US Open

US Open – Ils ont réussi le Grand Chelem calendaire (2/2) : Rod Laver

Rod Laver à Wimbledon

© AFP

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Par Christine Hanquet

Novak Djokovic n’est peut-être qu’à quelques jours d’un immense exploit. S’il gagne encore trois matches à New York, il réussira le Grand Chelem calendaire. Il aura remporté les quatre tournois majeurs la même année. Après ses victoires à l’Australian Open, à Roland-Garros, et à Wimbledon, il doit s’imposer à l’US Open pour rejoindre deux autres champions dans la légende. Seuls l’Américain Donald Budge et l’Australien Rod Laver y sont arrivés.

Quand le tennis est né, quand quatre événements sont devenus les plus importants du calendrier, on ne parlait pas encore de tournois du Grand Chelem. "Grand Chelem" était une expression réservée au bridge. Vers 1910, elle apparaît pour la première fois dans le monde du sport, en baseball. Puis, elle est utilisée en golf.

La plupart du temps, ce sont des journalistes qui font naître les termes sportifs qui nous sont aujourd’hui familiers. En 1933, deux chroniqueurs du "New York Times" parlent pour la première fois de "Grand Chelem" en tennis. L’Australien Jack Crawford a gagné les trois premiers tournois majeurs de la saison, et il faut trouver une façon d’évoquer la razzia qu’il s’apprête peut-être à réussir. Ce sera le "Grand Chelem". Mais il ne va pas le réaliser, et l’expression tombe auxoubliettes. Jusqu’en 1938, quand Donald Budge s’adjuge les quatre grands titres. Il réussit le Grand Chelem, et chaque épreuve est désormais appelée "tournoi du Grand Chelem".


>> Donald Budge, le premier homme à réussir le Grand Chelem calendaire, en 1938


Il faudra attendre vingt-quatre ans pour qu’un homme truste à nouveau toutes les victoires en Australie, en France, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis.

Cet homme, c’est l’Australien Rod Laver. Il est né en 1938, l’année du seul Grand Chelem réussi jusqu’à présent, par Donald Budge. Et lui, il va gagner deux Grands Chelems calendaires. Dans des conditions très différentes.

Rod Laver

1962, un Grand Chelem chez les amateurs

A l’époque, le tennis vit toujours dans deux mondes diamétralement opposés. Il y a les amateurs, qui ont le droit de participer aux tournois du Grand Chelem et à la Coupe Davis. Et il y a les professionnels, qui ont le droit de gagner pas mal d’argent dans d’autres épreuves. Il va sans dire que cette situation appauvrit les deux circuits, et prive ce sport de nombreux duels au sommet.

Les Australiens dominent le tennis mondial. Et Rod Laver, qui a appris à jouer dans la ferme familiale, fait rapidement partie des meilleurs, parmi ces Australiens. Il gagne son premier tournoi du Grand Chelem dans son pays, en 1960. Et le deuxième, l’année suivante, à Wimbledon.

Il sait tout faire, il a le tennis le plus complet jamais observé dans l’histoire. Il "voit" le jeu comme personne. Il est petit, mais très technique, vif, précis, et puissant quand il le faut.  Au filet, il n'a pas d'égal.  On le surnomme "The Rocket", "La Fusée". Bref, il est le meilleur.

Et cela se confirme en 1962, quand il gagne les quatre tournois les plus importants du monde. Il est le deuxième homme à réussir le Grand Chelem. Et son succès ne lui monte pas du tout à la tête. "C’était génial d’avoir tout gagné, mais je n’avais pas l’impression d’être le meilleur pour autant. J’avais juste réussi une bonne saison".

Rod Laver à Wimbledon

Changement de statut

Pour avoir gagné tous ces tournois, il n’a reçu que quelques bons d’achat, puisqu’il joue chez les amateurs. En 1963, il décide de passer chez les professionnels. Les tournois du Grand Chelem lui sont désormais interdits.

Il va donc bien gagner sa vie, mais pas étoffer son palmarès en "majeurs". De 1963 à mi-1968, il loupe vingt et un tournois du Grand Chelem. Rod Laver est l’une des raisons pour lesquelles désigner "le meilleur joueur de l’histoire", et vouloir comparer les époques, n’a pas beaucoup de sens. Personne ne saura jamais combien de trophées il aurait pu ajouter à sa collection s’il avait tout joué pendant ces cinq ans d’absence.

En mai 1968, le tennis fait sa révolution. Il n’y a plus de distinction entre les amateurs et les professionnels, et ce sport devient "open". Rod Laver (comme les autres) peut à nouveau participer aux tournois du Grand Chelem.

Tout recommence à Roland-Garros, où il atteint la finale. Quelques semaines plus tard, il s’impose à Wimbledon.

Rod Laver aujourd'hui

1969, le seul Grand Chelem de l’ère Open

Rod Laver va tout gagner l’année suivante, en 1969. Dix-huit titres, dont les quatre tournois du Grand Chelem. Et cette fois, il affronte les meilleurs joueurs du moment, les Roy Emerson, Fred Stolle, Tony Roche, Ken Rosewall, John Newcombe, Andres Gimeno, Arthur Ashe, Stan Smith, Tom Okker, des noms encore connus aujourd’hui. Et il les bat tous.

Son parcours épouse les contours de sa vie personnelle. Il téléphone à sa femme, après sa finale victorieuse en Australie. Elle lui apprend qu’elle attend leur premier enfant. Le bébé, un garçon, naîtra quelques jours après l’US Open, quelques jours après le deuxième Grand Chelem calendaire réussi par son papa.

Le joueur australien ne gagnera plus de tournoi majeur en simple, après cela. Son compteur est donc fixé à onze victoires en Grand Chelem. Dont neuf lors de compétitions jouées sur son terrain préféré, le gazon. A cette époque, seul Roland-Garros se jouait sur une autre surface, la terre battue.

C’est une différence importante entre le tennis d’alors et le tennis actuel, entre les performances de Rod Laver et l’exploit que vise Novak Djokovic. Si le Serbe réussit le Grand Chelem calendaire en 2021, il aura gagné sur trois surfaces différentes, le dur, la terre battue, et le gazon.

Rod Laver a aujourd’hui 83 ans. On le voit encore régulièrement dans les tribunes de tous les tournois du Grand Chelem. Notamment dans celles de la "Rod Laver Arena", le court central de l’Australian Open, à Melbourne.

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