Un influenceur misogyne arrêté pour viols en Roumanie : qui est Andrew Tate, ancien boxeur reconverti dans le porno et les "conseils" aux garçons ?

En Grande-Bretagne, cet ancien kickboxeur a bâti sa réputation en participant à la téléréalité Big Brother en 2016.

Devenu depuis, selon ses propres dires, multimillionnaire, il s’est autoproclamé gourou de la réussite et de l’argent facile, faisant de la misogynie son fonds de commerce et s’imposant comme le champion de la "manosphere", le monde de la masculinité violente, notamment sur TikTok.

L’enquête en Roumanie où il réside depuis plusieurs années commence déjà il y a plusieurs mois, mais il semble que ce soit une récente passe d’armes sur Twitter avec Greta Thunberg qui ait précipité son arrestation ainsi que celles de son frère Tristan et de deux personnes de nationalité roumaine.

Andrew Tate avait attaqué la militante pro environnement suédoise sur les réseaux sociaux, se vantant de sa collection de voitures sportives et super-polluantes, 33 bolides de luxe dont des Ferrari 812 et une Bugatti quad-turbo.

La réponse de Greta Thunberg se moquant de la taille de son pénis ("smalldickenergy@getalife.com" comme adresse mail fantaisiste) a provoqué une réplique sous la forme de cette vidéo Twitter où Andrew Tate s’exhibe sans craindre le ridicule en peignoir Versace, fumant le cigare et se faisant servir des pizzas livrées par une chaîne roumaine connue.

Ce dernier indice aurait déclenché la descente de police, ce que dément le parquet car une autre vidéo Twitter indique la présence de l’influenceur dans les montagnes roumaines peu de jours avant. A la nouvelle de son arrestation, la militante suédoise a tweeté ironiquement vendredi matin: voilà "ce qui arrive quand on ne recycle pas ses emballages de pizza".

La presse roumaine précise que l’enquête du parquet anti-mafia DIICOT porte sur des soupçons de trafic d’êtres humains et de viols et d’association de malfaiteurs en vue de trafic de drogue.

Selon Semafor, les suspects auraient utilisé la technique du "lover boy", une façon d’attirer les jeunes femmes en les embobinant romantiquement pour ensuite abuser physiquement et mentalement d’elles dans des vidéos pornographiques destinées à des sites spécialisés payants. Jusqu’à présent, 6 victimes ont pu être identifiées. Dupées par les deux hommes qui simulaient des sentiments à leurs égards et les auraient ensuite séquestrées, elles auraient été forcées par la violence à la prostitution et à la production de films pornographiques.

Cette vidéo de la police roumaine montre son intervention au domicile bucarestois d’Andrew Tate. On y voit notamment des armes de poing, des couteaux et des dagues, des liasses de billets ainsi que sa collection de voitures de luxe.

Les débuts de l’enquête remonteraient au mois d’avril, lorsqu’une première perquisition a eu lieu au domicile d’Andrew Tate, déjà emmené à l’époque pour interrogatoire. Selon la presse roumaine, deux femmes, dont une citoyenne américaine, avaient été libérées d'une villa de Bucarest par la police. Elles avaient affirmé y être retenues de force par les deux frères britanniques. 

Avant de devenir influenceur, Andrew Tate, citoyen britannique né aux Etats-Unis, d’où son accent, était kickboxeur et a remporté quatre titres mondiaux. Il a aussi travaillé dans la production télé.

Andrew Tate s’est rendu célèbre par un discours extrêmement misogyne, doublé de vues machistes et de mépris de classe. Il affirme que les femmes doivent rester à la maison, qu’elles sont la propriété de l’homme ou qu’elles ne sont bonnes qu’à préparer le petit-déjeuner ou qu’elles ne doivent pas conduire comme dans ce Twitch…

Le site sportif AS a répertorié d’autres sorties de route d’Andrew Tate qui s’est également fendu de comparaisons douteuses avec les chiens ou les enfants ou de déclarations vantant la corruption en Roumanie et l’argent rapidement gagné comme valeur.

Il prétend aussi que les femmes qui se font violer devraient en "porter la responsabilité" ou qu’il préférait les femmes de 18-19 ans à celles de 25 car il pouvait y laisser son "empreinte"…

Des sorties qui prônent parfois la violence à leur égard. "Un bon coup de machette, boum dans son visage et tu la saisis par le cou. Et 'Tais-toi salope'", dit-il dans une vidéo. C’était aussi pour avoir frappé une femme dans Big Brother que Tate avait été débarqué de la production, ce qu’il dément.

Ces déclarations font des millions de vues : près de 12 milliards sur TikTok, plus de 4,7 millions d’abonnés Instagram, un site pompeusement intitulé "Hustler’s University" avec des conseils pour réussir et devenir millionnaire en investissant dans les cryptomonnaies et qui recrute via un curieux système pyramidal…

Sa marque de fabrique : la controverse. "Ce que vous voulez idéalement, c’est un mélange de 60 à 70% de fans et de 40 à 30% de haters. Vous voulez des disputes, vous voulez la guerre".

Andrew Tate cultive un humour bien à lui, badin au premier abord, mais en permanence porteur de haine et de violence qui se présente comme l’antidote à ce qu’il appelle la "cancel culture".

Des podcasts et des vues qui rapportent aussi beaucoup d’argent mais qui suscitent l’inquiétude quant à son influence sur les jeunes garçons.

Ses performances sur les réseaux l’ont notamment rendu populaire dans les milieux d’extrême droite américains. Il ne cache d’ailleurs pas sa sympathie pour l’ancien président Trump ou son soutien au chantre du Brexit Nigel Farage.

Ajoutez à cela sa participation à un podcast conspirationniste, des liens avec un activiste anti-Islam, des insultes, dérapages homophobes et une passion pour les armes et les voitures rapides…

Toute cette rhétorique lui a valu depuis 2017 et le mouvement #MeToo des exclusions de plusieurs réseaux sociaux dont YouTube, Facebook, Instagram et Twitter.

Cela ne l’a pas réduit au silence, au contraire, ses fans, parfois très jeunes, surtout masculins et originaires des Etats-Unis et de Grande-Bretagne, se chargeant de relayer sa parole, essentiellement sur TikTok. C’est l’arrivée d’Elon Musk à la tête de Twitter qui lui a permis de réintégrer cette plateforme, au nom de la liberté d’expression.

Etrangement, depuis un an, les vidéos d’Andrew Tate ont connu une belle croissance du nombre de vues, surtout sur TikTok, et particulièrement ces dernières semaines. Des vidéos qui ne sont pas postées par Andrew Tate qui ne semble pas actif sur la plateforme, mais par ses "followers", les membres payants de son "Hustler University".