Pourquoi avoir décidé de sortir ton album en 2 parties ? Tu n’as pas peur que certains fans trouvent que 8 morceaux, ça soit trop peu pour un nouveau disque ?
Pour moi, un album c’est en général 12 ou 13 morceaux. C’est ce que j’avais fait au départ. Puis avec le temps que j’ai eu pour le produire, j’ai trouvé que j’avais encore beaucoup de matière. Je trouvais qu’un album électro de 16 titres, c’était un peu lourd à digérer. Il y avait aussi deux pans qui se dessinaient, un peu être plus pop, même si tu vas me dire que la part 1 ne l’est pas spécialement mais malgré tout, il y a des chansons de ce style dessus. Le second pan est plus dur, plus indus, mais j’ai trouvé qu’on pouvait diviser et garder une certaine homogénéité. Selon moi, c’est aussi plus facile à appréhender.
Est-ce que le confinement a influencé tes productions ? Est-ce qu’il a changé quelque chose chez toi ?
Alors par rapport à avant, je n’aborde pas les mêmes thèmes. Lors de la conception de l’album, je n’ai pas eu l’impression de ressentir ces frustrations. C’est maintenant que j’en parle que je les ressens et que les thèmes abordés sont liés au confinement. Après, je n’ai absolument pas voulu appeler un morceau covid ou pandémie. Sans le vouloir, j’ai parlé de ce sujet. Je traite de l’isolement, de l’illégalité de la fête, de la solitude… Donc oui, cet album a été influencé par la situation sanitaire que nous avons vécue. En résumé, il parle de notre époque.
Comment après 4 albums et tous tes autres projets, on arrive à encore évoluer dans la musique qu’on produit ?
Je pense que j’ai toujours ma griffe et mon vocabulaire musical mais je fais aussi énormément de recherches. Je ne sais pas si ces dernières sont ultra-visibles. Cependant, il y a plein de nouveautés dans les effets, mais aussi dans les traitements vocaux, dans la programmation, des subtilités dans les arrangements… En fait, ceci explique pourquoi je suis assez lent au final.
Est-ce que tu dirais que tu es geek et que tu es tout le temps en train de faire de la veille par rapport aux nouvelles techniques de productions ?
Je ne suis pas sans arrêt en train de faire de la veille mais quand j’en fais, c’est par vague. Quand je m’y mets, c’est pendant des longues périodes et je vais assez loin. Je suis geek mais souvent pour concevoir un album, j’utilise très peu de machines. Par contre, je vais creuser profondément dans ces dernières. En général, j’ai souvent 6 ou 7 nouvelles machines et j’en sélectionne 3 favorites dans lesquelles je vais farfouiller.
Dans le communiqué, on parle de sonorités "rave" mais aussi "disco", c’est quoi ton processus de création ? Comment tu sélectionnes les machines que tu vas utiliser pour un nouvel album ?
En début d’album, je ne sais jamais ce que je vais faire. Ici, je savais que je ne voulais pas retourner dans quelque chose de trop disco. Mon précédent album, "Voyager", était très orienté vers ce genre. Cela ne me convenait plus et après Kompromat, j’avais envie de retourner à de sonorités post-punk et techno.
Concernant les machines, c’est vrai que j’ai une belle collection. Je les ai toujours trouvées fascinantes. La programmation me fascine également. Pourtant, je n’étais pas très bon en sciences à l’école. En fait, la programmation, c’est de la physique appliquée. Tout ce qui était ultra-relou pour moi au collège est devenu une passion parce qu’en fait, ce n’est plus de la théorie. Tu mets vraiment les mains dans les machines et ça devient vivant. Je suis simplement un passionné. Je sélectionne les machines que je vais utiliser par rapport à leur caractère. Ce n’est pas une histoire de prix ou de puissance. Des fois, je m’attache à du matériel tout pourri. D’autres fois, j’aime un synthé ou une boîte à rythme parce qu’ils proposent quelque chose de différent. Il faut que je crée une relation avec une machine pour me décider à l’employer sur un album.
Tu dirais que tu es as un comportement compulsif vis-à-vis de l’achat de matériel ?
Oui. En plus, j’ai la chance d’habiter pas loin d’un immense magasin de musique à Paris. Ils ont un grand choix de matos. Quand je vais là-bas, je me sens comme à Disneyland. Il y a souvent des arrivages, je discute avec les vendeurs qui sont devenus des potes. En ce moment, il y a beaucoup de créativité dans les machines. C’est très excitant !
Est-ce que DISSIDÆNCE PART 1 annonce un retour de Vitalic en solo pour une longue période ou est-ce que tu vas encore laisser de la place à tes autres projets comme Kompromat ?
J’ai fait pour le théâtre du Chatelet, une création avec une chanteuse Tunisienne qui s’appelle Emel. C’était un concert pour France 4. On a créé 5 morceaux et on va les sortir. C’est vraiment un truc que je n’ai jamais fait mais je pense qu’on reconnaît toujours ma patte. Ensuite, après la tournée Vitalic annoncée, je vais faire du Kompromat. C’était vraiment une expérience géniale de tourner avec Rebeka Warrior et on n’a pas du tout envie de s’arrêter.
Tu parles de théâtre, est-ce que c’est un univers qui t’attire ? Tu aimerais bosser sur un projet qui mélange musique électronique et cette discipline ?
Oui pourquoi pas. Je suis actuellement sur une musique de film et c’est un sacré boulot. J’espère déjà ressortir indemne de cette expérience cinématographique. Je suis totalement inclus dans la production. Par exemple, pour les scènes de danses africaines mais sur de l’électro, on a travaillé ensemble avec le chorégraphe et l’orchestre. Pour le moment, je n’ai pas encore les images. J’ai vu des chorégraphies, j’ai participé à une scène du film qui se déroule dans une église. Je bosse surtout avec le script et l’impression du réalisateur. Ce n’est pas toujours facile, je l’adore mais cette dernière change souvent. Tout bouge tout le temps, tu as un peu l’impression d’être sur des sables mouvants en permanence.
C’est une grosse dose de boulot mais c’est hyper intéressant. De plus, ça me fait du bien d’être dirigé. Je me mets complètement au service du film, ce qui est totalement l’opposé de quand je produis MON album. C’est une approche complètement différente mais le thème du film me parlait et c’est une aventure très enrichissante !
Ici, c’est ma musique qui est au service de quelqu’un d’autre.