Bruxelles

Vous ne poserez plus jamais les fesses de la même façon sur un strapontin de la STIB

Chris Van Laethem, garnisseur à la STIB.

© Sébastien Cools

Aiguillé par une porte-parole et guidé par un superviseur, inscrit sur le registre et chaussé de surchaussures de sécurité, nous avons pu franchir les portes d’un atelier de la STIB souvent insoupçonné des voyageurs : celui chargé du garnissage des sièges des bus et des trams. Visite dans des coulisses artisanales que tous les passagers ne devinent pas au moment de s’asseoir dans un 71 articulé.

En ce lundi matin, au volant d’une camionnette de service, Miguel Lago Jorge, responsable Gestion Coordination Maintenance, nous fait pénétrer sur le site de Haren. Après avoir longé voies d’essai et autre dépôt, nous entrons dans un vaste atelier, suivons les marques au sol en zigzaguant entre de multiples fonctions, pour finalement rejoindre Chris Van Laethem, qui nous attendait pour ainsi dire ciseaux à la main. L’homme en tenue jaune, équipé de chaussures de sécurité ainsi que de bouchons et de lunettes de protection, s’affaire au milieu d’un décor digne d’un atelier de confection textile.

Un métier en voie de disparition

Menuisier avant d’apprendre le garnissage, Chris a rejoint la Société des transports intercommunaux de Bruxelles il y a une vingtaine d’années. De mémoire d’employé, le service garnissage existe depuis plus de trente ans. L’équipe comporte trois autres personnes, sans compter le responsable plutôt en charge de la gestion. Comme souvent à la STIB, la formation se donne en interne, sur six mois pour la base. Chris s’est aussi formé en cours du soir. "Je ne sais pas vraiment si les écoles de garnissage existent encore", glisse le néerlandophone, dans un très bon français. "C’est un peu un métier qui disparaît", constate-t-il. Dans sa tâche, Chris Van Laethem apprécie non seulement le travail manuel, mais aussi la précision indispensable et les résultats visibles.

Chris apprécie non seulement le travail manuel, mais aussi la précision indispensable et les résultats visibles.
Chris apprécie non seulement le travail manuel, mais aussi la précision indispensable et les résultats visibles. © Sébastien Cools

Stocks de réserve

Quand le siège d’un véhicule fait les frais d’un graffiti ou d’un coup de cutter, que se passe-t-il ? Pour les tags, le nettoyage est difficile, parce que les produits nettoyants sont agressifs. Le cuir est attaqué et son aspect change. La décision du remplacement suite à un dommage est prise lors des contrôles dans les dépôts. Un stock de réserve est présent dans chaque dépôt, afin que les sièges puissent être remplacés tout de suite, même le week-end. On parle d’environ 150 pièces, dossiers et assises, en rotation dans ces installations. Le personnel des différents dépôts démonte et envoie les sièges abîmés ou salis vers Haren, où ceux-là sont dégarnis puis réparés, l’intervention consistant à agrafer, coudre et garnir. Ce travail sur mesure s’effectue seulement dans l’unique atelier harenois, entre autres étapes sur des machines à coudre. Les sièges renvoyés sont toujours réinstallés au sein des dépôts, par leur personnel.

La réparation s’effectue notamment au moyen de machines à coudre.
La réparation s’effectue notamment au moyen de machines à coudre. © Sébastien Cools

Réaction rapide

"Dans l’absolu, tout peut être externalisé", nous concède Miguel Lago Jorge, qui défend par contre les avantages de coût, d’expérience et de rapidité du service interne. L’état du siège ayant évidemment son importance pour le voyageur, la STIB ne veut pas attendre des mois avant de réagir. "On reçoit des palettes à regarnir tous les jours, il faut que ça tourne", souligne le responsable.

Le superviseur Miguel Lago Jorge (à droite) défend les avantages de coût, d’expérience et de rapidité du service.
Le superviseur Miguel Lago Jorge (à droite) défend les avantages de coût, d’expérience et de rapidité du service. © Sébastien Cools

Entre 5 et 10 sièges par journée de travail

Un modèle n’est pas l’autre, mais le garnissage peut prendre jusqu’à une heure et demie pour un siège, si tout est à refaire. Chaque travailleur réalise entre cinq et dix sièges par jour, en fonction du type et de la taille. Il y a du travail pour toute l’année, du lundi au vendredi, et au minimum deux personnes sont constamment nécessaires. Cela monte à quatre pour les plus grosses interventions, comme remettre à neuf tout un véhicule. Le service répare les sièges des passagers, des conducteurs ou conductrices et s’occupe aussi des chaises de bureau, des bancs des soudeurs, ainsi que des sièges des camions et engins de chantier. D’après son superviseur élogieux, la brigade est tellement efficace que les sièges réparés ne lui sont jamais retournés pour défaut.

Chaque travailleur réalise entre cinq et dix sièges par jour, en fonction du type et de la taille.
Chaque travailleur réalise entre cinq et dix sièges par jour, en fonction du type et de la taille. © Sébastien Cools

Du vandalisme qui coûte cher

Actuellement, outre la mousse antifeu, cuir et similicuir sont les deux matières principales utilisées pour le revêtement dans les véhicules, pour le confort, la qualité, la solidité et les facilités de nettoyage. Selon des calculs récents, avec matériaux et main-d’œuvre, il faut compter environ 50 euros pour les assises en similicuir et environ 120 pour celles en cuir. Le vandalisme gratuit a bien un coût.

Avec matériaux et main-d’œuvre, il faut compter environ 50 euros pour les assises en similicuir et environ 120 pour celles en cuir.
Avec matériaux et main-d’œuvre, il faut compter environ 50 euros pour les assises en similicuir et environ 120 pour celles en cuir. © Sébastien Cools

Récupération amusante

Les chutes et anciens matériaux ne sont pas forcément jetés, ils connaissent parfois une seconde vie : le cuir peut être vendu aux voyageurs en produits dérivés (comme des pochettes pour les cartes Mobib, classées parmi les "best-sellers" sur le STIB Store en ligne) ou le tissu peut être recyclé sur des chaises à destination du personnel, faisant naître un souvenir avec la patte de l’entreprise. "On essaie de minimiser les chutes", "On utilise le maximum", se répondent Chris et Miguel.

Le tissu de ces chaises vous dit quelque chose ? C’est normal !
Le tissu de ces chaises vous dit quelque chose ? C’est normal ! © Sébastien Cools

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