femmes et enfants. Les blessés graves ont été transférés dans la ville de Bunia, chef-lieu de l’Ituri grâce à un hélicoptère de la mission des Nations-Unies, la MONUSCO.
" Un crime odieux "
Le cabinet du président Félix Tshisekedi avance avec précision le bilan de trente-cinq personnes tuées, tout comme le Baromètre Sécuritaire du Kivu, un projet du Groupe d’études sur le Congo (GEC). Un crime qualifié " d’odieux " par le cabinet du président Félix Tshisekedi.
" Le Président de la République condamne avec fermeté ce crime répugnant et odieux, il présente ses condoléances les plus émues aux familles éplorées et réitère son engagement à éradiquer tout mouvement d’insurrection sur le sol congolais ", indique la Présidence sur Twitter.
Entre deux feux
Ce camp attaqué n’est pas entièrement contrôlé par les soldats des Forces Armées de la République démocratique du Congo, en raison de l’interdiction aux militaires de fréquenter les carrières minières. Mais dans un communiqué dont une copie a été transmise à la RTBF, l’armée affirme que les civils tués se sont retrouvés au mauvais endroit, au mauvais moment, entre deux feux de deux groupes armés qui s’affrontaient.
" Il y a une carrière de mine d’or qui est exploitée artisanalement à 7 km de Pluto, appelée Camp Blanquette. Deux groupes armés se disputent le contrôle de cette carrière, à savoir les milices CODECO et Zaïre ", écrit le lieutenant Jules Ngongo, porte-parole de l’armée en Ituri.
" Malheureusement, pendant leur sale besogne, certaines personnes se sont retrouvées entre deux feux de ces hors-la-loi et dont plusieurs ont perdu la vie et leurs cases brûlées ", poursuit l’armée qui assure que ces actes ne resteront pas impunis et dit avoir mis en place des dispositifs pour sécuriser la population.
Le 6 mai, l’état de siège a totalisé un an, depuis son entrée en vigueur dans les provinces meurtries du Nord-Kivu et d’Ituri. Un régime spécial instauré par le président Tshisekedi pour mettre un terme aux tueries, mais un an après, celles-ci se sont accentuées et des appels à le lever ne cessent d’augmenter.