Que ce soit au Sénégal, en Mauritanie ou en Guinée, les pêcheurs artisanaux le constatent chaque jour, la pêche industrielle étrangère met en péril les économies locales. Le bassin de pêche ouest africain est le plus pillé au monde par les Européens – notamment l’Espagne et la France – mais aussi par les Chinois, les Russes, les Turques ou encore les Sud-Coréens.
Les pêcheurs artisans sont obligés d’aller de plus en plus loin en mer pour trouver des poissons en quantité. "Chaque famille a sa pirogue et c’est la pirogue qui entretient la famille", explique Gaoussou Gueye, Président de la confédération africaine des organisations professionnelles de la pêche artisanale qui regroupe 27 pays côtiers d’Afrique.
"Mais si le pêcheur est obligé de faire des crédits pour avoir du carburant, si la pirogue ne parvient plus à aller en mer pour nourrir sa famille, alors là, ça pose des problèmes !", déplore-t-il.
La pêche artisanale pour ces pays côtiers est autant une source de revenus que d’alimentation. "La sardinelle, très prisée par les chinois, est une ressource alimentaire qui se raréfie et pourtant c’est le poisson le plus accessible aux populations les plus démunies", explique encore Gaoussou Gueye.
Comble de l’absurde : les Chinois viennent pêcher la sardinelle dans les bassins ouest africains non pas pour nourrir les populations, mais pour nourrir les poissons d’élevage et autres animaux… alors que la sardinelle est un aliment de base pour ces pays côtiers.
"Pourquoi ne pas réserver une zone exclusive à la pêche artisanale ?", propose alors Gaoussou Gueye.
La surpêche se fait souvent dans l’illégalité mais aussi en toute légalité
Poulpe, sardinelle, langouste, thon… sont autant d’espèces ciblées en grande quantité par les pêcheurs industriels étrangers, dans le bassin de pêche ouest africain. Le Bassin Est africain n’est pas mieux loti.
"On sait par exemple que l’albacore est en état de surpêche avancée depuis 2015, que le thon obèse l’a rejoint en 2022", énumère Frédéric Le Manach, directeur scientifique de l’association Bloom, "que la bonite – qu’on retrouve dans les boites de conserve – est de très loin la plus pêchée. Et nous sommes très pessimistes sur les conclusions de la prochaine évaluation scientifique". Les données manquent pour les autres espèces.
La surpêche se fait souvent dans l’illégalité mais aussi en toute légalité. "L’illégalité peut se traduire de plusieurs manières", explique Frédéric Le Manach. "Les bateaux sont dans une zone sans en avoir l’autorisation, des poissons sont pêchés alors que leur taille ne l’autorise pas, certaines méthodes de pêches sont utilisées alors qu’elles sont illégales etc.".