La peur de l’homme
Pourtant la France, contrairement aux autres pays d’Europe, parvient ces deux dernières années à non pas à la réduction mais à la stagnation des prédations sur le bétail. En partie au moins "grâce" aux tirs de loups légaux mais aussi "la participation illégale de bergers, chasseurs", selon le berger Sylvain Rigeade. Ils en tueraient près d’une centaine supplémentaire selon les estimations d’une étude récente. Mais encore une fois, les défenseurs du loup remettent ces prélèvements en cause. Cette politique déstabiliserait les dynamiques de population et mettrait en péril la survie même du loup à long terme dans le pays : "Il n’y a nulle part où ça se passe bien avec le loup, défend Michel Meuret, chercheur à l’INRAE, l’institut national français de recherche public œuvrant pour un développement cohérent et durable de l’agriculture, l’alimentation et l’environnement. Nous avons regardé dans pleins de pays jusqu’en Asie centrale, la cohabitation est toujours conflictuelle". L’Italie est pourtant souvent citée en exemple… "Oui, si on considère que ça se passe bien quand 200 à 300 loups sont braconnés chaque année. Les pays où ça se passe mieux, ce sont ceux où le loup n’a jamais disparu. Donc les hommes et les loups ont toujours vécu ensemble. Et le loup sait que s’il insiste malgré tous les avertissements, il va lui arriver des bricoles", précise Michel Meuret en mimant la gestuelle d’un fusil qu’on recharge.
Aujourd’hui, beaucoup de personnes favorables au loup ont évolué. Jean-Marc Landry aussi. Face aux difficultés et au rejet grandissant de son approche "pro loup" de la part des éleveurs, une forme de pragmatisme l’a emporté. Pas d’agriculture de qualité sans des mesures parfois drastiques : "Si on veut de la Nature ET des paysans, il faut un engagement de toute la Société. Il faut mettre la main au porte-monnaie et s’engager pour soutenir les éleveurs. La cohabitation c’est ça… L’éleveur aussi fournit des efforts pour se protéger, accepte une certaine prédation d’une partie de ses moutons. Et de l’autre côté, c’est aussi dire que quand il y a des loups qui déconnent… On les flingue".
L’histoire du loup en Wallonie démarre à peine. Dans les pays plus expérimentés, la question de la régulation revient comme les vagues sur le littoral. L’Union européenne compterait 13.000 loups. D’ailleurs, une initiative de la commission Agriculture du Parlement européen demande de revoir le statut de protection du loup dans plusieurs régions. Elle a peu de chance d’aboutir mais joue sans doute le rôle de la première pierre d’une évolution d’ici plusieurs années. Donc oui, sans prendre trop de risques, la Wallonie va, un jour, limiter sa population de loup mais pas avant un moment.