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Un vent glacial souffle en ce moment sur les relations Europe-Russie

European Union Vs Russia. Close-Up Of Man Holding Eu And Russian Flag.

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Les ingérences russes dans la politique des pays occidentaux ont encore refroidi les relations entre l’Europe et la Russie. Cette semaine, le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, a accusé Moscou d’alimenter une dynamique d’escalade. L’expression " guerre froide " a même été entendue au Parlement européen.



"Guerre froide", ces mots réveillent instantanément tout un imaginaire: le "rideau de fer" qui coupait l’Europe en deux avec, à l’Est, le bloc soviétique, les échanges d’espions sur le pont de Glienicke à Berlin, l’ambiance aussi des polars de John Le Carré comme dans "L’espion qui venait du froid".


C’est le russe Mikhail Khodorkovski qui a parlé de "guerre froide " cette semaine. C’était lors d’une audition en visioconférence avec des parlementaires européens. Khodorkovski, l’ex-oligarque, qui a passé 10 ans dans des prisons russes, devenu un des principaux opposants du président Poutine.


A quoi ressemble cette " guerre froide " moderne ?


Il s’agirait d’ingérences russes dans la politique des pays occidentaux. Pour Mikhail Khodorkovski, il y a des contacts entre le Kremlin et des politiciens européens, y compris de haut niveau. Il dénonce des activités ennemies qui sapent les politiques en provoquant des conflits, de la corruption et des intimidations physiques.


Mikhail Khodorkovski se base sur un rapport de Dossier Center, un projet d’investigation qu’il a fondé et qui est axé sur les activités criminelles de personnes proches du Kremlin. Face aux eurodéputés, l’opposant a illustré cette menace russe avec de nombreux exemples, pays par pays. A commencer par l’Allemagne.

L’Allemagne est un des états les plus attaqués par le Kremlin. Des responsables russes ont des liens avec des dizaines de parlementaires allemands pour promouvoir l’agenda politique russe.

Khodorkovski cite une série de noms comme celui de Vladimir Iakounine, un ancien patron des chemins de fer russes qui aurait " pénétré le cercle de la chancelière Merkel ". Ou celui d’Evgueni Prigojine, un puissant homme d’affaires qui a cherché à embrouiller les relations entre la France et l’Italie. D’autres cas d’ingérence concerneraient aussi l’Autriche, la République tchèque, la Grèce, la Pologne ou encore les pays Baltes.

 

Un dossier qui révèle l’ampleur des pratiques d’ingérence imputées à Moscou

Depuis un moment la Russie est pointée du doigt pour des opérations d’empoisonnement ou de sabotage en Europe. Il y a eu quelques affaires retentissantes comme l’empoisonnement de Sergueï Skripal, ancien agent des renseignements russes, au Royaume-Uni en 2016 ou l’explosion d’un entrepôt d’armes en République tchèque en 2014, une affaire qui provoque de vives tensions diplomatiques en ce moment entre Prague et Moscou.
Mais ce qui est interpellant dans le témoignage de Mikhail Khodorkovski, c’est l’ampleur des pratiques d’ingérence imputées à Moscou. Pratiques auxquels il faudrait ajouter les campagnes de désinformation sur internet. Le mois dernier, le service diplomatique de l’Union européenne accusait Moscou (et Pékin) de vouloir " saper la confiance dans les institutions européennes " et, en ces temps de lutte contre le covid, de saper aussi la confiance dans les vaccins occidentaux.


Comment contrer la menace russe ? Quelles sanctions l’Europe pourrait prendre pour défendre ses intérêts ?


Mikhail Khodorkovski conseille aux Européens d’adopter des sanctions ciblées : viser les personnalités proches de Poutine qui financent " les aventures " du régime. Ce que l’Europe fait déjà en partie.

Il faudrait aussi, selon lui, frapper des projets à caractère économique et politique, comme le Nord Stream 2. Ce projet de gazoduc entre la Russie et l’Allemagne divise les Européens. La semaine dernière, à notre micro, la commissaire européenne Vera Jourova a clairement laissé entendre qu’elle était favorable à l’arrêt de ce projet. Mais jusqu’ici, dans ce dossier, l’intérêt économique allemand éclipse le déploiement d’une politique étrangère européenne forte et cohérente.
Et ça, le président Vladimir Poutine ne l’ignore pas. Il joue de ces divisions européennes et nous envoi, sourire en coin, ses bons baisers de Russie.

Réécouter l’œil européen de Sandro Calderon

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