Andrena lagopus ou andrène deux-cellules a été observée à deux reprises dans le Namurois, fin avril du côté de Gesves et début mai près de Gembloux.
C’est une surprise pour les entomologistes, normalement cette espèce d’abeille vit bien plus au sud. "C’est une preuve supplémentaire, s’il en faut encore du réchauffement climatique" annonce Jean-Sébastien Rousseau Piot, entomologiste chez Natagora. "Normalement, elle vit dans le pourtour méditerranéen. Elle vient d’être découverte chez nous, va-t-elle s’installer durablement ? On verra bien dans les prochaines années".
Une abeille spécialisée
La première abeille capturée se situait à côté d’un champ de colza. "La particularité de cette abeille est qu’elle est spécialisée dans les fleurs de plantes crucifères comme le colza ou la moutarde. En dehors de cette particularité, c’est une andrène, elle fait donc partie de l’espèce d’abeille sauvage la plus courante chez nous. En Belgique, on comptabilise environ 80 andrènes différentes".
"Faucher c’est vider son assiette"
L’andrène deux-cellules, comme les autres andrènes, niche dans la terre. "Imaginez-vous un si petit insecte faire l’effort de creuser un petit terrier. Evidemment, elle va creuser à proximité d’une source de nourriture pour s’épargner de longs déplacements. Si on fauche, on vide son assiette. Elle va abandonner son nid. Aura-t-elle la force d’en construire un deuxième ? Pas sûr. Ce phénomène invisible se passe partout, tout le temps". L’entomologiste insiste sur l’importance d’une gestion différente des espaces verts, et surtout fleuris, que ce soit chez le particulier ou dans les espaces publics. "Il faut laisser les fleurs pour que les insectes puissent manger. Si les insectes mangent, les oiseaux mangent. Laisser les fleurs, c’est agir sur tout cela. Idéalement, il faut laisser les fleurs monter en graines pour qu’elles se ressèment".
"Sauvons nos pollinisateurs"
Ce message de prévention et bien d’autres ont été portés pendant quatre ans par un projet européen nommé "Sauvons nos pollinisateurs". Il s’étendait sur le nord de la France, une partie de la Wallonie et la Flandre. Le but était d’appliquer les mêmes mesures de sensibilisations notamment chez les particuliers, de sauvegardes, de partages des connaissances et des observations de part et d’autre de la frontière. Le projet a été lancé le 1er avril 2016 pour se clôturer le 31 mars 2020. "C’était un premier pas. Il faut aller plus loin. Les mentalités commencent à peine à changer. Il y a encore beaucoup à faire".