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Un printemps (météorologique) historiquement sec, où il pleut trois fois moins que la normale: à quel point faut-il craindre cette sécheresse?

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Par Xavier Lambert

"Extrêmement sec". C’est la prévision qui concerne 90% du territoire belge dans les dix jours à venir, l’extrême Est (Fagnes et cantons) et l’extrême Sud (Gaume et sud du Luxembourg) semblant un peu épargnés.

Le temps sera à nouveau sec, comme il l’a été depuis plusieurs semaines, ce qui pourrait faire de la période actuelle la période la plus sèche, à cette époque-ci de l’année, de ces 50 dernières années. C’est ce que nous a confirmé Pascal Mormal, climatologue à l’Institut Royal de Météorologie.

"Oui, on est effectivement dans une configuration de sécheresse extrême pour ce qu’on appelle le printemps météorologique, qui va du 1er mars au 31 mai, on observe un déficit de précipitation historique. Les normales saisonnières sont de 121,2l / m2, et on est à 40,2 litres. C’est le tiers de ce qu’on devrait avoir !"

Pour retrouver un printemps plus sec, le météorologue a dû remonter à… 1893 : "Là on était à 37,6l/m2. Même lors de la célèbre sécheresse de 1976, on était à 69 litres de moyenne pour l’ensemble des 3 mois. Mais comme on est à 40,2 en ce moment et qu’on ne prévoit pas vraiment de grosses périodes de pluies à venir, ce n’est pas exclu qu’on soit encore en dessous".

Une sécheresse pire qu’en 1976 ?
Une sécheresse pire qu’en 1976 ? © IRM

Ce qui pourrait faire remonter un peu cette pluviométrie, ce sont quelques orages annoncés suite aux très grosses chaleurs qu’on prévoit sur notre pays dès la semaine prochaine : "Cela pourrait apporter un peu de soulagement aux agriculteurs, mais le problème des orages, c’est qu’ils sont souvent très localisés, et ne concernent donc pas l’ensemble du territoire. En plus, ce n’est pas ce qu’on appelle des "bonnes pluies", car elles sont trop intenses, sur des sols secs, et donc l’eau ruisselle au lieu de pénétrer dans les sols".

La bonne recharge de pluie, nous explique Pascal Mormal, c’est justement au début du printemps, des pluies continues, sur plusieurs jours, quand la végétation n’est pas encore trop dense pour retenir l’eau. Là, elle n’a pas eu lieu, et les prévisions ne sont pas optimistes : "On va vers de l’extrêmement sec. On renoue avec ce qu'il s’est passé de 2017 à 2020".

Les quatre types de sécheresse

De quoi nous inquiéter ? Oui et non. "La sécheresse, c’est difficile à définir, car il y a plusieurs types de sécheresse" :

  • la sécheresse météorologique : c’est le simple déficit de précipitations, constaté par rapport à la moyenne des années précédentes.
  • la sécheresse agricole, "C’est la deuxième phase, les sols en souffrent" et les cultures poussent moins à cause de ce déficit d’eau en surface, et d’une terre trop sèche.
  • la sécheresse hydrologique : "C’est au niveau des nappes phréatiques": si la sécheresse perdure, elles sont impactées, et l’approvisionnement en eau potable peut être problématique selon certaines régions. Heureusement selon les spécialistes, ce risque est provisoirement écarté grâce aux pluies exceptionnelles de 2021, qui a été à l’inverse une année exceptionnellement humide, avec les inondations qu’on a connues l’été, mais aussi un hiver particulièrement humide.
  • la sécheresse socio-économique : "C’est quand toute l’économie est perturbée, c’est ce qui est arrivé en 1976". Même les entreprises avaient alors du mal à fonctionner, par manque d’eau. La protection civile, et les pompiers devaient se déplacer avec les autopompes. "Mais c’était lié à un déficit d’eau observé aussi à la fin 1975", fait remarquer Pascal Mormal.
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Pour le moment, malgré cette période de pluviosité historiquement basse pour la saison, la situation n’est pas encore inquiétante au niveau des nappes et de l’approvisionnement en eau potable. Mais la période de sécheresse va-t-elle se prolonger ? Oui, dans les 10 prochains jours, malgré la possibilité de quelques orages : la plus grande partie du pays va basculer vers l’extrêmement sec. Mais après ? "Les modèles saisonniers, ce sont des indications dans de très grandes lignes. Il semblerait qu’on aille vers un été plus chaud et plus sec, mais c’est difficile à dire", nous indique Pascal Mormal.

Une sécheresse historique qui ne concerne en tout cas pas que la Belgique : "Une grande partie de la France est tout aussi impactée, en particulier le Sud-est, qui connaît un très gros déficit de pluie alors qu’eux n’ont pas connu nos grosses pluies d’hiver, la situation est donc plus critique pour eux". 

Sur le même sujet : extrait du JT du 11/05/2022

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